Quatre ans après la mort de Yoan Spanu, un juge à La Réunion a ordonné l’ouverture d’une nouvelle enquête vendredi 3 juin.
Les parents de Yoan Spanu ont réussi à obtenir justice quatre ans après la mort de leur fils. Vendredi 3 juin, un juge de La Réunion a ordonné qu’une nouvelle enquête soit ouverte pour éclaircir les circonstances du décès de ce jeune en détention, relate Lexpress.mu qui a rencontré Isabelle et Gilles Spanu à Maurice.
Le 7 novembre 2018, Yoan Spanu a été retrouvé pendu dans les douches de la maison d’arrêt de Saint-Pierre. Le jeune homme y a été incarcéré le 1er novembre pour tentative de meurtre à la suite d’une bagarre avec un colocataire qu’il soupçonnait de vol.
Le 6 novembre 2018, durant sa comparution devant les juges des libertés et de la détention, Yoan a alerté que sa vie était en danger, puisqu’il a été placé dans la même cellule que de dangereux prisonniers. Il avait également confié à sa mère qu’il allait très probablement être assassiné et ne s’alimentait presque plus.
Pourtant, cet appel à l’aide n’a jamais été considéré par le juge, d’après sa mère Isabelle. Lors de cet entretien accordé à Lexpress.mu, les parents ont signifié également la faille du système de prisons à La Réunion, car il n’y a aucune distinction entre les détenus suspects, les accusés et les condamnés.
Devant le juge d’instruction, le jeune homme a refusé de signer sa déclaration de procédure verbale, puisque son avocat n’était pas présent et il a envoyé son associé. Yoan n’a pas approuvé cette décision et il a insisté pour être représenté par son avocat. Le juge a indiqué qu’il prononcerait un jugement en délibéré quelques heures plus tard.
Selon sa mère, elle a dit à son fils qu’ils pourront faire appel dans 15 jours, mais ce dernier lui a répondu qu’il va mourir. "Ecoute maman, je sais que je vais mourir. Je t’aime et je te dis adieu. Dis à papa et à toute la famille que je les aime. Cela fait trois ou quatre jours que je n’ai pas mangé. J’entends des choses dans la cellule à côté", a-t-elle confié.
La police est venue pour l’emmener, et quelques heures plus tard, ses parents ont appris qu’il s’était suicidé.
La thèse de suicide évoquée par deux médecins légistes à La Réunion est irrationnelle, selon les proches de Yoan, car ce dernier a voulu monter sa petite entreprise et il leur a présenté sa petite amie avec laquelle il voulait se fiancer.
Par ailleurs, Isabelle et Gilles Spanu ont constaté que les autorités réunionnaises se sont débarrassées rapidement du corps. Ils leur ont donné une mauvaise carte d’identité et des papiers administratifs qui portaient le nom d’un autre détenu.
Face à cette situation, les parents ont rapatrié le corps de leur fils en suivant toutes les démarches administratives. Ils ont souligné que les mains de Yoan étaient entièrement bandées au moment où son cadavre a été remis à la famille.
Par la suite, leur avocat a demandé à un médecin légiste nommé dr Satish Boolell de réaliser une contre-autopsie avec un confrère pour avoir une plus grande assurance sur la qualité du rapport. La conclusion de la contre-autopsie a montré un assassinat. "A partir de ce jour-là, j’ai trouvé la force de me battre pour la justice et demander aux autorités françaises pourquoi elles avaient tué mon fils", a indiqué Gilles Spanu. D’ailleurs, sur la tombe de Yoan, il a fait graver "Merci Maurice d’avoir accueilli YOAN SPANU, assassiné par l’Etat français (974)".
Après avoir pris connaissance des conclusions de la contre-autopsie, un juge à La Réunion a ordonné l’ouverture d’une nouvelle enquête vendredi 3 juin. Ce rebondissement a apporté un certain soulagement aux parents de Yoan Spanu, malgré le fait qu’ils devront se battre pour que toute la vérité soit faite dans cette affaire. "Bien que nous soyons soulagés, nous sommes en guerre contre l’État français. Je suis en colère. Peut-être que ce sentiment s’estompera un jour lorsque cette affaire sera résolue. Mais pour l’instant, je garde ma colère", a indiqué son père.
D’ailleurs, ils ont fait une demande d’analyse des vêtements que le jeune homme portait au moment du décès. Les résultats sont attendus pour le 31 octobre prochain. "Les autorités devront assumer leurs responsabilités", a insisté Gilles Spanu. D’après les parents, le coupable, c’est l’Etat et ils vont attaquer l’Etat en justice.
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