Un rapport parlementaire porté par la sénatrice UMP Chantal Jouanno s’attaque au phénomène « lolita » : ce sont des petites filles mineures de 10,11,12 ans qui s’habillent comme des femmes adultes ou qui posent dans les magazines dans des postures suggestives. Le rapport qui dénonce l’hypersexualisation des enfants préconise notamment l’interdiction des concours de beauté « mini-miss » ainsi que le retour de l’uniforme dans les écoles primaires.
Le phénomène « lolita », déjà très répandu dans certains pays d’Europe, inquiète les parents en France, selon la sénatrice UMP Chantal Jouanno qui vient de présenter au gouvernement un rapport qui dénonce l’hypersexualisation des petites filles. Dans un entretien accordé à 20 Minutes, l’ancienne ministre des Sports estime que « l’hypersexualisation (des fillettes) accélère la régression de la cause féminine ».
On parle d’hypersexualisation des enfants quand on expose ces derniers « à la sexualisation de leurs expressions, postures ou codes vestimentaires, jugées trop précoces », définit le rapport parlementaire. En clair, les parents se font complices de l’hypersexualisation de leurs petites filles lorsqu’ils les laissent se déguiser en femmes adultes malgré leur jeune âge. Comme dans certains magazines, il n’est pas rare de voir des mannequins en herbe prenant parfois des poses dites "lascives, suggestives, provocantes, ou sexy"….
« L’hypersexualisation des petites filles n’est pas perçue comme un danger. En habillant leurs filles comme des femmes, certains parents ne voient pas à mal. Mais, dans la mode, les jouets ou les dessins animés, nous assistons à un retour des stéréotypes. Le danger, c’est que cette vague de l’apparence remette en cause notre intelligence. L’hypersexualisation est la cause de la régression féminine », dénonce la sénatrice Chantal Jouanno.
Dans les colonnes de 20 Minutes, l’élue de Paris (Ile-de-France) s’est dite inquiète face aux « dangers individuels. Aujourd’hui, 37 % des filles de onze ans avouent être à la diète. L’intrusion précoce de la sexualité entraine des dégâts psychologiques irréversibles dans 80 % des cas, selon les experts. Et danger collectif pour la parité », soutient l’ancienne ministre.
« La vague de l’hypersexualisation n’a pas encore massivement touché nos enfants » mais « la société dans son ensemble est hypersexualisée, dès le plus jeune âge on voit apparaître des stéréotypes très clivés garçons-filles, et il y a une puissance du marketing colossal pour rompre la barrière des âges et inciter à adopter des comportements d’adolescents », s’indigne Chantal Jouanno.
Pour pallier à la multiplication des « lolitas », l’ex-ministre des Sports propose dans son rapport une série de recommandations. Il s’agit notamment d’interdire l’organisation des concours de beauté « mini-miss » ou tout simplement d’ « interdire aux moins de 16 ans de devenir l’égérie de marques de mode ».
Afin de combattre le mal « en amont », le texte préconise aussi le retour de l’uniforme dans les écoles primaires. « Regardez le Japon est touché par ce phénomène alors que l’uniforme est de rigueur... Mais, à dix ans, les enfants parlent de Gucci et Vuitton. Un uniforme peut répondre à la concurrence des marques. Je propose donc un socle de valeurs national, une sorte de règlement, à adopter pour que les jeunes soient respectueux de l’institution qu’est l’école primaire », explique la sénatrice.
Pour autant, tout le monde n’est pas d’accord avec Chantal Jouanno. « En parlant d’hypersexualisation, on diabolise des comportements de jeunes filles, qui n’ont pas du tout la dimension torride que laisse penser le terme », critique Michel Fize, sociologue au CNRS.
Pour sa part, la psychanalyste Claude Halmos, spécialiste de l’enfance, est d’avis que : « L’hypersexualisation des petites filles, c’est-à-dire le fait de les laisser se déguiser en femmes adultes, est très préjudiciable pour leur construction. Si elles sont déjà grandes, quels besoins ont-elles de grandir ? ». Cependant, « ce qui est complètement paradoxal, c’est que le gouvernement veut faire des préconisations pour que les petites filles ne s’habillent plus comme des grandes, mais en même temps, il supprime le défenseur des enfants et veut rapprocher la justice des mineurs et celle des majeurs », déplore-t-elle. « Il fait mine là de se saisir d’un sujet qui angoisse à juste titre les parents, mais c’est un leurre », lance la psychanalyste dans les lignes du Parisien.