Suite à deux décès suspects dans le cadre de l’activité de transplantation rénale, une inspection a été commandée par l’Agence Régionale de la Santé (ARS-OI) au début du mois de septembre. Le Centre Hospitalier Félix Guyon souhaite aujourd’hui expliquer les conditions de suspension de greffe rénale jusqu’à la fin de l’année 2010 mais également le plan d’action établi pour assurer la reprise de l’activité.
Communiqué de presse du CHR de la Réunion - Centre Hospitalier Félix Guyon :
"La vérité sur les conditions de suspension de la greffe rénale au CHR de la Réunion et le plan d’actions pour une reprise de l’activité :
Les raisons de la suspension
Deux décès de patients greffés sont intervenus depuis le début de l’année 2010 ainsi qu’une explantation. Le CHR exprime ses condoléances aux familles et les assure de son soutien dans cette difficile épreuve.
Dans ces circonstances, le devoir de tout centre de greffes est d’analyser les causes de ces situations pour l’amélioration des procédures et des compétences humaines.
C’est dans cet objectif que le CHR a souhaité la suspension de cette activité. Il a proposé à l’ARS de suspendre cette activité le temps d’analyser les causes des décès et de l’explantation et de mettre en œuvre un plan d’actions visant à améliorer les modalités de prise en charge. Certains centres de greffes métropolitains, qui connaissent également des décès, opèrent de même sans toutefois arrêter l’activité.
La décision de l’ARS et du CHR a visé avant tout à préserver l’intérêt des patients en attente de greffe. Parce qu’il s’agit d’une activité à risque nécessitant une prise en charge multidisciplinaire, des complications et des accidents sont parfois observés, et ce dans tous les centres de greffes.
Toutefois, à ce jour, les résultats connus et traités par l’Agence de la biomédecine qui veille aux résultats de l’ensemble des centres greffeurs font état d’une situation qui n’est pas différente des autres centres et qui place le Centre Hospitalier Félix Guyon dans la moyenne nationale.
L’allusion à des décès ou incidents dissimulés ne peut être exacte car l’Agence de Biomédecine, instance seule habilitée en la matière, reçoit systématiquement toute déclaration relative à cette activité et n’a jamais soulevé le moindre défaut de transmission.
La déclaration des deux décès a bien été faite auprès de l’agence de biomédecine. La direction n’a pas été immédiatement informée de ces décès et a communiqué à l’ARS ces informations dès qu’elle en a eu connaissance.
– Les conditions règlementaires d’exercice de la transplantation rénale étaient respectées par le CHR-CHFG.
L’activité de greffe rénale existe depuis plus de vingt ans à La Réunion. Elle permet aux insuffisants rénaux de bénéficier d’une alternative à des traitements lourds et à vie en dialyse. Elle a débuté avec des moyens limités, bien inférieurs à ceux déployés aujourd’hui. Les conditions d’exercice de cette activité sont édictées par l’Agence de la Biomédecine et sont fixées par la réglementation. Ces conditions règlementaires étaient respectées par l’équipe de transplantation rénale du CHR-CHFG.
Les compétences et qualifications actuelles des équipes médicales et chirurgicales sont totalement conformes aux exigences réglementaires, avec notamment au moins deux chirurgiens (et deux néphrologues) ayant exercé plus de 4 ans dans un centre de greffes.
Par ailleurs, les principaux protocoles applicables à cette activité existaient bien. Ceux susceptibles de mettre en jeu la vie des patients ont bien été appliqués.
Les causes des décès et de l’explantation.
Les causes des évènements de juillet 2010 conduisant à un décès et une transplantectomie ont été analysés par les équipes concernées selon une méthode faisant référence au plan national.
En synthèse, ces expertises font apparaître, tout comme le rapport de l’Agence de la Santé, des défauts d’organisation et de moyens qui se sont manifestés simultanément sur une courte période.
Aucun de ces dysfonctionnements ne peut expliquer seul les décès ou l’explantation. Mais chacun d’entre eux doit faire l’objet d’une mesure correctrice.
- Des difficultés de programmation de la greffe rénale au bloc opératoire : Dans les deux cas, la prise en charge au bloc opératoire a du être repoussée, du fait du programme opératoire et des urgences à gérer. Si ce retard ne peut être lié au décès ou à l’explantation, elle aurait conduit à allonger la durée d’ischémie et donc le potentiel de survie du greffon à terme. De plus, du fait du nombre de praticiens greffeurs à l’heure actuelle, les chirurgiens dans les heures ouvrables (8h30 – 18h30) doivent mener de front l’activité de greffe avec leurs autres activités de spécialistes.
- Une insuffisante densité de surveillance post-opératoire pour des patients particulièrement fragiles : l’activité de greffe s’adresse le plus souvent à des patients fragiles avec de multiples comorbidités. Si le suivi en surveillance continue est l’organisation retenue dans la plupart des centres greffeurs, la volonté de renforcer le niveau de la surveillance postopératoire amène le CHFG à proposer d’autres modalités de prise en charge.
- Une équipe chirurgicale à renforcer, notamment pour ce qui concerne le versant urologique. De même, sur le plan médical, le renforcement de l’équipe de néphrologie est également nécessaire.
- Une traçabilité imprécise et incomplète des évènements survenus en période per-opératoire et un défaut de traçabilité dans les dossiers médicaux. Sans lien avec la survenue des évènements, les études ont permis de mettre en exergue les améliorations à apporter dans ce domaine dans le cadre de la prise en charge des greffes.
A cet égard, il est rappelé que le dossier médical est à la disposition des familles, et leur sera communiqué sur demande formulée dans les conditions prévues par la loi. Si des améliorations à l’organisation et de nécessaires renforcement de moyens ont été identifiés, ces études, tout comme le rapport de l’Agence de la Santé, n’ont pas constaté de faute médicale.
- Un plan d’actions visant à permettre une reprise de l’activité de greffe rénale dans des conditions de sécurité renforcées a été défini par les équipes médicales et chirurgicales du CHR-CHFG, en accord avec l’agence de biomédecine et l’agence régionale de santé.
L’ensemble des équipes participant à la prise en charge de la greffe rénale s’est mobilisé depuis la suspension afin de définir les mesures correctrices les plus urg entes à mettre en place.
Suite aux travaux réalisés et dans le prolongement des recommandations du rapport, trois grands domaines d’action se sont dégagés :
1 – L’amélioration des protocoles de prise en charge.
La greffe est une activité très complexe qui nécessité une excellente coordination entre les intervenants.
En effet, la coordination est toujours perfectible d’où le travail engagé dès septembre par les équipes du CHR FG à partir des revues morbi-mortalités réalisées par les professionnels concernés. Un groupe de travail avec le soutien de l’Agence Nationale d’Appui à la Performance a été mis en place autour d’un plan d’action en 14 items s’inspirant du projet de référentiel national élaboré par l’Agence de la Biomédecine afin de vérifier l’ensemble des procédures. L’Agence de la biomédecine s’est engagée à apporter son soutien et son expertise sur place auprès des équipes.
2 – Pour ce qui est des compétences et qualification des médecins :
Le CHR CHFG souhaite aller au-delà, en confortant les équipes chirurgicales (urologie) et médicales (néphrologie) notamment en étoffant les équipes médicales. L’ensemble des acteurs est en accord sur cet objectif depuis bien longtemps. Les recherches pour trouver des candidats sont engagées mais les difficultés de recrutement dans ces disciplines réelles pour l’ensemble de l’hospitalisation publique. En soutien, des modalités de coopération avec la clinique Sainte Clotilde sont notamment envisagées afin de conforter l’effectif d’urologie.
3 – Sur la surveillance post-opératoire :
Les conditions de prises en charge étaient conformes à l’organisation classique d’un centre greffeur (suivi post opératoire en surveillance continue).
Toutefois, afin de renforcer encore le dispositif, l’activité de greffe rénale et de suivi post-opératoire dans le cadre de la reprise est envisagée au sein de l’unité de chirurgie cardiaque et vasculaire. Ce transfert permettra de bénéficier de conditions de disponibilité au bloc, de prise en charge anesthésique et de surveillance post-opératoire relevant d’une discipline très spécialisée et d’un secteur de soins intensifs avec une surveillance médicale, paramédicale et monitoring renforcée.
Pour les enfants, la prise en charge spécifique sera organisée par les chirurgiens infantiles en lien avec la néphropédiatrie.
Un objectif partagé par le CHR, l’Agence de Santé de l’Océan Indien et l’Agence de Biomédecine : reprendre l’activité de greffe rénale dans des conditions de qualité le plus rapidement possible :
Alors que le dispositif est en place pour permettre une prise en charge en Métropole, les patients figurant actuellement sur la liste se sont très majoritairement exprimés contre cet éventuel transfert.
La reprise de la greffe rénale à la Réunion, après validation du nouveau dispositif par les professionnels de santé et les autorités, constitue donc toujours un enjeu essentiel de santé publique".