Le Premier ministre égyptien Ahmad Nazif devait demander mardi au Parlement, dominé par le parti au pouvoir, la prorogation pour deux ans de l’état d’urgence en vigueur depuis près de 30 ans, malgré les protestations de l’opposition et des ONG des droits de l’Homme.
LE CAIRE (AFP) - Le Premier ministre égyptien Ahmad Nazif devait demander mardi au Parlement, dominé par le parti au pouvoir, la prorogation pour deux ans de l’état d’urgence en vigueur depuis près de 30 ans, malgré les protestations de l’opposition et des ONG des droits de l’Homme.
"Le gouvernement va demander une prorogation (de l’état d’urgence) pour une période de deux ans", a déclaré aux journalistes le ministre des Affaires juridiques et parlementaires, Moufid Chéhab, précisant que M. Nazif s’adresserait au Parlement plus tard dans la journée.
La prorogation de cette loi d’exception devrait être adoptée sans difficulté, une simple majorité étant nécessaire au Parlement dominé par le parti national démocratique (PND) du président Hosni Moubarak.
L’état d’urgence a été décrété après l’assassinat du président Anouar el-Sadate en octobre 1981 par des islamistes, et a été reconduite sans discontinuer depuis.
Sa prorogation imminente survient alors que le pays aborde une période électorale chargée, avec des législatives à l’automne et une présidentielle en 2011.
Plusieurs mouvements d’opposition, notamment les Frères musulmans, entendent manifester devant le Parlement au Caire pour protester contre une telle prorogation.
Des manifestants ont commencé à se rassembler devant le Parlement. Certains portaient des posters affichant un squelette symbolisant le peuple égyptien avec une corde -la loi d’urgence- autour du cou. D’autres portaient des pancartes sur lesquelles était écrit : "Moubarak dit que nous sommes un pays stable mais le PND dit que nous sommes en état d’urgence".
La législation qui permet de restreindre les droits individuels et politiques et donne des pouvoir élargis à la police en matière d’arrestations est régulièrement critiquée par les organisations de défense des droits de l’Homme, les capitales occidentales et l’opposition égyptienne.
La loi expire le 31 mai. Le Parlement doit voter sa prorogation au 31 mai 2012, a dit M. Chéhab. Mais il a souligné qu’elle serait seulement appliquée "dans le cas de crimes liés au terrorisme et au trafic de drogues".
Des ONG accusent les autorités, qui démentent, d’utiliser l’état d’urgence pour affaiblir l’opposition.
L’état d’urgence accorde au ministre de l’Intérieur le droit discrétionnaire de maintenir en prison tout individu représentant un "danger pour la sécurité publique", même lorsqu’il a purgé sa peine, et autorise les autorités à renvoyer des civils devant la justice militaire.
M. Moubarak, qui n’a toujours pas dit s’il serait candidat à sa propre succession en 2011, avait promis pendant la campagne pour la présidentielle de 2005 d’abolir l’état d’urgence, avant de déclarer qu’il ne serait levé que lorsqu’une loi antiterroriste serait adoptée. Celle-ci se fait toujours attendre.
Début 2010, l’organisation des droits de l’Homme Human Rights Watch a appelé l’Egypte à abroger sa "loi d’urgence draconienne. Les forces de sécurité doivent comprendre que leur sauvagerie confirme l’image d’Etat policier qu’a l’Egypte à l’étranger".