La Star qui collecte et valorise nos déchets est en pleine stratégie de reconversion industrielle. Objectif : appliquer les recommandations de Gerri.
La Star (société de transport et d’assainissement de la Réunion) est spécialisée dans les prestations de collecte, de valorisation des 400 000 tonnes de déchets produites tous les ans par les ménages réunionnais, de nettoiement et d’assainissement. Mais en prenant en compte les autres déchets émanant de l’industrie ou de l’agriculture, "On peut considérer que le flux global de déchets approche le million de tonnes" explique Jean-François Bourdais, directeur général de la Star.
Créée en 1984 et implantée initialement à la Réunion, la société s’est progressivement développée sur l’ensemble de la zone Océan Indien pour former le groupe STAR.
Aujourd’hui, la société STAR s’est spécialisée dans 5 domaines différents : la collecte des déchets solides (Transit du Port, collectes CINOR, CIREST et TCO), la collecte des déchets liquides (assainissement et travaux pétroliers à Saint-Paul et Saint-Louis), le traitement et la valorisation des déchets (Centre d’Enfouissement de Sainte Suzanne, compostage sur Ste Rose), le traitement des déchets dangereux (plateforme St André), la collecte des huiles usagées (plateforme de regroupement et prétraitement de Cambaie), l’analyse des effluents industriels (laboratoire STARDIS sur saint André).
Produire moins de déchets. L’objectif est difficile et doit passer par la pédagogie selon Jean-François Bourdais : "concernant les particuliers, la facturation du service n’étant pas proportionnelle à la production de déchets, le seul levier est le levier pédagogique", tout en expliquant que la répression doit également servir ce projet mais : "qu’elle doit cependant être précédée d’une politique de communication et de sensibilisation innovante concernant les processus d’élimination des déchets".
Jean François Bourdais, directeur général de la Star : "le problème des nuisances olfactives de la décharges de Sainte-Suzanne bientôt réglé".
Les Réunionnais produisent tous les ans 400 000 tonnes d’ordures, ce chiffre est il stable ?
400 000 tonnes ne représentent que la part de déchets produits par les ménages. Pour avoir une vision complète du sujet, Il convient de prendre en considération les déchets que produisent les professionnels (distribution, bâtiment, industrie, agriculture). On peut considérer que le flux global de déchets approche le million de tonnes. La typologie des déchets est très vaste : ferraille, carton, plastique, déchets toxiques, déchets hospitaliers, déchets d’équarrissage, déchets inertes (gravats), bois, déchets organiques, boues de stations d’épuration.
Comment traitez-vous tout cela ?
Actuellement, la plupart des déchets sont assignés à une filière, nous devons toutefois optimiser leur valorisation. STAR exploite des centres de tri des déchets en vue de leur exportation, des centres de compostage de déchets verts, un centre de revalorisation des huiles usagées, une unité de prétraitement des graisses, une plateforme de regroupement des déchets spéciaux et un centre d’enfouissement.
Pouvez-vous réduire les nuisances olfactives de la décharge de Sainte Suzanne ?
Nous avons développé un programme de travaux sur 2 ans pour régler ce problème de nuisance olfactive. Nous arrivons à échéance de ce programme, qui je pense, commence à porter ses fruits. Notre engagement est de régler ce problème et nous ne mettons aucune limite financière à notre objectif de réussite. Je rappelle toutefois qu’un centre d’enfouissement est un outil de bout de chaîne et que le meilleur moyen d’apporter une réponse à cette problématique est de trier plus et de valoriser tous les types de déchets. La réunion dispose de nombreux outils de tri, leur utilisation doit être optimisée.
Nous réfléchissons d’ores et déjà à l’avenir du centre, en mettant en valeur les caractéristiques énergétiques et pédagogiques du site :
- D’abord, en développant un plan de production énergétique. Nous utiliserons les 8 ha de surface réhabilitée ainsi que les 2000 m3 de biogaz captés toutes les heures pour produire 6,5 mWh d’énergie, soit la consommation de 4000 voitures électriques qui parcourraient 15 000 kms par an.
- Ensuite, en créant les conditions d’une reconversion industrielle. Nous développons actuellement avec des partenaires privés et la mairie de Sainte Suzanne un projet d’implantation de four verrier alimenté par l’énergie solaire et le biogaz du site.
- Enfin, en utilisant le caractère exceptionnel du site pour créer un pôle pédagogique. Ce pôle sera constitué d’une classe verte et d’une salle de conférence à destination des écoles. Le site sera également équipé d’un parcours pédagogique permettant de présenter les installations du site (traitement des eaux, valorisation du biogaz, production d’énergie). En parallèle, STAR a commandité au Muséum d’Histoire Naturelle une analyse faune/flore du site. Fort de cette analyse, chaque visiteur pourra participer au réaménagement du site en plantant une espèce endémique.
Entre incinération et enfouissement, quelle solution faut-il choisir ?
L’avenir de notre société passe par le développement de process de traitement des déchets adaptés au contexte de la Réunion. Tout est écrit dans GERRI, il suffit de l’appliquer. Le déchet peut devenir matière première ou énergie. Je rappelle que les études prospectives en besoins énergétiques prennent en considération une forte augmentation de la population ainsi que le développement du transport électrique. La réunion doit poursuivre sa politique d’autonomie énergétique.
Passionné par les techniques novatrices de traitement et de revalorisation des déchets, je profite de mes nombreux déplacements en Europe ou dans le Pacifique, pour visiter des outils de traitement de déchets. Notre métier est fortement impacté par les politiques générales environnementales et énergétiques. En Europe par exemple, L’Allemagne a décidé, suite à l’abandon de la production énergétique nucléaire, de développer des unités de valorisation énergétique (incinération de déchets). La Suisse, considérée à juste titre, comme un pays soucieux de la protection environnementale importe des déchets pour assurer la production d’énergie.
Les process de traitement devront être multi filières. Ils produiront, après tri des matières premières, du compost et/ou de l’énergie. La production d’énergie devra reposer sur des procédés techniques innovants et respectueux de l’environnement.
Le sujet doit être étudié de manière pragmatique et non passionnelle. Nous devons comparer les impacts environnementaux des différents process de production énergétique. Des études sérieuses réalisées par le Ministère de l’Environnement peuvent éclairer cette réflexion.
Quelles solutions pour produire moins de déchets ?
Cette démarche de diminution de la production de déchets est capitale. Les entreprises ont déjà amorcé cette réflexion, elles sont fortement mobilisées pour diminuer leur impact environnemental et limiter le budget de traitement de déchets. Le levier financier est très efficace pour les entreprises.
Concernant les particuliers, la facturation du service n’étant pas proportionnelle à la production de déchets, le seul levier est le levier pédagogique. Je pense que les collectivités et professionnels du déchet doivent renforcer leurs moyens pour sensibiliser le public. STAR, pour ce faire, étudie le développement sur le site de Sainte Suzanne d’un pôle pédagogique.
Faut-il punir les pollueurs ?
Je pense effectivement cette démarche utile. Elle doit cependant être précédée d’une politique de communication et de sensibilisation innovante concernant les processus d’élimination des déchets. Nous devons éduquer et expliquer l’impact des mauvaises pratiques sur l’environnement.
Considérez-vous que la Réunion soit une île propre ?
Il y a encore du travail à faire, les collectivités sont très actives pour améliorer les conditions de propreté des communes. La propreté est surtout de la responsabilité des usagers. Le meilleur moyen d’avoir une ile propre est de ne pas la salir par des gestes irrespectueux de l’environnement. Le travail prioritaire est encore fois un travail de sensibilisation.