Depuis trois semaines, le 101 ème département français est le théâtre d’un mouvement social de grande ampleur contre la vie chère. Hier, place de la République, un manifestant de 39 ans est décédé lors d’échauffourées, officiellement d’un malaise cardiaque. Suite à cet événement tragique, le président PS du Conseil Général de Mayotte, Daniel Zaïdani, estime que l’île a besoin d’avoir "un nouvel interlocuteur", dénonçant "les mesurettes" annoncées par la ministre. Il fait également état des derniers heurts de la nuit dernière dans lesquels un homme a eu l’oreille arrachée.
Quelle ambiance règne à Mayotte ce jeudi ?
"L’île est dans une très grande émotion, la marche blanche de ce matin a réuni les Mahorais de toute part vêtus des couleurs du village d’où le manifestant était originaire. C’était une marche très digne, très solennelle. Cette marche s’est très bien passée. Cela prouve que si les Mahorais ne se sentent pas menacés, tout se passe très bien. "
La population se sent menacée actuellement ?
"Vous savez lorsque vous voyez que les gens descendent dans la rue pour lutter contre la vie chère et qu’ils attendent des réponses claires et que les seuls signaux qui lui sont envoyés sont l’augmentation des forces de l’ordre sur le territoire, que les gendarmes mobiles sont passés de 80 à 400 en trois semaines. Je crois quand même que c’était pas la réponse qui était attendue par la population et cette présence inhabituelle crée forcément des tensions plus importantes et au vue de tout ce qui s’est passé c’est justifié. A la Réunion, le petit Nassuir qui a perdu un oeil est toujours hospitalisé, hier il y a eu un décès et plus de 5 personnes ont été blessées dans la journée d’hier. Cette nuit, un jeune homme a perdu une oreille. Il commence à y avoir une accumulation d’événements qui crée une défiance importante vis à vis des gendarmes. "
Peut-on envisager une prochaine sortie de crise ?
"Pour être tout à fait honnête, je pense que nous sommes sortis du cadre des négociations et qu’il sera très difficile de réunir autour d’une table les différents acteurs. Je crois que compte tenu le décès d’hier qui s’est passé dans des conditions dramatiques, il est important que nous puissions avoir à Mayotte un interlocuteur crédible et audible ce qui n’est pas le cas pour le moment. "
Selon vous, la ministre Marie-Luce Penchard doit-elle venir à Mayotte ?
"Je pense que la population n’a pas besoin de discours ou de promesses, mais de faits et le premier pas serait d’avoir un bon interlocuteur sur place. Il faudrait de vraies mesures et non pas des mesurettes comme nous avons eu la dernière fois. Si elle revient pour nous préciser les mêmes choses, cela ne sert à rien. Suite aux derniers événements, je pense qu’il nous faut un nouvel interlocuteur."
Les négociations pourraient-elles reprendre prochainement ?
"Concrètement aujourd’hui, mes pensées vont à la famille du jeune Ali El Anziz. Une autopsie devrait se dérouler ce jeudi. L’enterrement aura probablement lieu demain. Les cinq prochains jours seraient sûrement consacrés au deuil, mais je ne vois comment dans ce contexte les partenaires pourraient se retrouver autour d’une table. Le plus simple à ce stade serait qu’on est des réponses claires de la part du gouvernement. J’en ai appelé au président de la République il y a une dizaine de jours car c’est lui le garant du pacte social. Jusqu’à présent, les seules personnes qui ne se sont pas exprimées sont le président et le premier ministre."