Trois mois après la mise en application de la réforme de la garde à vue en mi-avril dernier, le retour sur expérience des professionnels de la police et du droit est pour le moins mitigé. Les syndicalistes de police soulignent les difficultés matérielles et la charge de travail supplémentaire induites par cette nouvelle mesure.
Quelques mois seulement après sa mise en place, la réforme de la garde à vue est largement critiquée. Selon le site du Figaro lundi, le nombre de gardes à vue est en chute libre au niveau national avec une baisse de 26,3%. Autre chiffre plus inquiétant encore : le nombre d’élucidations d’enquêtes lui aussi en baisse de 2,5%.
En renforçant les moyens à disposition de la défense avec une présence obligatoire de l’avocat dès le début de la garde à vue, la réforme a compliqué le travail des enquêteurs. Les aveux obtenus sont moins nombreux, la présence de l’avocat dissuadant fréquemment leurs clients de se déclarer.
A la Réunion, les critiques de cette nouvelle réforme fusent. Pour Thierry Flahaut, Secrétaire régional d’UNITE SGP Police Fo, cette nouvelle version de la garde à vue aurait dû s’accompagner d’une modification de la procédure pénale. Premier souhait émis par les policiers : ne plus soumettre la procédure à une forme écrite. En effet, la retranscription de l’intégralité des interrogatoires menés pendant la garde à vue de 48 heures, représente une charge de travail considérable. Les policiers soulignent que l’enregistrement vidéo de la garde à vue permettrait de gagner énormément de temps. D’autre part, les moyens matériels font défaut aux policiers pour mener la garde à vue telle que la réforme l’exige.
D’autre part, la Réunion suit la tendance observée au niveau national. Au commissariat de Malartic, le nombre de garde à vue enregistrées entre mi-avril entre mi-juillet 2011 sont en baisse de près de 20% par rapport à la même période l’année précédente. Environ 500 gardes à vue ont été effectuées cette année contre 640 l’an dernier. En cause : la mise en application est si compliquée à mettre en oeuvre que les tribunaux ont décidé de les limiter aux affaires les plus importantes. Ainsi, pour un vol simple ou une alcoolémie courante, le suspects ne sont plus mis en garde à vue.
Richard Bometon, procureur de la République à Saint-Denis, souligne que la réforme constitue une avancée pour les droits de la défense. Mais, sa mise en place s’est faite de manière trop brutale selon le procureur. Les avocats, quant à eux restent circonspects. Cette réforme leur demande d’être extrêmement disponible. Une astreinte que certains ont des difficultés à concilier avec la gestion d’un cabinet à temps plein. Parallèlement, cette réforme donne l’impression à certains interpellés d’être "intouchables". "Ils se croient un peu comme dans les séries américaines avec l’avocat qui va les sauver. Ils croient à des miracles possibles", explique Catherine Moissonnier, avocate inscrite au barreau de Saint-Denis.
D’autre part, certaines gardes à vue qui se sont déroulées avant la mise en place de la réforme, notamment celles relatives à l’affaire de la fraude à la canne, pourraient être ocntestées.