Le Brésil et la Turquie ont fermement répondu vendredi à Hillary Clinton selon laquelle le monde est "plus dangereux" après leur accord nucléaire avec l’Iran, et accusé de double jeu les grandes puissances qui prônent le désarmement sans éliminer leur arsenal nucléaire.
RIO DE JANEIRO (AFP) - Le Brésil et la Turquie ont fermement répondu vendredi à Hillary Clinton selon laquelle le monde est "plus dangereux" après leur accord nucléaire avec l’Iran, et accusé de double jeu les grandes puissances qui prônent le désarmement sans éliminer leur arsenal nucléaire.
A l’ouverture du IIIe Forum mondial des civilisations à Rio de Janeiro, le président brésilien Luiz Inacio Lula da Silva et le Premier ministre turc Recep Tayyip Erdogan ont défendu leur position concernant l’accord conclu par Brasilia et Ankara avec Téhéran sur un échange de combustible nucléaire iranien, alors que le ton était déjà monté la veille avec les Etats-Unis.
"L’existence d’armes de destruction massive est ce qui rend le monde plus dangereux", a lancé Lula devant les représentants de 119 pays dont les Etats-Unis qui étaient pour la première fois représentés à ce Forum.
Au côté du secrétaire général de l’ONU Ban Ki-moon, Lula répondait ainsi aux propos virulents tenus jeudi par la secrétaire d’Etat américaine Hillary Clinton sur l’accord signé le 17 mai à Téhéran.
"Nous pensons que faire gagner du temps à l’Iran, permettre à l’Iran d’ignorer l’unité internationale qui existe à propos de son programme nucléaire rend le monde plus dangereux et non moins" dangereux, avait-elle dit, soulignant de "sérieux désaccords" avec le Brésil sur ce sujet.
M. Erdogan a quant à lui remis en question la position des puissances nucléaires : "Quand nous entendons parler d’empêcher l’Iran de se doter d’armes nucléaires, cela vient de ceux qui possèdent des armes nucléaires !", a-t-il déclaré, suscitant les applaudissements du public.
"Ceux qui parlent sont ceux qui devraient éliminer les armes nucléaires dans leur propre pays (...), c’est la seule façon d’être convaincants", a-t-il ajouté.
Le président Lula, qui ne cache plus son irritation face à l’accueil timoré de l’accord de Téhéran par les grandes puissances, a assuré que les hauts responsables du Brésil et de la Turquie s’étaient rendus en Iran "en quête d’une solution négociée". Il a réaffirmé la nécessité de dialoguer avec l’Iran plutôt que d’adopter de nouvelles sanctions.
L’accord prévoit l’échange en Turquie de 1.200 kg d’uranium iranien faiblement enrichi (3,5%) contre 120 kg de combustible enrichi à 20% fournis par les grandes puissances et destinés au réacteur de recherche de Téhéran.
Selon Brasilia, cet accord répond à des suggestions faites à Lula par le président américain Barack Obama dans une lettre envoyée il y a 20 jours.
Mais le 18 mai, le Conseil de sécurité de l’ONU a examiné un nouveau projet de sanctions contre l’Iran, rédigé par les Etats-Unis et approuvé par les autres puissances chargées du dossier iranien (Chine, France, Grande-Bretagne, Russie et Allemagne).
Celles-ci jugent l’accord insuffisant et l’ont critiqué car elles estiment que le stock d’uranium iranien a déjà atteint 2.400 kilos.
Elles soupçonnent l’Iran de chercher à se doter de l’arme nucléaire sous couvert d’un programme civil, ce qu’il dément.
Jeudi, la Turquie et le Brésil qui s’opposent à de nouvelles sanctions, avaient déjà défendu leur position, accusant les pays critiques d’être "jaloux" de leur "succès diplomatique".
Ban Ki-moon avait pour sa part assuré "qu’il serait d’une grande aide que l’Iran cesse d’enrichir de l’uranium à 20%" sur son propre territoire.
Quant à l’Iran, son ministre des Affaires étrangères Manouchehr Mottaki s’est déclaré vendredi à Sofia optimiste sur une réponse positive de la part de l’Agence internationale de l’Energie atomique (AIEA) sur l’accord tripartite.