Si les récents rapports sur la situation des femmes dans le monde arabe sont alarmants, elles sont majoritaires dans les universités, mais perdent des places sur le marché du travail.
Du Caire à Beyrouth, en passant par Amman, force est de constater que les universités du monde arabe se féminisent, remarque le site slate.fr. Le phénomène s’observe depuis les années 2000, sauf dans des pays comme le Yémen ou l’Irak.
Dima Dabbous, directrice de l’Institut d’études des femmes dans le monde arabe à l’université américaine de Beyrouth, précise que « de nombreux Etats de la région ont développé des programmes favorisant la scolarisation des filles, Des pays conservateurs comme le Koweït ou le Qatar ont été à la pointe de ces politiques. Mais leur volonté n’était pas forcément de voir les jeunes filles investir le marché du travail ou accéder à des postes de responsabilité. Mais plutôt d’avoir des mères et des femmes avec des têtes bien faites. »
L’université est aujourd’hui associée à un espace de liberté, au-delà des raisons qui ont poussé les gouvernements à investir dans la scolarisation des filles. Les rapports hommes-femmes y sont souvent plus décomplexés. Ainsi, à l’université du Caire, une poignée d’étudiants fête l’anniversaire d’une camarade sous un chapiteau en bois. D’autres flânent dans les allées d’un stand de vêtements et bijoux ou encore improviser un déjeuner sur l’herbe. Plus la société est conservatrice, plus le pouvoir subversif de l’université grandit.
L’entrée massive des femmes à l’université s’inscrit dans la continuité de campagnes de scolarisation menées ces dernières décennies. En 2007/2008, 743 688 filles étaient inscrites au premier cycle de l’université, soit 53% des étudiants. La même année, 127 179 étaient diplômées du premier cycle, soit 53% également.
A la fin des années 1980, pourtant, encore la moitié des femmes en Egypte âgées de 15 ans à 34 ans ne savait ni lire, ni écrire. Une proportion nettement supérieure aux hommes, dont le nombre d’illettrés plafonnait à 27%. Comme l’explique l’économiste Mona Amer, « les femmes sont celles qui ont le plus profité des avancées éducatives, ce qui a de facto réduit les écarts de scolarité entre les sexes. En ville, le niveau d’éducation des deux sexes est resté très proche. A la campagne, au contraire, les inégalités persistent ».
Paradoxalement, les femmes perdent des places sur le marché du travail, si elles en gagnent des places sur les bancs des universités, elles en perdent paradoxalement sur le marché du travail. En Egypte, l’activité féminine ne cesse de reculer depuis les années 1990.
Si la promotion du travail des femmes est inscrite dans de nombreuses constitutions, les lois restent encore souvent à la traîne. Au terme de plusieurs années de lutte, les libanaises ont arraché en 2014 le droit à 70 jours de congé maternité, au lieu de 49 par le passé (en France, il est au minimum de 16 semaines, soit 112 jours).
Mais selon Dima Dabbous, de l’université américaine de Beyrouth, la bataille est loin d’être terminée : « Les discriminations dont les femmes sont victimes sur le marché du travail ne se réduisent pas au congé maternité. Lorsque nous passons un entretien, l’employeur demande si nous sommes mariées ou si nous prévoyons de faire des enfants dans les mois à venir. »