A quelques heures de la manif’ du 5 mars, Ivan Hoareau, un des fers de lance du mouvement, nous livre ses impressions. Mais surtout sa détermination face à cette crise sans précédent qui secoue les DOM. L’homme fort de la CGTR veut changer les choses en une journée dans la rue...
Dans quel état d’esprit vous trouvez-vous à quelques heures d’aller battre le pavé ?
Je suis plus déterminé que jamais. Parce que la situation de crise s’étend et s’approfondit. La dégradation du pouvoir d’achat s’accélère, les prix augmentent vertigineusement et les salaires ne progressent plus. La question salariale est centrale en tant qu’exigence sociale et impératif économique.
Elle renvoie à la nécessaire revalorisation du Travail dans la société, tout le contraire de ce que fait le gouvernement. Une des dimensions fondamentales de la crise internationale
est la faiblesse de la demande (des salaires, des pensions, des minima sociaux), élément essentiel d’une relance.
Répondre à l’urgence sociale permettra de mieux aborder la problématique du long terme. Et ainsi, seront abordées les 2 dimensions de la crise : sociale et politique. L’une ne peut aller sans l’autre et aucune ne doit exclure l’autre. Les salaires ne sont pas l’ennemi de l’emploi, ils sont l’ennemi du patronat. C’est ainsi qu’à la date d’aujourd’hui, et malgré le malaise qui monte dans la société réunionnaise, le patronat ne pipe mot sur le nécessaire rééquilibre entre salaires et profits. Opposer salaire et emploi c’est dire aux salariés :"circuler, il n’y a rien à gagner" ; c’est souffler sur les braises !
Nous sommes conscient que le tissu économique est composé de TPE, voire de micro entreprises. Et nous entendons les craintes de petits artisans et entrepreneurs. Ceci dit, il est composé aussi de filiales de sociétés transnationales qui retournent énormément d’argent, hors de la Réunion, vers leurs maisons-mères. Il est composé aussi de monopoles et d’oligopoles, d’importateurs et de la grande distribution qui saignent les Réunionnais, et
accentuent la saignée en période de crise.
Quelles propositions faites vous pour sortir de la crise ?
Un des éléments principaux de sortie par le haut de la crise doit s’articuler autour du court et du long terme : hausse du pouvoir d’achat et réduction des inégalités, relance des grands travaux, révision des aides aux entreprises afin notamment de les responsabiliser au regard des territoires où elles vivent et de structurer les branches. Avoir un projet de développement compétitive et solidaire.
Pensez vous que la Réunion se prépare à vivre des heures
difficiles dans les prochains jours ?
Seul l’avenir peut nous dire si le Réunionnais est prêt ! La situation est grave. Quand finira "la crise" ? La tension sociale est palpable à chaque instant. Les ingrédients d’un cocktail explosif sont réunis. Si des réponses immédiates ne sont pas apportées à l’urgence sociale et que les tergiversations du patronat et du gouvernement continuent, le boomerang nous reviendra dans la figure beaucoup plus fortement demain qu’aujourd’hui. Sur ce point, attention à ce que les Etats généraux annoncés ne soit pas manœuvre dilatoire ou occasion de plus d’attaques contre les salariés.