Un rapport sur l’affaire Merah a été rendu public ce mardi par le ministère de l’Intérieur.
Le rapport publié ce mardi 22 octobre par le ministère de l’Intérieur sur l’affaire Mérah scrute les moindres procédures engagées dans cette affaire. Les ratés comme les succès, ce document de 17 pages commente tout.
D’abord, concernant l’évaluation de la dangerosité du tueur en scooter, les deux rapporteurs de l’Inspection générale de la police nationale (IGPN, la police des polices) à savoir, Guy Desprats et Jérôme Léonnet, soulèvent plusieurs défaillances objectives, impliquant la Direction centrale du renseignement intérieur (DCRI).
Le document rappelle en effet qu’en 2006, Merah avait déjà été connu par les services français pour l’intérêt qu’il a nourri vis-à-vis de la mouvance salafiste mais en 2010, sa fiche de surveillance a été désactivée pour des raisons inexpliquées.
En 2010, après un "debriefing" raté, les Renseignements intérieurs ne l’ont plus mis sous surveillance et ce, jusqu’en janvier 2012.
Ces défaillances "échappent à l’erreur humaine caractérisée" mais tiennent à "la conjonction d’omissions et d’erreurs d’appréciation, à des problèmes de pilotage et d’organisation des services et à des cloisonnements encore très présents entre renseignements intérieur, police judiciaire et sécurité publique", estiment toutefois les rapporteurs.
La police des polices dénonce également le cloisonnement des informations entre services. Son analyse s’appuie entre autres sur des doléances faites par une mère de famille en 2010. Elle aurait contacté les autorités après que Mérah ait montré à son fils des images de décapitation mais la DCRI n’a pas été mise au courant. Il y a aussi le retour du tueur en scooter au mouvement islamiste en 2008, une information cruciale qui est encore passée sous le nez des agents des services de renseignements.
Le rapport salue toutefois les « choix tactiques » du RAID concernant les procédures d’interpellation de Mérah en mars à Toulouse. L’ IGPN estime que le fait d’avoir pris d’assaut l’appartement du tueur plutôt que de le traquer à l’extérieur est tout à fait « cohérent ».
Après avoir passé en revue le fonctionnement des services de renseignements, les deux rapporteurs ont par ailleurs fait quelques recommandations en vue de lutter efficacement contre le terrorisme. Ils ont suggéré que « de nouveaux moyens d’enquête » moyennant une meilleure « détection préventive dans le domaine financier » soient mis en place. Ceci en référence au cas de Mérah qui avait pu louer un appartement et des véhicules alors qu’il ne bénéficiait pas de revenus fixes.
Ils préconisent également l’élaboration d’un cadre juridique favorisant la traque des sites djihadistes. « Une partie de la formation et de l’endoctrinement de Merah est directement liée à la consultation de tels sites », ont-ils fait savoir.
Concernant la DCRI, « la création d’une structure dédiée au pilotage des services territoriaux ; le développement d’une structure d’audit interne ; la formalisation des entretiens de prévention-dissuasion et le recours à des experts extérieurs » s’avèrent plus que nécessaires.
Mais également « le développement de bureaux de liaison entre la DCRI et les services chargés de l’information générale. Au-delà, des échanges d’information plus réguliers et plus formalisés avec l’ensemble des services de police et de gendarmerie et les services de l’administration pénitentiaire sont prévus ».
Réagissant à ce rapport émis par l’IGPN, le ministère de tutelle a annoncé dans un communiqué qu’il « prend acte des dysfonctionnements passés afin de consolider la lutte antiterroriste au service de la sécurité des Français". De ce fait, le ministre « entend mettre en œuvre rapidement les adaptations nécessaires » comme le renforcement de l’« efficacité des services de renseignements face aux mutations des menaces terroristes ».
Source : Le Monde