L’ancien directeur du programme Concorde Henri Perrier a reçu le soutien moral de l’ex-pilote d’essais du supersonique André Turcat mercredi, jour de plaidoirie de ses avocats au procès de l’accident qui fit 113 morts le 25 juillet 2000.
PONTOISE (AFP) - L’ancien directeur du programme Concorde Henri Perrier a reçu le soutien moral de l’ex-pilote d’essais du supersonique André Turcat mercredi, jour de plaidoirie de ses avocats au procès de l’accident qui fit 113 morts le 25 juillet 2000.
Venus spécialement d’Aix-en-Provence, celui qui fut le premier à piloter le supersonique en 1969 a patiemment écouté les avocats de M. Perrier demander la relaxe de leur client, auquel il est reproché de ne pas avoir apporté à l’avion les modifications nécessaires après plusieurs incidents.
En marge de l’audience, M. Turcat a jugé "scandaleux" que son ancien collaborateur de 80 ans se retrouve sur le banc des prévenus.
"Il est évident que sa responsabilité n’est pas engagée", a-t-il déclaré devant la presse. Selon lui, "il est tout à fait évident que l’accident était imprévisible et improbable".
"C’est la fatalité" qui a causé le crash. "Si j’avais été procureur, j’aurais eu le courage de plaider la relaxe", a-t-il dit, alors que le parquet a requis vendredi 24 mois de prison avec sursis contre M. Perrier.
Ce dernier fut membre de l’équipe de M. Turcat sur le premier vol d’essais, en tant qu’ingénieur navigant, avant de lui succéder comme directeur des essais, puis de diriger le programme Concorde.
"L’équipage est là, face aux juges", a lancé M. Turcat, accompagné de l’ancien mécanicien Michel Rétif, avant de louer les mérites de M. Perrier.
"C’est un modèle de rigueur et également de mémoire", a dit M. Turcat. "Il a un jugement extrêmement bien assis. C’est un homme parfaitement raisonnable, qui connaît le métier et connaissait l’avion".
Un éloge repris par Me Thierry Dalmasso, qui a conclu sa plaidoirie par un extrait d’un livre du même André Turcat : "je ne connais à Henri qu’un seul défaut, celui de trop travailler".
La défense de M. Perrier a nié que les incidents ayant affecté le Concorde a partir de 1979 aient été précurseurs de l’accident de Gonesse (Val-d’Oise).
Un pneu a éclaté après avoir roulé sur une lamelle perdue par un DC10 de Continental Airlines "faisant une brèche de 32cm sur 32" dans l’aile où se situent les réservoirs, déclenchant une "fuite massive de carburant", a résumé Me Christian Buffat.
"Ce Niagara va causer l’inflammation", a-t-il affirmé, "un phénomène totalement inconnu" et en aucun cas comparable aux "petites fuites" observées lors des incidents précédents.
La justice accuse M. Perrier de ne pas avoir renforcé la voilure comme cela avait été un temps envisagé. "On nous reproche l’abandon d’une idée, nous sommes passés dans le monde de Matrix, le monde virtuel, le monde du n’importe quoi", a protesté Me Dalmasso.
L’avocat s’en est aussi pris aux experts judiciaires qui, selon lui, "se sont complètement trompés de méthode". Il a fustigé leurs "formules à l’emporte-pièce" comme la "prétendue passivité" dans le suivi de navigabilité imputée à M. Perrier, terme qu’il a qualifié de "très insultant".
"L’avion parfait n’existe pas", a souligné Me Buffat. "Un avion est une oeuvre humaine et on ne pourra jamais garantir qu’il ne se crashe pas", a-t-il asséné.
Henri Perrier est le seul des trois prévenus français, tous anciens cadres de l’aéronautique, dont le parquet a requis la condamnation. Les plaidoiries de la défense se poursuivent jeudi avec les avocats de l’ingénieur en chef Jacques Hérubel et les conseils de deux employés américains de Continental Airlines.
Me Olivier Metzner, qui défend la compagnie américaine, s’exprimera vendredi, dernier jour du procès.