En dépit des appels à Dieu de Manuel Noriega, la justice française a une nouvelle fois refusé mercredi de remettre en liberté l’ancien dictateur panaméen, extradé le 27 avril des Etats-Unis vers la France où il doit être rejugé pour blanchiment d’argent de la drogue.
PARIS (AFP) - En dépit des appels à Dieu de Manuel Noriega, la justice française a une nouvelle fois refusé mercredi de remettre en liberté l’ancien dictateur panaméen, extradé le 27 avril des Etats-Unis vers la France où il doit être rejugé pour blanchiment d’argent de la drogue.
"Les risques de fuite sont importants et justifient le maintien en détention de Manuel Noriega", a tranché le tribunal correctionnel de Paris, à l’issue d’un peu plus de deux heures de délibéré.
Pour le tribunal, Mes Olivier Metzner et Yves Leberquier n’ont "pas démontré que les conditions de détention de leur client à la Santé étaient "non-conformes" au statut de prisonnier de guerre dont il bénéficie.
"Que Dieu tout-puissant vous donne l’esprit et la sagesse pour juger cette affaire", avait lancé plus tôt le septuagénaire, costume sombre et cravate rouge rubis, en tendant le doigt vers le ciel.
Quelques secondes plus tard, le même doigt, cette fois vengeur, se dressait vers le procureur Philippe Bourion, relais selon lui des Etats-Unis, "policier du monde", qui "au lieu de respecter l’article 118 de la Convention de Genève prévoyant le rapatriement de Manuel Antonio Noriega vers le Panama, l’a envoyé en France".
Par ailleurs, le tribunal a confirmé que l’homme fort du Panama de 1981 à 1989 serait rejugé les 28, 29 et 30 juin pour avoir transféré en France 2,3 millions d’euros provenant du cartel de la drogue de Medellin (Colombie).
Alors qu’il affirme que ces fonds proviennent de l’héritage de son frère, de la fortune de sa femme et de versements de la CIA, Manuel Noriega avait été condamné par défaut à Paris le 1er juillet 1999 à 10 ans de prison et 11,4 millions d’euros d’amende pour blanchiment.
Noriega a fait appel de son placement en détention à son arrivée en France. Mais vendredi, la cour d’appel a renvoyé l’affaire au 21 mai, à la suite d’une demande des avocats qui réclamaient qu’une note diplomatique de juillet 2007 fut versée au dossier.
Mercredi, Me Metzner a une nouvelle fois déploré la "disparition" de la note, dans laquelle, selon lui, la France garantit aux Etats-Unis d’assurer certaines conditions de détention à M. Noriega, dans le cas de son extradition.
"L’immunité dont M. Noriega bénéficie en tant qu’ancien chef d’Etat du Panama interdit de l’incarcérer en France", a encore plaidé l’avocat, avant de rappeler qu’en 2001, une juridiction française avait reconnu l’immunité à Kadhafi.
"On a dit qu’on ne pouvait pas le poursuivre, s’est-il indigné, alors qu’il avait moins de pouvoir que le général Noriega et qu’il s’agissait d’un attentat", celui du DC-10 d’UTA qui coûta la vie à 170 personnes en 1989.
La situation n’a rien à voir, lui a répondu le procureur Philippe Bourion, car avec Kadhafi, il s’agissait "d’un chef d’Etat en exercice".
Noriega a 76 ans, il est malade, "à moitié paralysé du côté droit : il lui faut dix minutes pour descendre l’escalier le menant au parloir", a alors raconté Me Leberquier, demandant au tribunal "un peu d’humanité".
"Je n’emploierai ni vibrato, ni tremolo, ni référence à l’humanité, sinon je reposerai sur table les 20 tonnes de cocaïne produites à coup de M16", a répliqué sèchement le procureur, avant de requérir le maintien en détention du prisonnier.
Les avocats de M. Noriega vont faire appel de loa décision. L’audience devrait se tenir d’ici peu.