Après la mort d’un magistrat, roué de coups par des policiers il y a près de deux semaines à Tuléar, un nouveau conflit est venu se greffer sur la crise politique persistante à Madagascar. Hier, le président de la transition Andry Rajoelina s’en est pris ouvertement au premier ministre Omer Beriziky du fait de la gestion de l’affaire. L’information fait la Une de l’Express de Madagascar ce jour.
La mort d’un magistrat, tabassé par des policiers le 10 décembre dans la ville de Tuléar a provoqué de vives tensions dans la Grande île. Depuis plus d’une semaine, l’ensemble des magistrats d’Antananarivo font grève, bloquant toute la machine judiciaire de la capitale. Soutenus par le principal syndicat de la profession (SMM), ils condamnent l’assassinat d’un des leurs et réclament la tête des auteurs des coups mortels, qui ne sont autres que des éléments de la Police nationale.
Mercredi, ce sont une douzaine de policiers qui ont été transférés de Tuléar vers Antananarivo à des fins d’enquête. Plus d’une semaine après les faits, les enquêteurs ne sont pas parvenus à mettre un nom sur le ou les agresseurs du substitut du tribunal de Tuléar.
Face à la lenteur du traitement de cette affaire, le président de la transition Andry Rajoelina s’en est pris ouvertement au premier ministre de consensus Omer Beriziky. « Cette affaire n’aurait pas dû être là où l’on en est actuellement, si on avait suivi mon point de vue depuis le début (...) Que chacun assume ses responsabilités. Je ne suis pas le chef du gouvernement », fustige Andry Rajoelina, alors que la grève des magistrats s’est étendue hier au niveau des Grands corps de l’Etat, regroupant entre autres les hauts fonctionnaires du pays ainsi que les médecins.
« Très remonté,Andry Rajoelina a tiré à boulets rouges sur son Premier ministre » d’union nationale, rapporte l’Express de Madagascar. « Après une semaine de tergiversation, j’ai donné des instructions au ministre de la Sécurité intérieure pour faire la lumière sur l’affaire », poursuit le dirigeant malgache.
Alors que Omer Beriziky avait proposé dans une lettre adressée à Andry Rajoelina de limoger deux ministres de son gouvernement en la personne de Arsène Razafindrazaka et Christine Razanamahasoa, respectivement ministre de la Sécurité intérieure et ministre de la Justice, l’homme fort de Madagascar a vivement fait part de sa désapprobation. « Il faut prendre une décision responsable et objective selon la réalité dans la gestion de l’État », s’insurge-t-il.
« Existe-t-il des instructions qu’elle (la Garde des Sceaux, ndlr) n’a pas pu réaliser ? En outre, j’ai confié au ministre de la Sécurité intérieure la mission de faire la lumière sur les événements de Toliara la semaine dernière (...) Douze policiers suspectés viennent d’être transférés (à Antananarivo) », insiste Andry Rajoelina, avant de lancer : « Il reste à déterminer si le limogeage des ministres de la Justice et de la Sécurité intérieure est fondé »
Le meurtre du substitut du tribunal de Tuléar envenime la situation déjà tendue à Madagascar, mettant à rude épreuve le régime de transition déjà fragilisé par des conflits internes. Un bras de fer s’est installé entre le Syndicat de la Police nationale et celui des magistrats, tandis que les Grands corps de l’Etat se sont invités au conflit jeudi à Antananarivo pour manifester leur solidarité envers le Syndicat des magistrats de Madagascar (SMM). Andry Rajoelina a fermement condamné cette grève qui, selon lui, pénalise la population. « Nous ne pouvons pas accepter les revendications qui tiennent la population pour otage », martèle-t-il.