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Alors que l’île de Mayotte traverse une crise majeure, Manuel Valls estime que la réponse de l’État doit aller bien au-delà. Il plaide pour une refondation en profondeur du territoire.
Le passage du cyclone Chido a laissé derrière lui un territoire meurtri. "Nous n’avons pas laissé tomber Mayotte", a assuré Manuel Valls devant les sénateurs. Mais pour le gouvernement, il ne s’agit plus seulement de reconstruire ce qui a été perdu. Le ministre l’a martelé : "Il est hors de question de se contenter d’un travail de reconstruction". Ce que l’État veut désormais, c’est écrire un nouveau chapitre. Le projet de loi de programmation pour la refondation de Mayotte (PLPRM) devient ainsi le pilier d’un redressement global. Les infrastructures, les services publics, l’accès à l’eau ou l’école sont autant de failles révélées par la crise. Valls a souligné que "la mission du général Facon est quotidiennement à la tâche pour accélérer la reconstruction de l’île et penser sa refondation". Le plan quinquennal promis vise à mettre en place les bases solides d’un développement pérenne.
La situation sur l’approvisionnement en eau potable s’améliore sur le territoire. La pénurie d’eau tant redoutée a été évitée. Aujourd’hui, les deux retenues collinaires sont désormais bien remplies, mais il ne faut pas s’en contenter, selon Manuel Valls. La reconstruction de l’île est déjà en cours, avec le déploiement d’un bataillon militaire dédié et la remise en état des habitations. Le gouvernement a débloqué des fonds d’urgence et amorcé des aides économiques ciblées. Le budget prévoit également un soutien aux collectivités locales et au secteur agricole. Le projet de refondation mobilise à lui seul 3,2 milliards d’euros. Il faut y ajouter les 3,5 milliards estimés pour réparer les dégâts du cyclone Chido. Cela fait au total, 6,7 milliards d’euros. Face à ce double enjeu, le ministre a évoqué la nécessité d’une réévaluation du budget lors du débat parlementaire.
Manuel Valls veut dépasser l’urgence. Pour lui, la refondation de Mayotte passe par la création d’un nouveau socle de développement. Il s’agit de répondre à des manques chroniques : hôpitaux, infrastructures routières, gestion des déchets, transports. L’objectif est aussi de renforcer les services publics, dans un territoire où l’école et l’accès aux soins restent précaires.
Le texte comporte 34 articles, élaborés en lien avec les élus locaux. Certains points ont été modifiés, notamment le périmètre de la déclaration d’utilité publique (DUP), à la demande des représentants mahorais. Mais la loi ne fait pas l’unanimité. Des inquiétudes persistent sur sa capacité à enrayer l’immigration clandestine et l’habitat illégal. Deux fléaux que Valls identifie comme les freins majeurs au développement de l’île. Pour y faire face, il mise sur un renforcement des effectifs des forces de l’ordre et un dialogue plus ferme avec les Comores.
Une autre question sensible est au cœur des débats parlementaires : celle des mineurs isolés. Leur nombre, estimé entre 5 000 et 10 000, pèse lourdement sur les services sociaux. La présidente de la Commission des lois, Muriel Jourd, a alerté sur leur implication dans la délinquance. Manuel Valls propose une réponse graduée : d’abord créer une unité d’accueil familiale à Mayotte. Ensuite, envisager des retours vers les Comores, si un lien familial est confirmé. Ce sujet illustre bien la complexité sociale du territoire. En parallèle, le ministre souhaite avancer l’échéance de la convergence sociale, initialement prévue pour 2036. Un article du projet de loi permettrait d’accélérer le processus d’harmonisation des droits sociaux d’ici 2031. Il s’agit de réduire les inégalités territoriales et d’aligner Mayotte sur le droit commun. En conclusion, Valls a souligné l’engagement total de l’État.
Sources : Le Journal de Mayotte