Le parquet de Bordeaux a ouvert une "enquête préliminaire" suite à la diffusion mardi sur France 2 d’un reportage consacré à un groupuscule d’extrême droite et aux milieux catholiques traditionalistes dans lequel des propos racistes et antisémites ont été tenus.
BORDEAUX (AFP) - La diffusion mardi par France 2 d’un reportage en caméra cachée sur un groupuscule d’extrême droite et le milieu catholique traditionaliste bordelais dans lequel sont tenus des propos racistes et antisémites a suscité l’indignation, poussant la justice à ouvrir une enquête.
Après les réactions politiques, religieuses et associatives, qui se sont succédées tout au long de le semaine, le parquet de Bordeaux a annoncé avoir ouvert jeudi "une enquête préliminaire" suite à la diffusion "dans le cadre de l’émission +Les Infiltrés+ du reportage intitulé +A l’extrême droite du père+, révélateur d’agissements susceptibles d’incriminations pénales".
Ce reportage, produit par l’agence Capa, s’intéresse à un groupuscule d’extrême droite, Dies Irae, dirigé par un ancien militant du Front national, et fait un lien avec le milieu catholique intégriste, représenté à Bordeaux par l’Institut du Bon pasteur, dirigé par l’abbé Philippe Laguérie, ancien curé de l’église traditionaliste parisienne Saint-Nicolas du Chardonnet.
L’Institut du Bon pasteur dispose d’un lieu de culte - l’église Saint Eloi, située en centre-ville - et un de ses proches gère l’école privée hors-contrat Saint-Projet, où le journaliste a été témoin de chants et discours racistes et antisémites proférés tant par des élèves que par certains parents ou enseignants.
L’école, ouverte depuis environ 5 ans et qui accueille 85 élèves du primaire au collège, a été contrôlée courant mars par l’inspection d’académie, alertée par les rumeurs entourant la prochaine diffusion du reportage.
Ce contrôle a mis en lumière "un certain nombre d’insuffisances graves", notamment concernant les enseignements d’histoire et de sciences, a indiqué à l’AFP le recteur d’académie, Jean-Louis Nembrini, qui, "en tant que citoyen", s’est déclaré "horrifié" par les propos entendu dans le reportage.
Dies Irae compterait environ 150 membres, plutôt jeunes, qui arborent des insignes franquistes et tiennent devant le journaliste infiltré des propos violemment anti-juifs, anti-arabes et anti-noirs.
Au fil des conversations, les militants disent aussi leur attachement à l’église traditionnelle, celle d’avant le concile Vatican II, représentée à Bordeaux par l’abbé Laguérie.
Apparaissant - le visage flouté - dans une séquence du film, l’abbé Laguérie, ancien proche de monseigneur Marcel Lefebvre, a dénoncé auprès de l’AFP un "amalgame odieux" entre "des fous furieux racistes et antisémites" qu’il "ne connaît pas" et sa paroisse.
Seulement admet-il connaître "à titre personnel" Fabrice Sorlin, le fondateur de Dies Irae, candidat FN aux législatives de 2007 en Gironde mais exclu l’année suivante, qu’il a "marié dans le Berry".
Sur un blog, Dies Irae a estimé que "le but" de ce reportage était "de salir encore une fois l’église catholique tout en stigmatisant la mouvance traditionnelle".
En début de semaine, en plein conseil municipal, l’opposition socialiste avait interpellé le maire UMP de Bordeaux Alain Juppé, qui avait attribué en 2002 aux ouailles de l’abbé Laguérie la jouissance de l’église Saint-Eloi, une délibération ensuite cassée par des décisions de justice jamais appliquées.
Mercredi, M. Juppé a demandé, par courrier, au préfet et au recteur d’académie des "poursuites judiciaires (...) une fois les faits avérés". Sollicités vendredi par l’AFP, ses services se sont toutefois refusés à de plus amples commentaires.