L’Eglise catholique cubaine, qui sert de médiatrice à des dissidents et notamment à un gréviste de la faim, a laissé jeudi prudemment entrevoir une prochaine libération de prisonniers politiques au lendemain d’une rencontre jugée "positive" avec le président Raul Castro.
LA HAVANE (AFP) - L’Eglise catholique cubaine, qui sert de médiatrice à des dissidents et notamment à un gréviste de la faim, a laissé jeudi prudemment entrevoir une prochaine libération de prisonniers politiques au lendemain d’une rencontre jugée "positive" avec le président Raul Castro.
"Nous avons discuté de ce sujet et je crois que de la part des deux parties il y a une disposition, un souhait que cela se règle et nous espérons que cela soit ainsi", a déclaré à l’AFP Mgr Dionisio Garcia, archevêque de Santiago de Cuba (est) et président de la Conférence des évêques de Cuba qui participait à la rencontre avec le cardinal Jaime Ortega, archevêque de La Havane.
Interrogé sur une éventuelle libération de prisonniers politiques, au nombre de 200 selon la dissidence, Mgr Garcia a affirmé "croire que cela sera un processus et qu’un processus doit commencer par des petits pas et ces pas se feront".
"Nous espérons" une libération de prisonniers, a quant à lui déclaré, prudent, le cardinal Ortega, lors d’une conférence de presse. "Je ne peux pas sauter aux conclusions et donner de dates concrètes (...) mais le sujet est traité de façon sérieuse", a-t-il dit.
Les médias cubains se sont pour leur part contenté de rapporter l’entretien sur "la situation nationale et internationale actuelle" entre les deux prélats, Raul Castro et Caridad Diego, responsable des affaires religieuses du Parti communiste.
Cette rencontre est intervenue trois semaines après une médiation inédite du cardinal Ortega ayant permis à une dizaine de "Dames en blanc", mères, filles ou épouses de prisonniers politiques, de reprendre le dimanche après la messe leur courte marche de protestation silencieuse à La Havane, sans qu’il y ait de contre-manifestations organisées par le pouvoir.
En attendant une visite de Mgr Dominique Mamberti, secrétaire du Saint-Siège pour les relations avec les Etats, prévue du 16 au 20 juin, les prélats tentent d’obtenir la fin du jeûne de protestation du dissident Guillermo Farinas.
Le cyberjournaliste de 48 ans est hospitalisé depuis plus de deux mois à Santa Clara (270 km à l’est de La Havane) après avoir entamé une grève de la faim au lendemain de la mort controversée le 23 février du prisonnier Orlando Zapata, 42 ans, qui refusait de s’alimenter depuis deux mois et demi.
Guillermo Farinas, qui veut la libération de 26 détenus malades, a déclaré par téléphone à l’AFP avoir reçu à deux reprises ce mois-ci la visite de "hauts responsables de l’Eglise catholique" qui se sont proposés comme médiateurs.
"Les autorités n’ont pas intérêt à ce que des détenus malades meurent en prison", a-t-il dit alors que l’état de santé d’Ariel Sigler, hospitalisé depuis août 2009, est jugé préoccupant.
Raul Castro avait qualifié début avril de "chantage inacceptable" la grève de Farinas et accusé Washington et Bruxelles, qui réclament la libération de prisonniers politiques, de le soutenir.
Pour La Havane, les opposants cubains sont des "mercenaires" à la solde des Etats-Unis qui imposent depuis 48 ans un embargo contre l’île communiste.
La dernière libération d’un prisonnier politique remonte à fin 2009, juste après une visite du chef de la diplomatie espagnole, Miguel Angel Moratinos.
En 1998, pour la première et seule visite d’un pape, Jean Paul II, à Cuba, plus de 300 prisonniers - politiques et de droit commun - avaient été libérés par le président de l’époque, Fidel Castro.
Après une période de tensions à la suite de la Révolution de 1959, l’Eglise catholique, qui se veut neutre, a considérablement "renforcé sa position" au sein de la société cubaine, selon des experts cubains.