Le président Nicolas Sarkozy a annoncé dimanche soir à la télévision une dernière série de mesures à vocation économique sans déclarer ouvertement sa candidature à sa réélection. Pour ou contre, l’intervention du chef de l’Etat a fait réagir de nombreuses personnalités tant politiques que syndicales.
Du côté du gouvernement, c’est le satisfecit. Dans un communiqué, le Premier ministre François Fillon a salué l’intervention de Nicolas Sarkozy. "Le président de la République a montré ce soir, en annonçant des mesures fortes, sa détermination à agir au service des Français", écrit le chef du gouvernement.
D’après lui, le président se fait "l’honneur" "de mener une politique audacieuse et juste, en transcendant le calendrier électoral".
Pour le secrétaire général de l’UMP Jean-François Copé, Nicolas Sarkozy "a tracé, éclairé un chemin avec certes des efforts, des décisions courageuses mais aussi une espérance". Selon lui, le chef de l’Etat a parlé "avec gravité" mais aussi "avec confiance et avec optimisme".
Dans les rangs des opposants aux mesures choc de Nicolas Sarkozy, plusieurs voix se sont fait entendre.
Le candidat du Front de gauche Jean-Luc Mélenchon a dénoncé "une politique à l’allemande", "un triste et banal plan d’austérité" et une "très mauvaise nouvelle pour les ménages ouvriers".
"Tout ceci est une politique à l’allemande : on a eu le sentiment à un moment donné que Nicolas Sarkozy était candidat à être chancelier socialiste de la République fédérale allemande", affirme Mélenchon depuis son fief de campagne aux Lilas près de Paris.
"Cette politique ne vaut rien de bon pour la France. Les mots utilisés ne sont qu’un habile enfumage d’un triste et banal plan d’austérité et de soumission aux exigences du capital financier", poursuit le co-président du Parti de gauche.
"Ca va saigner toujours pour les mêmes. L’augmentation de la TVA va ponctionner 13 milliards d’euros sur l’économie du pays. 85% de cette somme sera financée par les ménages et seulement 15% par les revenus financiers", insiste-t-il encore, en entrant dans le détail des mesures annoncées par Nicolas Sarkozy dimanche soir à la télévision.
"Sous couvert de développement de l’apprentissage, on va pousser massivement les enfants du peuple hors des écoles pour les pousser dans des usines", continue-t-il, avant de fustiger que "Toutes les mesures d’allègement de charges et qui favorisent la finance sont d’application immédiate. Toutes les mesures qui desservent les travailleurs sont d’application immédiate. Toutes celles qui pourraient, le cas échéant, peser sur ceux qui ont le plus les moyens de contribuer au bien commun sont reportées à après la prochaine élection présidentielle".
Le porte-parole du Parti Socialiste (PS) Benoît Hamon a pour sa part estimé que Nicolas Sarkozy n’a fait que "reprendre des mesures portées depuis très longtemps par Laurence Parisot (la patronne du Medef) et la chancelière allemande Angela Merkel". Selon lui, le président donne "l’impression que ce sont ces deux femmes qui murmurent à l’oreille du président de la République". Et lui de juger Nicolas Sarkozy comme "un président qui n’a jamais été aussi peu souverain, aussi peu maître du destin de la Nation".
D’après Bernard Cazeneuve, porte-parole du candidat socialiste François Hollande, "le candidat Sarkozy est apparu comme le cruel commentateur du bilan du président Sarkozy". Concernant "la désindustrialisation", "l’explosion du chômage", " le déficit de compétitivité" de la France par rapport à l’Allemagne "il (Nicolas Sarkozy, ndlr) a été extrêmement dur avec lui-même", en portant "un regard extrêmement juste et très dur sur le bilan dont il est responsable", analyse-t-il. Selon le député-maire de Cherbourg, "ce candidat encore président n’a rien compris", "rien appris" car "il regarde le présent avec beaucoup de dureté mais avec les lunettes du passé".
L’ancienne ministre et députée PCF Marie-George Buffet, elle aussi, s’est montrée critique. Selon elle, "le candidat président a mobilisé six chaînes pour nous rejouer la partition de l’austérité obligatoire. Décidément au Fouquet’s on nous repasse toujours les mêmes plats : serrage de ceinture pour les salariés et cadeaux aux patrons avec en prime la casse du code du travail au nom de la "négociation" par entreprise. Nouvelles exonérations patronales du financement de la sécurité sociale mais augmentation de la TVA qui est l’impôt le plus injuste (...) Avec la remise en cause du droit aux 35h, on demande aux salariés de choisir entre leur emploi ou leurs salaires ; ou travailler plus ou gagner moins ! Tout cela est injuste et inefficace. "
Selon Marine Le Pen, présidente du Front national (FN), Nicolas Sarkozy a proposé des "remèdes ultralibéraux à double dose". "Il est dans une recherche de compétitivité complètement illusoire, puisqu’en réalité la compétitivité, elle est plombée par l’euro fort", s’insurge la patronne du parti d’extrême droite, qui se dit étonnée de voir qu’il n’y ait pas eu de mesures pour le pouvoir d’achat.
D’après elle, Nicolas Sarkozy "cherche à jouer un coup de poker dans les mois de l’élection présidentielle, sans avoir le courage d’être vraiment candidat (...) Sa mesure la plus inefficace, c’est la TVA sociale. Mais la plus efficace pour ses copains, ce sont les 30% d’augmentation de la capacité de construction. J’appelle cela l’amendement Bouygues".
Pour la candidate d’Europe Ecologie-Les Verts (EELV) à l’Elysée, Eva Joly, le président "termine son mandat comme il l’a commencé" : il "protège les couches aisées et se préoccupe fort peu des souffrances des Français les plus modestes". "Les accords ’compétitivité-emploi se transformeront en accords ’chantage-emploi’", martèle-t-elle.
Chez les syndicats, les dernières mesures présentées par Nicolas Sarkozy n’ont pas séduit.
Pour le syndicat Force ouvrière, "toute augmentation de la TVA constitue une erreur économique". Dans un communiqué, le FO " confirme que toute augmentation de la TVA constitue une erreur économique (risque de baisse de la consommation, vision erronée de la compétitivité) et un danger social (baisse du pouvoir d’achat et remise en cause du financement des allocations familiales) (...) Au final, il n’en reste pas moins que pour sortir de la crise en France comme ailleurs et en Europe il faut sortir du libéralisme économique et de l’austérité économique, salariale et sociale."
De son côté, le numéro 2 de la CFDT, Marcel Grignard se dit "
déçu et très circonspect". "
Les mesures annoncées sur les questions d’emploi et d’efficacité de l’économie française ne sont pas adaptées. Elles sont inefficaces, précipitées et injustes", réagit-il. "
La proposition d’augmenter la TVA va peser sur tous les ménages et surtout sur les ménages les plus modestes. Dans le même temps, on n’a aucune certitude sur ce que les employeurs vont faire des allègements de charges qui en résultent", explique le responsable syndical.