Les Malgaches rendent hommage ce vendredi 29 mars à leurs 89 000 compatriotes ayant perdu la vie dans le soulèvement populaire de 1947 ainsi qu’à tous les rescapés de cette insurrection historique.
Chaque année, la Grande île marque la date du 29 mars 1947 à travers des cultes œcuméniques et des dépôts de gerbes sur la stèle commémorative d’Ambohijatovo, et celles érigées en mémoire des victimes dans les différentes régions où les luttes ont été les plus violentes.
Cette année, l’Exécutif n’a pas failli à la tradition. « Comme tous les ans, la journée du 29 mars, date marquant le début de la lutte pour la libération nationale sera commémorée avec dignité et ferveur. Les différentes cérémonies seront placées sous le haut patronage du président de la Transition. Dans tous les chefs-lieux de district ayant eu des combattants nationalistes recensés au niveau de la direction prévue à cet effet, la journée commémorative commence par un culte œcuménique suivi du dépôt de gerbes sur la stèle de la libération nationale et d’une remise officielle de médailles aux combattants nationalistes », indique un communiqué du gouvernement en date du 26 mars. Le thème porte cette année sur « le patriotisme pour la libération nationale ».
Mais à l’heure où le pays est en quête d’un climat politique plus apaisé, les acteurs de la crise ne semblent pas encore tout à fait prêts à déposer leurs « armes » et à choisir la voie d’une sincère réconciliation. Chaque mouvance a chacune sa façon de marquer l’évènement, où du moins, son propre horaire pour se rendre sur la stèle commémorative, un scénario qui se répète chaque année, notamment depuis le début de cette crise en 2009.
« La situation reflète dans une large mesure, l’absence de climat de confiance au sein des principaux acteurs politiques du pays », ne manque pas de commenter le quotidien en ligne orange.mg.
Bref, pour en revenir à cet épisode des plus meurtriers de l’histoire de Madagascar, une insurrection éclate le 29 mars 1947 dans plusieurs régions côtières de la Grande île. Si dans les rangs des Malgaches, on a dénombré plus de 89 000 morts, les forces coloniales, elles, avaient perdu « 1.900 hommes (essentiellement des supplétifs malgaches). On relève aussi la mort de 550 Européens, dont 350 militaires », indique- t-on sur le site madagate.com, reprenant le récit de l’historien Joseph Savès. « La disproportion des pertes tient à ce que les rebelles ne disposaient en tout et pour tout que de 250 fusils », explique encore l’historien.
En vingt mois, Malgaches et Français se sont livrés à de violents échanges. L’épisode de Moramanga a été le plus tragique. Des arrestations massives ont été ordonnées par le chef de district d’Ambatondrazaka. « Le 5 mai avant l’aube, 166 otages sont transférés à la gare et enfermés dans trois wagons plombés, affectés d’ordinaire au transport des bestiaux. Le convoi s’ébranle et arrive au début de l’après-midi en gare de Moramanga. Vers minuit, sous prétexte que des insurgés s’apprêtent à délivrer les otages, les militaires de garde reçoivent l’ordre de faire feu sur le train », raconte Joseph Savès .
Lui de poursuivre que plusieurs personnes de Moramanga sont réveillées en sursaut par le crépitement des mitraillettes et le vacarme du canon. 71 personnes ont été épargnées ce soir là, ils ont été aussitôt transférés à la prison de Moramanga où ils devaient subir des interrogatoires serrés.
« Reconduits à nouveau dans les wagons, et laissés sans nourriture, ils en sont extirpés définitivement le 8 mai dans l’après-midi pour être conduits vers un peloton d’exécution. L’appel des condamnés se fait en présence de plusieurs personnalités civiles et militaires. L’ordre d’exécution est signé par le Général Casseville. Séparés en trois groupes, les otages aussitôt abattus sur le bord d’un charnier où s’empilent leurs cadavres. L’un d’entre eux, Rakotoniana, n’est pas blessé mortellement et parvient la nuit tombée à s’échapper du charnier. C’est par lui surtout que l’opinion sera informée de ‘ l’affaire du train de Moramanga ‘ », rajoute encore l’historien, rappelant l’ampleur de l’évènement, un souvenir tragique mais enrichi en patriotisme, ce qui devrait faire réfléchir amplement les politiques d’aujourd’hui.