Les entreprises de plus de 50 salariés seront dans l’obligation de verser chaque année une prime "obligatoire" à leur personnel, en cas de hausse de dividendes distribués aux actionnaires. C’est ce qui ressort d’une réunion interministérielle organisée hier en fin d’après-midi à l’Elysée.
"Toutes les entreprises de plus de 50 salariés soumises au régime de la participation auront l’obligation, si les dividendes distribués sont supérieurs à l’année d’avant, de verser une prime négociée avec les partenaires sociaux", indique à l’agence de presse Reuters un participant à la réunion à la présidence.
D’après les calculs du gouvernement, cette prime exceptionnelle devrait concerner huit millions de salariés " du privé uniquement ". Le montant de la prime obligatoire reste toutefois à négocier avec les partenaires sociaux. Des sources proches du dossier avancent un chiffre d’"au moins 1.000 euros" par an, soit au même taux de cotisation sociale que les primes de participation (8 %). Le gouvernement souhaite appliquer le dispositif "dès cette année". Cependant, la prime est facultative pour les entreprises de moins de 50 salariés, idem pour celles qui ne distribuent pas de dividendes.
Mardi 19 avril lors de sa visite dans les Ardennes, Nicolas Sarkozy a affiché sa détermination à faire passer ce projet, destiné, selon lui, à améliorer le pouvoir d’achat des Français. "Le partage de la valeur, j’y tiens parce que c’est une question de justice", avait-il déclaré. "Quand il y a la reprise, j’affirme qu’il est normal que les salariés et les ouvriers à qui on a demandé des efforts pendant la crise bénéficient de la reprise, c’est un principe sur lequel je ne céderai pas", avait-il prévenu, suscitant l’hostilité et l’incompréhension du patronat. Sur Canal+, la patronne du Medef, Laurence Parisot, dénonce une mesure "incompréhensible"."On ne peut pas déconnecter les salaires, les revenus, les primes, l’intéressement, la participation, à l’activité propre à chaque entreprise. Les choses doivent se regarder au cas par cas", explique-t-elle. Plus virulent, Jean-François Roubaud, président de la Confédération générale des petites et moyennes entreprises (CGPME) estime que "L’Etat n’est pas forcément le mieux placé pour nous donner des leçons." Et d’ajouter : "M. Baroin semble fixer le prix du bulletin de vote à 1 000 euros ".
Avis négatifs également chez les économistes. Jean-Christophe Caffet, économiste de Natixis, a émis des réserves dans les colonnes journal Le Monde. "Il ne faut pas confondre rémunération du travail et rémunération du capital. Théoriquement, les salariés sont rémunérés par les salaires et les actionnaires par les profits. Si on part du constat, erroné, que le partage des revenus en France est défavorable aux salariés, alors il faut augmenter les salaires et non leur attribuer une part des profits, car ceci reviendrait à leur faire supporter le risque cyclique d’activité théoriquement supporté par l’actionnaire", argumente-t-il.