La suppression des heures supplémentaires défiscalisées fait réagir autant le patronat que les syndicats dans notre département.
Le gouvernement de Jean-Marc Ayrault a décidé de mettre un terme à l’une des mesures phares du quinquennat de Nicolas Sarkozy : les heures supplémentaires défiscalisées (cf. Linfo.re : La fin des heures supplémentaires défiscalisées). C’est la fin annoncée du "travailler plus pour gagner plus", un des slogans martelés par l’ex-président.
L’annonce de cette suppression ne laisse pas indifférent les chefs d’entreprise et les syndicats, tous concernés par ce dispositif.
Eric Marguerite, secrétaire général de Force Ouvrière Réunion, se prononce clairement pour l’annulation de ce dispositif. Ce serait, selon lui, un moyen de redynamiser l’emploi, "on parle toujours de défiscalisation que ce soit sur les bas salaires ou autres. Il n’y a jamais eu d’études pour prouver que ça a eu des impacts sur l’emploi, sur la bonne marche des entreprises ou autre. Par contre, l’effet négatif ça a été de creuser le déficit de l’Etat, plus de 30 milliards d’euros que l’Etat a laissé par le biais de cette mesure de défiscalisation".
Le syndicaliste ajoute que les entreprises détournaient cette mesure, "c’est un faux débat et un faux problème de dire que ça arrangeait tout le monde, les salariés et l’entreprise. Je crois que ce dispositif a été détourné de sa véritable nature. Il y a des entreprises qui ont utilisé ce moyen d’heures supplémentaires pour ne pas augmenter les salaires tout simplement. Nous on dit vaut mieux augmenter les salaires, le pouvoir d’achat des gens au lieu de les payer et faire travailler en heures supplémentaires".
Mais pour le patronat, le discours est totalement opposé. Selon Dominique Vienne, président de la Confédération Générale des Petites et Moyennes Entreprises (CGPME), cette loi d’exonération de charges des heures supplémentaires avantageait les salariés et les patrons.
Dans le contexte économique difficile de la Réunion, "l’avantage de cette loi c’est que face une recrudescence temporaire de l’activité, les heures supplémentaires étaient défiscalisées, ce qui permettaient aux salariés d’avoir un pouvoir d’achat renforcé et à la partie patronale d’avoir un coût global économique inférieur parce qu’il y avait une exonération des charges patronales", explique-t-il.
Pour Dominique Vienne, salariés comme patrons pouvaient profiter de cette mesure, "il y avait deux leviers, un levier de flexibilité et un levier de renforcement du pouvoir d’achat pour les salariés". Il ajoute par ailleurs que cette loi sera retirée par l’actuel gouvernement simplement parce qu’elle a été mise en place par l’ancienne majorité.
Le retrait de ce dispositif est jugé "dangereux" par Dominique Vienne "parce ce que le monde économique subit systématiquement les effets de balancier. C’est à dire qu’on passe d’un extrême à un autre. La gouvernance du pays au sens économique réclame une stabilité et une visibilité".
Il regrette également qu’il n’y ait eu aucun dialogue avant la décision de supprimer l’exonération des heures supplémentaires, "cette décision, nous allons être obligés de la subir. Le gouvernement avait promis dans sa mise en place que les choses se feraient par le dialogue. Nous pouvons regretter qu’avant la suppression de cette mesure, qu’il n’y ait pas eu d’abord une évaluation complète des deux parties, c’est à dire renforcement de la flexibilité pour l’entreprise et renforcement du pouvoir d’achat, avant de décider de manière unilatérale cette suppression".
La fin des heures supplémentaires exonérées de charges a été décidée par le gouvernement pour réaliser des économies et favoriser l’embauche. Selon l’Observatoire français des conjonctures économiques (OCDE), la défiscalisation des heures supplémentaires a détruit 30 000 emplois en 2011.