Cité en qualité de témoin lors du procès du gourou de la "Sainte Famille", l’Evêque de la Réunion s’exprime aujourd’hui sur son rôle dans l’affaire "Louis Vitry". Monseigneur Gilbert Aubry qui assure ne pas vouloir polémiquer, entend cependant "ne pas être manipulé" par un avocat qui lui ferait défendre ce qui est "condamnable". Ces propos s’adressent de toute évidence au Bâtonnier Georges-André Hoarau, avocat du gourou Louis Vitry.
Le procès de Louis Vitry qui s’est déroulé hier au tribunal correctionnel de Saint-Pierre n’est pas achevé. Le Procureur a requis cinq années de prison ferme à l’encontre du chef du groupe de prière la "Sainte Famille". Le tribunal a quant a lui mis sa décision en délibéré. Le gourou du Tampon sera fixé sur son sort le 9 décembre prochain.
Témoin clé lors de cette audience, l’Evêque de la Réunion a répondu aux questions de Maître Georges-André Hoarau, le représentant de Louis Vitry. Aujourd’hui, Monseigneur Aubry livre son sentiment sur l’audience de ce jeudi. Le chef religieux s’est dit "très surpris" par les propos de la défense.
Ci-dessous le communiqué diffusé en début de soirée par l’évêché :
" J’ai été quelque peu surpris par des commentaires concernant le « procès Vitry », avant et après le procès. Pour que toute la vérité soit respectée, je rappelle ici que ce que j’ai déclaré à la barre, non pour « la défense de M. Vitry » mais pour « la défense des victimes et de leurs familles ». Je ne peux pas tolérer que l’Eglise soit utilisée par l’avocat de l’accusé pour justifier les agissements de son client.
Entre 2001 et 2003, j’ai rencontré deux fois M. Vitry en présence de prêtres du Tampon. Il voulait une caution de l’Eglise catholique et une reconnaissance officielle de son groupe de prière, lui-même étant catholique. Vu ses réponses à nos questions, nous avons compris que cette personne ne pouvait pas être responsable d’un groupe du point de vue strictement religieux. Nous n’avions pas connaissance de questions de moeurs. Je lui ai dit qu’il fallait suivre une formation de base avec le SEDIFOP (Service Diocésain de Formation Permanente) et avoir en même temps la relation à son curé. Cela n’a jamais été réalisé.
En 2004, les gens se sont plaints de nuisances sonores autour de son lieu de prière. J’ai alors publié le communiqué suivant en date du 28 juin : « Les catholiques sont encouragés à prier en famille et libres de prier en groupe à condition que leur prière soit conforme à la foi et aux pratiques de l’Eglise sans déranger ceux qui sont dans l’environnement. Je ne donne aucun label de reconnaissance aux groupes qui ne font pas partie d’un mouvement ou d’un service déjà reconnus par l’Eglise et surtout pas aux groupes qui se donnent des missions de guérison. Ces phénomènes sont très complexes et demandent un discernement poussé pour pouvoir être cernés correctement.
Le plus important n’est jamais une guérison, fut-elle miraculeuse ou inexpliquée, mais la paix intérieure et la conformité d’une vie avec le message d’amour de Jésus-Christ. Le groupe de M. Louis Vitry n’a pas de reconnaissance de la part de l’Eglise et n’a reçu aucune mission. Dans l’ensemble du diocèse, les fidèles sont invités à se diriger vers des groupes de prières déjà reconnus, soit dans leurs paroisses, soit dans un mouvement. » L’essentiel de ce communiqué est valable encore aujourd’hui pour tous les fidèles de l’Eglise catholique : en cas de doute, veuillez consulter votre curé.
Le 20 octobre 2008, quelqu’un est venu me trouver à l’évêché pour se plaindre que M. Vitry avait commis des agressions sexuelles sur de jeunes adultes et sur des mineurs.
Le lendemain, 21 octobre, j’ai reçu certaines de ces personnes. Le 23, j’ai fait un signalement au Procureur en lui remettant les informations en ma possession, conformément à ce que demande le Droit en pareil cas. Je laisse évidemment à la justice le soin d’apprécier ce qui avait été avancé par ces personnes… avec les suites
à donner. Depuis que je suis évêque, j’ai déjà fait cinq signalements de ce genre dont trois pour des prêtres. Je ne veux pas polémiquer avec qui que ce soit mais je veux bien dire que je n’entends pas être manipulé, surtout pas par un avocat pour me faire défendre ce qui est condamnable. Plus que jamais, j’assure les victimes et leurs familles de mon soutien."