GERRI est le projet phare selon le directeur régional de l’Office National des Forêts « qui va souder la société réunionnaise autour d’une ambition commune : le développement durable via les énergies propres ».
La Réunion figure parmi les îles les mieux préservées du monde, avec près du tiers de sa surface occupée par les milieux naturels d’origine. Elle abrite encore de très nombreuses espèces endémiques même si la pharmacopée traditionnelle créole pose quelques problèmes sérieux. Les forêts réunionnaises s’étagent depuis le littoral jusqu’à plus de 3.000 m d’altitude. L’ONF est très présent. Le domaine qu’il gère couvre près de 40% de la superficie de l’île et les missions qui y sont menées sont nombreuses.
Ce qui fait de l’ONF un acteur du développement local. Répondre à la fois aux besoins environnementaux, au tourisme de nature et aux attentes de cohésion sociale par l’emploi et la formation au sein de la filière bois sont les enjeux de l’action menée par l’ONF, en étroite concertation avec les collectivités locales. Son directeur régional, Hervé Houin prévoit dans les dix ans à venir : « une réelle prise de conscience générale de la fragilité des milieux naturels et de la nécessité de les protéger ». Dans l’interview qu’il accorde à linfo.re, il insiste sur la cohérence stratégique du projet Gerri et la création d’emplois sur de nouveaux créneaux de l’économie verte.
Quel est l’impact écologique de l’activité humaine sur la forêt réunionnaise ?
L’impact négatif principal relève de la problématique des déchets inertes ou organiques abandonnés par les visiteurs en forêt. Le public doit s’astreindre à ramener chez lui tous les emballages et les restes de nourriture à l’issue des pique-niques dominicaux ou des ballades en forêt. Les personnes ne sont pas forcément conscientes que tout abandon de nourriture est propice à la multiplication des rats ; ces mêmes rats sont porteurs de maladie, ou sont des prédateurs de la faune endémique de l’île (c’est en particulier le cas pour le Tuit-Tuit à La Roche Ecrite).
La Réunion a-t-elle perdu des espèces endémiques ou autres à cause de l’activité humaine ?
La liste des espèces animales disparues du fait de l’activité humaine (chasse, développement du tourisme et de l’utilisation des terres, facteur de dérangement de certaines espèces) est longue et le Muséum d’Histoire Naturelle à Saint-Denis les répertorie.
La prédation humaine continue à mettre en danger certaines espèces, animales ou végétales. Par exemple, la pharmacopée traditionnelle créole s’appuie sur des essences végétales souvent rares et protégées. Les prélèvements d’écorces, de fleurs, de racines ... mettent en péril ces espèces du fait d’une cueillette non organisée, trop importante et trop concentrée.
Quels dangers pèsent sur la faune et la flore dans notre île ?
Au-delà du braconnage ci-dessus évoqué, les trois principaux dangers qui pèsent sur la biodiversité de La Réunion sont :
- les espèces exotiques invasives, qui supplantent les espèces locales moins vivaces et moins opportunistes car s’étant développées en vase clos
- les incendies à la saison sèche, sur les massifs de l’ouest et du sud-ouest
- le changement climatique, qui risque de provoquer un déplacement altitudinal des espèces, avec une perte de biodiversité.
En quoi les agents de l’ONF travaillent-ils dans le sens de la préservation de l’environnement ?
Toute l’activité dans les forêts publiques de La Réunion est organisée autour d’un cadre réglementaire qui sont les Orientations Régionales Forestières. Dans ce document, validé par les Collectivités territoriales et par les services de l’Etat, il est clairement inscrit que l’action des forestiers de l’ONF vise à préserver les milieux naturels exceptionnels de l’île, pour les ouvrir au grand public.
Dans ce cadre, Le Conseil Général, propriétaire de 95% des forêts publiques, et l’Europe, votent des budgets annuels conséquents en vue de restaurer les milieux naturels dégradés (lutte contre les pestes végétales, plantation d’essences endémiques) et de concentrer l’accueil du public sur des sites et des sentiers identifiés et entretenus, préservant ainsi les secteurs à plus fortes valeur patrimoniale.
Comment voyez-vous La Réunion dans dix ans ?
Grâce aux efforts conjugués des collectivités territoriales et de l’éducation nationale, je prévois une réelle prise de conscience générale de la fragilité des milieux naturels et de la nécessité de les protéger. Ainsi, les points noirs environnementaux, que sont les décharges sauvages, la dispersion des déchets dans la nature, le braconnage des espèces endémiques,... régresseront, au bénéfice d’un environnement restauré et apte à accueillir une population en expansion. Cette nature protégée sera également à même de recevoir les visiteurs étrangers dans un écrin de nature préservée. Ce développement du tourisme "vert" sera le gage de nouveaux emplois dont La Réunion a grandement besoin.
GERRI est-il une réponse acceptable à vos yeux ?
Parallèlement à la politique volontariste menée par les collectivités départementale et régionale en matière de préservation des ressources naturelles terrestres et marines, GERRI est le projet phare qui va souder la société réunionnaise autour d’une ambition commune : le développement durable via les énergies propres, les déplacements en transport en commun, la création d’emplois sur de nouveaux créneaux de l’économie "verte". Tout se tient, la cohérence stratégique de toutes ces politiques est évidente.