« Un profond renouveau de l’Eglise » est indispensable selon le pape Benoit XVI afin d’éviter les scandales pédophiles répétitifs qui minent l’Eglise catholique ces dernières années. Ce message a été adressé à l’endroit des 200 délégués qui participent à un symposium sur ce brulant sujet organisé à Rome et ouvert lundi.
« Soulager les victimes doit être de la plus haute importance pour la communauté chrétienne et doit aller de pair avec un profond renouveau de l’Eglise à tous les niveaux », a réitéré le pape Benoit XVI à l’ouverture d’une rencontre sans précédent sur la pédophilie réunissant à Rome des délégués de 110 conférences épiscopales et supérieurs de 33 ordres religieux. Avant leur déplacement dans la capitale italienne, ces participants étaient appelés à concerter en privée avec les victimes de ces agressions, rapporte Le Point.
Par la voix du cardinal Tarcisio Bertone, secrétaire d’Etat et numéro deux du Vatican, le Saint-Père « exhorte les participants à la conférence à continuer de construire un large éventail de compétences pour promouvoir dans l’Eglise une culture vigoureuse de prévention efficace et de soutien aux victimes ». Placée sous le thème « Vers la guérison et le renouvellement », cette initiative de l’Eglise catholique intervient près de 10 ans après que les scandales pédophiles aient éclaté aux Etats-Unis, en Europe puis en Australie.
Ces assises, dont la plupart se déroulent à huis clos à l’Université grégorienne, entendent assurer la « protection des enfants » mais également des « adultes vulnérables » à ces attaques. Ainsi, une quarantaine de rapporteurs aborderont chacun les multiples facettes du problème, en passant par l’influence de la pornographie sur l’internet à la formation des prêtres. Des évêques « qui ont agi courageusement en défense des victimes » aux Philippines, Etats-Unis, Mexique, Brésil, Allemagne et Afrique du Sud feront également part de leurs témoignages durant 04 jours, selon les organisateurs.
« C’est une responsabilité majeure que de pouvoir regarder cette plaie béante dans l’Eglise, les yeux ouverts », a estimé François-Xavier Dumortier, recteur de cette université, lundi à la Radio Vatican.
A l’ouverture des assises hier, des anciennes victimes ont manifesté contre, jugeant ce colloque « inutile et organisé pour sauver la face de l’Eglise ». « Ils n’invitent pas ceux qui ne sont pas de leur côté », s’est indignée Sue Cox, coordinatrice d’une coalition de victimes en Europe et aux Etats-Unis appelée « Survivors Voice ». Selon elle, « c’est juste du théâtre, cela ne sert à rien ». A la place, cette militante souhaiterait que l’Eglise soit « ouverte à une enquête par une autorité indépendante ».
Pour sa part, Caramella Buona, une association italienne d’aide aux victimes, s’est plainte de ne pas être représentée dans cette rencontre. Quant à Marie Collins, une Irlandaise violée à l’âge de 13 ans par un prêtre dans un hôpital de Dublin et étant la seule victime invitée à participer aux assises, elle a estimé qu’il s’agit d’ « un tournant » positif, un « pas dans la bonne direction ». « Ce symposium semble marquer un changement d’époque, d’attitude de l’Eglise. Un évènement extrêmement important pour chacun, pour l’Eglise, pour les survivants et pour l’avenir », a-t-elle noté hier en ajoutant « j’espère qu’il y aura la reconnaissance que beaucoup de choses ont mal fonctionné dans le passé ».
Cette Irlandaise faisait partie des premières victimes à avoir osé dénoncer les abus perpétrés par les prêtres de son église. Elle regrette que durant toutes ces longues années, « les coupables ont été laissés libres ».
Pour le jésuite et psychothérapeute Hans Zollner, un des organisateurs de ce colloque, l’Eglise est prête à « assumer la responsabilité pour le mal commis ».
A noter que ce symposium sans précédent durera jusqu’à jeudi prochain. Des mesures concrètes seront prises à l’issue des différentes rencontres comme la mise en place d’un centre d’enseignement par internet, financé en grande partie par des institutions catholiques allemandes. Il permettra à tous les religieux du monde entier de se familiariser avec les meilleures pratiques et aura des relais au Ghana, au Kenya, en Argentine, en Equateur, en Inde, en Indonésie, en Allemagne et en Italie.