La Cour suprême des Etats-Unis a mis fin lundi à l’une des pratiques les plus contestées du système juridique américain qu’aucun autre pays du monde n’applique : la prison à vie sans possibilité de libération conditionnelle pour les mineurs qui n’ont pas commis de meurtre.
WASHINGTON (AFP) - La Cour suprême des Etats-Unis a mis fin lundi à l’une des pratiques les plus contestées du système juridique américain qu’aucun autre pays du monde n’applique : la prison à vie sans possibilité de libération conditionnelle pour les mineurs qui n’ont pas commis de meurtre.
Cette décision va permettre à quelque 129 détenus dans les prisons américaines de voir leur peine de prison révisée par un tribunal. Parmi ces 129 jeunes condamnés à des peines de perpétuité réelle, l’écrasante majorité sont des noirs.
Qualifiée d’"historique" par l’organisme "The equal justice initiative" dont les avocats bénévoles défendaient un des deux condamnés qui avaient porté la question devant la plus haute juridiction des Etats-Unis, l’interdiction s’inscrit dans la veine de l’abolition de la peine de mort pour les mineurs prononcée par la même Cour en 2005.
"La condamnation à la perpétuité sans possibilité de libération conditionnelle a certaines caractéristiques en commun avec la peine capitale et ne ressemble à aucune autre condamnation", note la Cour dans sa décision prise à six voix contre trois. Elle "confisque la vie du condamné de manière irrévocable", ajoute-t-elle.
Lorsque la perpétuité réelle est prononcée, "un mineur va en moyenne passer une plus grande partie de sa vie en prison qu’un adulte", poursuit la Cour, estimant qu’un adolescent de 16 ans et un adulte de 75 ans "reçoivent la même condamnation sur le papier seulement".
Citant les analyses des nombreux neurologues qui ont soutenu dans des argumentaires écrits la demande des deux jeunes condamnés, elle reconnaît qu’"en comparaison avec un adulte meurtrier, un mineur qui n’a pas tué ou pas tenté de tuer, a une responsabilité morale deux fois moins élevée".
De plus, "les mineurs ont davantage de capacités de transformation que les adultes" et "en excluant tout retour dans la société, l’Etat prononce un jugement irrévocable sur la valeur d’une personne et sa place dans la société".
La Cour souligne enfin le petit nombre de condamnés concernés dans tous les Etats-Unis, même si théoriquement 38 Etats américains et l’Etat fédéral autorisaient la perpétuité réelle pour les mineurs dans les cas n’impliquant pas de meurtre.
"Il s’agit d’une victoire importante non seulement pour les enfants qui ont été condamnés à mourir en prison mais aussi pour ceux qui ont besoin de davantage de protections et de reconnaissance dans le système juridique", a estimé dans un communiqué Bryan Stevenson, directeur de The equal justice initiative.
Se félicitant de la décision, Human Rights Watch (HRW) a rappelé de son côté que "le droit international exclut de telles condamnations pour les mineurs et cette interdiction est appliquée partout hors des Etats-Unis".
L’organisation de défense des droits de l’homme explique dans un communiqué qu’"aujourd’hui, 2.574 personnes purgent une peine de prison à vie sans possibilité de sortie aux Etats-Unis. A la connaissance de HRW, personne ne purge une telle peine nulle part ailleurs dans le Monde".
Les condamnations à la perpétuité réelle sont récentes aux Etats-Unis et se sont généralisées comme une alternative à la peine de mort. Mais cette mesure s’est ajoutée à l’augmentation du renvois des mineurs devant des tribunaux pour adultes.
Chaque année quelque 200.000 jeunes, y compris des enfants de 8 ans, encourent ainsi les mêmes peines que les adultes et purgent celles-ci dans des prisons de droit commun.
