Mohamed Rochdi, était l’invité de l’émission Face à L’info ce dimanche. Sur le plateau d’Antenne Réunion, le président de l’université de la Réunion a commenté les faits d’actualité avant de détailler le bilan des trois premières années de son mandat.
Après les résultats du bac le 5 juillet prochain, les nouveaux bacheliers devront s’inscrire à l’université pour l’année 2011-2012. L’université de la Réunion accueille chaque année près de 12 000 étudiants. La tendance actuelle des inscriptions est-elle à la hausse ou à la baisse ?
Mohamed Rochdi : Le nombre d’inscriptions a connu une progression de +3% entre 2009-2010 et l’année 2010-2011. Cette évolution s’explique par l’augmentation des inscriptions post-bac et par l’application de la réforme du baccalauréat professionnel.
Il fut un temps, les étudiants réunionnais préfèraient poursuivre leurs études en métropole. Est-ce toujours le cas ?
Mohamed Rochdi : A mon sens, la tendance est en train de s’inverser. L’académie de la Réunion fournit chaque année près de 8000 bacheliers. La plupart du temps, beaucoup d’entre eux se tournent vers les écoles préparatoires , les bts ou tentent la mobilité. Mais les comportements changent : l’an dernier nous avons accueilli environ 2700 bacheliers et ces chiffres devraient augmenter je pense parce que l’offre de formation à l’académie de la Réunion est de plus en plus variée et de plus en plus professionnalisante.
Faisons le point à présent sur les filières. Certaines d’entre elles comme l’histoire-géographie et les Lettres au campus du Tampon seront délocalisées à la rentrée prochaine au campus du Moufia. Une décision qui provoque le mécontentement des étudiants sudistes. Que leurs répondez-vous ?
Mohamed Rochdi : Je leur réponds que cette mesure s’inscrit dans une stratégie globale de l’université de la Réunion. Je ne raisonne pas filière par filière. J’ai une ambition de visibilité, de rayonnement, de création de pôles forts à l’université de la Réunion. Je souhaite installer sur chaque campus des formations complètes, de la première année jusqu’à la dernière année, jusqu’au Master, jusqu’au Doctorat.
Je souhaite aussi installer sur chaque site des équipes de recherche, des laboratoires sédentarisés, afin qu’il n’y ai aucun site qui soit l’annexe ou le doublon d’un autre. Il y a donc toute une réorganisation des formations, et notamment le regroupement des filières histoire, géographie, lettres modernes dans le Nord, du fait d’une baisse d’effectifs très importante. L’objectif est de relocaliser dans le Sud d’autres filières, et d’autres unités de recherche dans les années à venir.
Cela représente un effectif de 300 étudiants dans les filières histoire, géographie et lettres modernes qui vont être regroupés dans le Nord. je précise juste que ces filières d’étude étaient présentes à la fois sur le campus du Moufia et sur le site du Tampon. Il ne s’agit en aucun cas de suppressions comme j’ai entendu dire ça et là. Il s’agit d’une regroupement sur le site Nord car nous avons la capacité de les accueillir. Et il est aussi question d’installer d’autres formations sur le site du Tampon pour lui donner sa propre identité et son ancrage territorial au sein de l’université de la Réunion.
En 2010, l’université ouvrait la 2e année de médecine à la faculté de santé. Depuis peu, les centres hospitaliers du sud et du nord ont annoncé leur fusion. A quant, l’ouverture d’une filière médecine complète à la Réunion ?
Mohamed Rochdi : Nous avons obtenu depuis l’année dernière l’ouverture de la deuxième année, après un bon fonctionnement de la première année, qu’on appelait autrefois PCEM 1 et désormais PACES (Première Année Commune aux Etudes de Santé) qui existe à la Réunion depuis 1976. C’est un combat qui n’est pas celui de l’université uniquement. C’est aussi celui du centre hospitalier régional, de l’université, des élus de tous bords politiques qui ont oeuvré pour qu’un CHU soit créé à la Réunion. Pour rappel, nous sommes la seule région de France à ne pas disposer d’un Centre Hospitalier Universitaire. Donc, nous avons une deuxième année et nous allons avoir en 2012-2013 l’ouverture de la 3ème année. Mon ambition : proposer au bout de quatre à cinq années la totalité du cursus de médecine à la Réunion.
Vous évoquez la création d’un Centre Hospitalier Universitaire. Ce centre est prévu pour quand ? Quelles seront ses missions ?
Mohamed Rochdi : Un CHU c’est un peu comme un mariage. C’est une convention entre un centre hospitalier régional, établissement unique de santé, de soins et une Université à travers ce qu’on appelle en métropole une faculté de médecine. Le calendrier voulait qu’il y ait une fusion entre les hôpitaux nord et sud pour créer cet établissement unique, le CHR. Cette fusion, ayant été faite très récemment et l’UFR santé ayant été créée à la Réunion depuis mai 2010, désormais nous allons nous mettre en ordre de marche. Sur les quelques mois à venir, nous travaillerons sur cette convention hospitalo-universitaire visant une structuration des soins par le CHR, sur la question de la recherche et sur une offre de soins paramédicale pour créer ce CHU au 1er janvier 2012.
Le CHU sera bipolaire parce que la recherche, les formations paramédicales et les praticiens hospitaliers seront déployés dans le Nord et le Sud de l’île. Ce Centre Hospitalier Universitaire fonctionnera pour la Réunion mais aussi pour Mayotte. Il rayonnera dans toute la zone Océan Indien.
Professeur des universités en mathématiques appliqués, vous avez été élu Président de l’Université de la Réunion le 2 juillet 2008. Votre mandat s’achève l’an pochain. Quel bilan faites-vous de ces 3 ans passées à la tête de l’université ?
Mohamed Rochdi : Ces trois années ont été très chargées, avec une conjoncture particulière. J’ai entamé mon mandat à un moment où la loi relative aux libertés, responsabilités des universités (loi RSU) a été mise en place, avec une série de réformes (passage aux compétences élargies, budget global, etc). Nous avons mis en place beaucoup de choses car l’université de la Réunion avait besoin de se moderniser pour assurer sa visibilité et son rayonnement sur le plan national notamment.
Le bilan est très satisfaisant, notamment en ce qui concerne la structuration de la recherche, avec des axes stratégiques de développement de la recherche. Au niveau de l’offre de formation, des formations d’excellence ont été créées. Des écoles d’ingénieurs aussi. On compte aujourd’hui plus de formations professionnelles, plus d’intéraction avec le monde de l’entreprise, en termes de stages et d’intervention dans nos formations, en termes de réussite des étudiants. Le plan "réussir en licence", le tutorat, le parrainage, les dispositifs d’aide à la réussite, d’allégement de groupes, création d’un institut de l’illettrisme, d’un pôle de l’entreprenariat : tout un dispositif a été mis en oeuvre.
La nomination de Christine Lagarde à la tête du FMI a engendré un remaniement ministériel. François Baroin a pris les rênes du ministère de l’économie. C’est Valérie Pécresse, ancienne ministre de l’enseignement supérieur et de la recherche, qui a hérité du portefeuille du budget. Votre opinion sur cette nomination ?
Mohamed Rochdi : Le Gouvernement a voté la réforme de la LRU, conduite par Valérie Pécresse. Cette loi a clairement modifié le paysage de l’enseignement supérieur et de la recherche nationale, en instaurant une compétition entre les universités et en leur donnant plus de prérogatives. Cela est une bonne chose. Cependant, cette question de la compétition, lorsque l’on a des universités qui ne jouent pas dans la même cour, qui ne sont pas dotées de la même manière, qui sont dans des bassins industriels très compétitifs est difficile à appréhender. Je prends l’exemple de la Réunion, où l’économie est frappée par la crise. Ce facteur n’est absolument pas pris en compte pour notre développement. Sur ce point, je reste sur ma fin. Il y a mieux à faire.
En métropole, les fraudes sur les sujets du baccalauréat ont défrayé la chronique la semaine dernière. La 1ère fuite a concerné l’épreuve de mathématiques où un exercice a été communiqué par texto à certains candidats. Pensez-vous qu’il faille revoir la manière de passer les épreuves d’examens ?
Mohamed Rochdi : Je rappelle d’abord que la Réunion n’est pas touchée et c’est une bonne chose. Moi je suis pour une organisation académique des examens du baccalauréat pour qu’on ne se retrouve pas dans un dispositif qui risque d’ébranler toute l’épreuve à l’échelle nationale.
Retrouvez dans la vidéo jointe, l’intégralité de l’intervention de Mohamed Roshdi sur le plateau d’ Antenne Réunion, ainsi que les questions décalées. Le Président de l’Université de la Réunion était le dernier invité de l’émission Face à l’info pour cette saison. Rendez-vous à la rentrée pour de nouveaux entretiens.