Victime de viol, Annifa a dû faire face à son agresseur lors de son procès. Plusieurs années après cet épisode douloureux, la jeune femme a dû revivre ce traumatisme, qui lui a permis malgré tout de tourner la page.
La nouvelle session de la cour d'Assises qui s'ouvre cette semaine examinera plusieurs affaires de viol. L'occasion de se pencher sur ce que vivent les victimes pendant cette période douloureuse. Témoignage d'Aniffa qui a 32 ans. Violée en 1998, elle a dû affronter son bourreau lors d'un procès en octobre 2012. Une terrible épreuve qu'elle a accepté de raconter.
La jeune femme se rappelle de cet épisode éprouvant. "Il a fallu rouvrir toutes les vannes et repenser à toute cette histoire. C'était difficile. j'avais l'impression que tous les sentiments que j'avais ressentis en 1998, c'était exactement pareil. La honte, la peur, la culpabilité, et je me suis sentie toute petite. J'appelais tout le monde au secours, parce que je me sentais vulnérable" explique Aniffa.
Mais Annifa a dû affronter cet homme qui l'a fait tant souffrir. "Quand je l'ai vu, j'ai paniqué, j'avais peur parce que ça a réveillé plein de choses", se souvient-elle. "Entre temps je pense que je me suis reconstruite et j'avais des sentiments partagés" au procès. "Mais quand j'ai rencontré les autres victimes ce jour-là, ça a fait notre force, de se dire qu'on était pas toute seule".
La jeune femme ajoute que "ce qui m'a traumatisé dans ce tribunal, c'est qu'il a fallu se mettre à nu...Entrer dans les détails pour que les gens comprennent et encore aujourd'hui, certains ne comprennent toujours pas. Je me suis dit que ça ne va jamais s'arrêter et que je serais toujours une victime. Mais il ne faut pas prendre personnellement ce que l'avocat de la défense va mettre en oeuvre, parce que là, ça fait mal".
Mais la jeune femme l'affirme, ce procès a été un épisode crucial dans sa vie qui lui a permis de tourner une page douloureuse de son histoire personnelle. "C'est une étape qui répare et qui peut faire mal. Mais là, la société entend et reconnaît que c'est un crime".
Victimologue au CHU de Bellepierre, Pascaline Roussel rappelle effectivement que "le procès pour une victime de viol est toujours un moment difficile puisque c'est devoir se remettre à nouveau dans les faits et se replonger dans la souffrance. C'est comme une nouvelle confrontation au traumatisme".
Pendant un procès pour viol, la spécialiste affirme que ce qui est important pour la victime, "c'est que l'accusé reconnaisse les faits". Les excuses peuvent également être importantes, précise-t-elle, mais la reconnaissance des faits reste primordiale.
Elle ajoute qu'il n'y a pas de comportement type pour les victimes et que chacune réagit différemment. "Certains auront besoin de passer par le procès et la confrontation avec son agresseur pour pouvoir continuer à se reconstruire. Mais pour d'autres personnes, ce sera une épreuve supplémentaire qui, au contraire vont faire qu'elles vont rester dans leur souffrance et à passer au delà".
Chaque année en France, ce sont 75 000 femmes, en moyenne qui seraient victimes de viol, soit un viol toutes les 8 minutes. Seules 10% portent plainte et 2% des violeurs sont condamnés. 80% des viols sont commis par des proches. Des chiffres accablants qui rappellent que le viol est encore trop souvent une arme qui brise la vie de milliers de personnes.