Le Niger était sous tension dimanche au lendemain de violentes émeutes contre Charlie Hebdo tuant dix personnes. L’opposition a voulu mobiliser contre le président Mahamadou Issoufou.
La caricature de Mahomet sortie dans le dernier numéro de Charlie Hebdo a provoqué de violentes émeutes au Niger. D’après Libération dans son édition de ce lundi rapportant les propos du gouverneur de la capitale, 90 participants à une manifestation contre le régime interdite par les autorités avaient été arrêtés à Niamey, dont des figures de l’opposition. Lors de ces émeutes, dix personnes ont été tuées dont cinq à Niamey samedi et cinq autres la veille à Zinder (sud-est), la deuxième ville du Niger.
La capitale était le théâtre de nombreuses destructions dont au moins dix églises, des bars, hôtels et autres commerces appartenant à des non-musulmans. Par ailleurs, à Zinder, plus de 300 chrétiens ont été contraints de se réfugier dans deux camps militaires. La plupart d’entre eux est soumis à de mauvaises conditions sanitaires.
Bien que le gouvernorat de Niamey ait interdit la tenue de la manifestation de dimanche, l’opposition lui a tourné le dos en défiant manifestement le président Issoufou. Ce dernier était parmi les six chefs d’Etat africains présents lors de la Marche républicaine du 11 janvier à Paris. La population du Niger à 98% musulmane était furibonde après le "Nous sommes tous Charlie" sorti par Mahamadou Issoufou sur les ondes. La situation était encore plus tendue dans les mosquées avec des critiques qui ont fusé de partout. Vendredi à Agadez, dans le nord, des manifestants hurlaient "A bas le régime !", et le siège du parti de M. Issoufou était victime d’un incendie.
Malgré l’interdiction de manifester, environ 300 opposants se sont réunis dimanche place Toumo à Niamey. Des échanges de gaz lacrymogène et de jets de pierres ont été aperçus en plus de quelques pneus incendiés. Le calme était de retour à la mi-journée. D’après Issoufou Tamboura, le porte-parole du Mouvement national pour la société de développement (MNSD), le principal parti de l’opposition, il n’existe aucun lien entre les émeutes "spontanées" organisées contre Charlie Hebdo samedi et la manifestation de dimanche qui était "programmée depuis une semaine".
Une source humanitaire régionale a observé que les violences à Zinder n’étaient plus une surprise sachant qu’il s’agit d’une ville frondeuse, un bastion de la contestation systématique au pouvoir central avec à la base des rivalités économiques entre chrétiens et musulmans. Cette même source de souligner qu’à Niamey, la contestation était plutôt d’ordre politique.