La guerre de la légine : un conflit qui oppose d’un côté les armements historiques de La Réunion et un nouveau venu qui souhaite intégrer le marché.
La légine australe est un poisson qui porte plusieurs noms : bar chilien, Toothfish à cause de ses grandes dents... Son nom scientifique est Dissostichus eleginoides. C’est une espèce qui vit dans les profondeurs pouvant dépasser les 2 mètres et peser plus de 80 kilos.
C’est l’un des poissons les plus chers du monde ! Son prix élevé lui vaut le surnom "d’or blanc" : entre 24 et 25 euros le kilo à la sortie du bateau, et beaucoup plus dans l’assiette. Le marché représente 120 millions d’euros de chiffre d’affaires chaque année. Sa chair blanche et fondante est très appréciée. C’est LE poisson à la mode pour les plus fins gourmets, sur les marchés asiatique et américains notamment.
La légine est pêchée dans les Terres australes et antarctiques françaises (Taaf), 3 000 kilomètres de chez nous du côté des îles Kerguelen et Crozet.
Deux Zones économiques exclusives (Zee), où seule la France peut pêcher. Il n’y a qu’une seule méthode autorisée, la palangre de fond, plus respectueuse des fonds marins.
Il y a des autorisations particulières, n’importe qui ne peut pas pêcher la légine.
La pêche est soumise à des quotas établis chaque année par les Taaf pour préserver les ressources, le Total admissible de captures (Tac). Pour 2017-2018, 6 150 tonnes peuvent être pêchés. Plusieurs armements sont autorisés. Ils sont réunis au sein du Syndicat des armements réunionnais de palangriers congélateurs (Sarpc). Et il y a un nouvel arrivant : Réunion pêche australe (RPA), qui vient d’obtenir un quota de 100 tonnes.
Les armateurs historiques évoquent un marché saturé, dans lequel ils ont beaucoup investi, rappellent que les quotas sont toujours intégralement pêchés. Ils reprochent à RPA de ne pas être en règle avec la loi. Son navire bat pavillon australien et non français.
De son côté, Réunion pêche australe met en avant sa volonté de s’approprier les bénéfices générés par la légine pour soutenir la petite pêche locale. Et affirme qu’il pourra bel et bien démarrer sa campagne, au mois de décembre.
Le Syndicat des armements a en tout cas fait une synthèse de l’impact de l’entrée d’un nouvel armateur pour faire du lobbying auprès des autorités. 541 emplois directs indirects et induits seraient perdus.
Le plan Légine pour tous qui prévoyait des aides pour la pêche artisanale réunionnaise est suspendu. Cela représenterait 154 euros de perte par pêcheur.
Sans compter une perte de 10 millions d’euros de chiffre d’affaires si le label MSC, qui atteste de la gestion durable de la ressource venait à être perdu.
Toujours la guerre sur le plan juridique, on imagine toujours des opérations de lobbying de part et d’autre. Et puis une mission interministérielle. Lancée prochainement par le Ministère des Outre-mer et celui de l’Agriculture et de l’Alimentation. L’idée ce sera d’essayer de mettre tout le monde d’accord. Concilier stabilité, concurrence, compétitivité et retombées économiques pour l’emploi et le secteur de la pêche à La Réunion.