Auteur de quatre livres sur le passage du nuage radioactif de Tchernobyl et ses conséquences en France, Jean-Michel Jacquemin Raffestin se dit "non surpris, mais scandalisé" par le non lieu prononcé par la cour d’appel de Paris aujourd’hui dans l’enquête sur les effets sanitaires du nuage de Tchernobyl en France. Cependant d’après lui, cette décision de justice ne marque pas un point final à cette affaire.
Après 10 ans d’enquête, la cour d’appel de Paris a décidé de prononcer un non-lieu ce matin dans l’affaire de l’impact du nuage de Tchernobyl en France. Le Ministère Public a estimé que les analyses scientifiques ajoutées au dossier s’accordaient à dire que la catastrophe nucléaire de 1986 n’avait pas eu de conséquence sanitaire en France, notamment sur les maladies de la thyroïde. Une aberration selon Jean-Michel Jacquemin Raffestin. Cet ancien directeur financier a écrit quatre livres à succès sur le sujet. Scandalisé par ce non-lieu, il nous a livré ses impressions.
Quelle a été votre première réaction à l’annonce de ce non-lieu ?
Jean-Michel Jacquemin Raffestin : "Honnêtement, je n’ai pas du tout été surpris. Ce qui ne signifie pas que je ne suis pas scandalisé par cette décision. Je me doutais que la cour statuerait de cette façon, lorsque la juge qui était chargée de l’affaire et qui a d’ailleurs fait un travail remarquable, a été dessaisie de l’affaire le 31 mars dernier. Cela fait 13 ans que j’enquête sur ce dossier. L’impact sanitaire du passage du nuage est évident".
Selon le parquet de Paris, les effets sanitaires du passage du nuage radioactif ne sont pas mesurables, que pensez-vous de ces conclusions ?
Jean-Michel Jacquemin Raffestin : "Les deux experts qui ont été désignés par la juge , ont bien confirmé ce que j’avais affirmé dans mon livre il y a déjà deux ans. Ce récent rapport pointait l’augmentation très importante du nombre de troubles thyroïdiens après 1986 en Corse. Les éléments prouvant l’impact du nuage radioactif sur le nombre de cancers de la thyroïde en Corse existent. La France est le pays où les données médicales sont le plus informatisées. En croisant les données contenues dans les trois fichiers existants, on constate l’explosion du nombre de cas de cancers entre avant et après 1986. Dans certains coins de la Corse, l’augmentation est de 117%. Avant le passage du nuage, un seul endocrinologue travaillait sur l’île, aujourd’hui ils sont une dizaine. Toutes les données existent."
Comment expliquez-vous cette décision de la cour d’appel ?
Jean-Michel Jacquemin Raffestin : "Il y a une volonté évidente de ne pas révéler certains chiffres. Le rapport des experts a clairement montré l’évidence...Les investigations ont donc rapidement été stoppées. C’est un sujet extrêmement délicat. Moi-même j’ai subi de nombreuses pressions à chaque sortie d’un livre. La présence des Renseignements Généraux lors de mes conférences, des accidents, des agressions...La juge qui avait commencé à instruire l’enquête a également subi des pressions. Mais cette décision de la cour d’appel ne met pas fin au combat, l’affaire va se poursuivre devant la cour de cassation, puis s’il le faut devant la cour européenne. La combat continue."