Humiliées, maltraitées, désespérées, de nombreuses femmes en détresse franchissent les portes des foyers d’hébergement d’urgence. La première mission du personnel est de leur redonner confiance et surtout de les aider à quitter définitivement leur compagnon violent. Le drame de Laure Dumont, tuée par son ex-concubin lundi dernier, touche particulièrement ces femmes, dont la vie a été menacée.
A 48 ans, Eliane (son nom a été changé pour respecter son anonymat), a vécu 20 ans sous les coups de son mari violent. Des blessures physiques continuelles, mais surtout des blessures morales, bien plus difficiles à cicatriser.
Mécontent, son compagnon la mettait dehors, allant jusqu’à la traîner par terre par les cheveux. Un déchaînement de violence qui a démarré avant même la date de leur mariage. Trois mois avant leurs noces, son mari lui plante un couteau au niveau du front. Leur union empire les choses et quotidiennement pendant des années entières, Eliane encaisse les coups en silence. Il lui a fallu 20 ans et un courage immense pour oser le quitter le 4 juillet dernier. Parler et se faire aider au centre d’hébergement ont été ses premières actions pour se reconstruire.
"Lorsqu’elles arrivent, ces femmes sont brisées", affirme Gaëlle Fontaine, chef de service du centre. Les femmes victimes de violence ont perdu toute confiance en elles. L’étape essentielle du travail du personnel du centre consiste à les écouter et à les sortir définitivement de l’enfer qu’elles ont subi. Les agents du centre les aident notamment à effectuer les démarches pour divorcer. Un pas déterminant vers la fin du calvaire.
L’histoire de Laure, jeune mère de famille de 20 ans tuée par son ex-concubin lundi dernier, a fait l’effet d’un électrochoc pour Annie (son nom a été changé pour respecter l’anonymat). Cette mère de deux enfants a elle aussi subi les sévices de son compagnon. Ces maltraitances ont commencé au moment où Annie a quitté son concubin. Depuis cette date, les menaces sont permanentes. "Il m’a dit : je vais t’écraser avec mon 4X4", raconte Annie. Aujourd’hui vivante, Annie ne peut s’empêcher de penser à ces femmes comme Laure, tombées sous les coups de leur compagnon. La solution selon elles : briser la loi du silence.
Les hommes aussi doivent parler selon Laurent Fontaine. "Il ne faut pas diaboliser les hommes, c’est difficile pour eux aussi, ils sont malades", explique le psychologue du centre. A l’origine de cette violence viscérale : la reproduction du schéma familial. "Ils ont eu l’habitude enfant de voir les femmes soumises", raconte le médecin, tout en soutenant que "rien n’est irréversible".