Le président de Région a adressé une lettre au président de la République au sujet de la crise qui touche La Réunion.
Monsieur le Président de la République,
Suite au mouvement des Gilets Jaunes lancé le 17 novembre dernier, je tiens à vous alerter de la situation extrêmement grave et préoccupante à La Réunion après 5 jours de barrages consécutifs.
Le droit de manifester est un droit que je respecte. Par ailleurs l’action portée par le mouvement des Gilets Jaunes doit pouvoir avoir l’écoute et la prise en considération nécessaire des instances publiques. Les revendications liées au pouvoir d’achat imposent j’en suis convaincu, de vraies mesures rapides à tous les niveaux. La France qui souffre, la Réunion en désespérance qui s’exprime doivent retenir toute notre attention. La dignité est aussi un droit auquel nous sommes attachés.
Mais ce mouvement pacifique des Gilets Jaunes laisse place aujourd’hui à des mouvements de violences qui terrorisent les familles.
Pour des raisons de sécurité, les écoles et les établissements publics sont, vous le savez, pour la plupart fermés, les rideaux de nombreux commerçants sont baissés et la population réunionnaise rencontre maintenant de vraies difficultés d’approvisionnements. La paralysie de l’économie de l’île aura évidemment de graves conséquences à tous les niveaux.
Plus grave encore, les violences urbaines, les pillages et incendies de magasins se répètent nuit après nuit, ne faisant qu’amplifier le degré de tensions et le sentiment d’insécurité chez les Réunionnais.
C’est une situation de guérilla urbaine à laquelle les services des forces de l’ordre sont désormais confrontés au quotidien et ce, malgré les interventions nombreuses et ciblées que je salue. Les droits fondamentaux et le principe de libertés individuelles ne sont plus assurés. Les services publics sont contraints d’être interrompus, la liberté de circuler dans l’île est mise à mal, l’Etat de droit est littéralement défié. Les éleveurs, agriculteurs, chefs d’entreprises, salariés, familles… sont tous très fortement pénalisés par ce contexte. Cette situation dépasse maintenant très largement le cadre respectable par ailleurs des revendications portées par le mouvement initial des Gilets Jaunes.
Il faut, Monsieur le Président de la République, de manière urgente, entreprendre d’établir le dialogue avec les Réunionnais porteurs de revendications légitimes, des revendications que j’entends et que je défends sur la question globale du pouvoir d’achat.
Je partage l’expression du malaise social des Réunionnaises et des Réunionnais qui cherchent par tous les moyens à dire, de parfaite bonne foi et dans le respect des lois de la République, leurs détresses. Leurs appels à plus d’équité et de justice doivent être entendus.
La situation d’urgence que traverse La Réunion exige des réponses d’envergure qui ne sauraient être reportées davantage. Les retards accumulés années après années se mesurent pleinement aujourd’hui. L’Etat doit agir, agir vite sur tous les fronts, pour répondre au malaise profond qui sape les fondamentaux mêmes de la société réunionnaise. Au niveau local, les premières décisions à notre niveau de compétence et en concertation avec la Ministre des outre-mer ont été prises, mais il est évident qu’elles ne sauraient suffire.
Monsieur le Président, je lance un appel solennel pour que vous preniez, à votre niveau de responsabilité, avec le Gouvernement, toutes les mesures nécessaires pour la protection des personnes et des biens dans notre île et le retour à une situation normale.
Je lance également un appel solennel pour que l’Etat engage les mesures d’urgences incontournables et les mesures de fond indispensables comme garanties d’un développement économique et social mieux partagé et plus solidaire.
Je vous prie d’agréer, Monsieur le Président de la République, l’expression de ma très haute considération.
Didier ROBERT
Président de la Région Réunion