En premier lieu, nous allons évoquer le fait de la semaine : la forte mobilisation des lycéens contre la réforme des retraites. Des lycéens mobilisés, des manifestations parfois émaillées d’incidents. Manifestations qui se sont poursuivies malgré l’adoption définitive du texte par les parlementaires mercredi dernier. Sur ce dossier, vous vous situez comment ?
Vous êtes pour la retraite à 62 ans ?
Nassimah Dindar : Je crois qu’aujourd’hui, la réforme des retraites est reconnue. Elle devient inéluctable. Le système par répartition connaît ses limites et les connaitra dans les années à venir. Il n’y aura plus suffisamment d’actifs pour cotiser et payer les retraites. Pour autant, à la Réunion : nous savons qu’il y a déjà des difficultés financières pour celles et ceux qui touchent de petites retraites, la vie étant plus chère à la Réunion. Et moi, je comprends tout à fait les interrogations, les doutes et les inquiétudes sur l’avenir concernant ces jeunes qui connaissent déjà l’incertitude de pouvoir trouver un emploi demain. Au fond, la véritable question à se poser quand on voit des jeunes Réunionnais dans la rue, c’est l’avenir des DOM et de la Réunion : il y a aujourd’hui de véritables interrogations quant à notre avenir. Et surtout, nous avons très peur qu’en période de crise, nous ne soyons plus la priorité pour la France métropolitaine.
Donc, vous comprenez les incertitudes mais vous soutenez cette réforme qui est une mesure phare du quinquennat de Nicolas Sarkozy ?
Nassimah Dindar : Non, je ne parle pas du quinquennat et des engagements ou des non-engagements de ce mandat. Je veux surtout parler de la Réunion et de la nécessité des élus - comme des citoyens - de se dire qu’il faut malgré tout trouver une solution pérenne. Le politique au fond, il doit non seulement vivre le présent mais il doit aussi et surtout préparer l’avenir.
Ce sont des mesures qui sont aujourd’hui nécessaires au niveau européen, par rapport au système de cotisations. De toute évidence, il faut véritablement revoir ce système. Mais j’ai aussi envie de dire que certains voudront travailler plus longtemps : c’est le choix qu’il faut laisser aux uns et aux autres. C’est surtout le choix imposé qui est souvent contesté.
En mai 2012 lors des prochaines élections présidentielles, vous pensez que ce mouvement de contestation pourrait influencer de manière négative la possible candidature de l’actuel président de la République, Nicolas Sarkozy ?
Nassimah Dindar : A chaque campagne électorale, présidentielles ou non, il y a des candidats de droite, de gauche et du centre.
Selon vous, quel est le meilleur candidat pour les présidentielles ?
Nassimah Dindar : Je laisse d’abord les candidats se déclarer.
A ce jour et sans langue de bois, quel serait votre choix : Nicolas Sarkozy, Martine Aubry, Dominique Strauss Khan, Dominique de Villepin ?
Nassimah Dindar : Je crois qu’on a souvent tendance à poser la candidature ou le choix d’un candidat par rapport à un nom. Et avant toute chose, on choisit de soutenir un candidat ou un autre, selon un programme, c’est comme cela qu’on se décide. Moi, tout le monde le sait : j’ai choisi il y a quelques années de soutenir le candidat Nicolas Sarkozy, sur le choix d’un programme. Après, il y a la lecture de chacun par rapport à ce bilan de programme et nous n’en sommes pas encore là.
Justement, le président a passé trois ans à l’Elysée : Nicolas Sarkozy a-t’-il répondu aux attentes que vous aviez placé en lui ?
Nassimah Dindar : Moi, j’ai surtout apporté ma contribution par rapport au programme lié aux grands discours sur la diversité. J’ai toujours défendu la France de l’Outre Mer et la France diverse parce que je crois qu’elle est une richesse. Et ce qui se joue ici, à la Réunion, dans ce département si divers et si français, le pan de ce programme m’avait véritablement interpellé. Moi, j’avais lu le livre de Nicolas Sarkozy sur la place des religions, la place des différentes communautés au sein de la République avec le socle républicain. C’est ce programme-là qui m’avait interpellé et c’est ce programme-là que j’ai défendu.
Aujourd’hui sans langue de bois, il y a des choses qui se font et que je n’approuve pas. Mais ne croyez pas que je cache à qui que ce soit quand je ne suis pas d’accord, sur l’aspect très sécuritaire ou l’aspect très inquiétant par rapport à ce que nous sommes. Je suis et je reste une Française de la diversité et je ne peux que défendre l’option que j’ai sur cette égalité la plus large et la plus fraternelle avec le socle républicain au travers de la richesse ultra marine.
Aujourd’hui, je le répète : en tant qu’élue réunionnaise, j’ai peur que nous ne soyons plus la priorité en raison de la crise. Parfois, l’hexagone a tendance à se replier et n’a pas envie de nous voir tel que nous sommes, c’est à dire une richesse et un atout supplémentaire.
Ce qui nous ramène à une autre inquiétude pour vous, en tant que présidente du conseil général : vous prévoyez un déséquilibre budgétaire pour le Département en 2015 ?
Nassimah Dindar : Nous revenons du congrès de l’ADF où l’ensemble des présidents de conseils généraux - de droite et de gauche - étaient présents. Nous avons fait le constat que nous n’aurons plus les moyens financiers nécessaires pour payer ce que nous payons à l’heure actuelle. C’est à dire le RMI, l’allocation pour les personnes porteuses de handicapes et l’allocation pour les personnes âgées. Ce sont les trois grandes prestations de solidarité nationale. Nous voulons au conseil général de la Réunion continuer à les payer. Mais nous avons des craintes justement sur la non-péréquation, la non-compensation aujourd’hui que l’Etat fait. Cette inquiétude qui existe en France métropolitaine est plus fortement ressentie à la Réunion parce que le public précaire est plus important (...).
Dans ce contexte, comment envisagez-vous le passage au RSA en lieu et place du RMI ?
Nassimah Dindar : Nous ferons le RSA. C’est une mesure qui va apporter un plus à ceux qui touchent des petits salaires ou à ceux qui sont à mi-temps. Nous ferons tout pour que le RSA soit appliqué au 1er janvier 2011.
Mais quand on est responsable on doit tirer la sonnette d’alarme, en s’adressant directement au Gouvernement. J’ai remis au Premier Ministre François Fillon,des requêtes pour que le Gouvernement tienne compte de la situation d’urgence sociale dans laquelle nous nous trouvons à la Réunion.Est-ce que vous croyez sincèrement que nous pouvons dire aux jeunes Réunionnais : peut-être que vous serez condamner à l’exil et qu’en passant des diplômes, vous n’êtes même pas sûrs de pouvoir revenir à la Réunion.
Sur le plan politique : on en vient maintenant aux élections cantonales. Certains disent qu’elles sont jouées d’avance. Est-ce que vous partagez cette opinion ?
Nassimah Dindar : Aucune élection n’est gagnée d’avance. Je crois que ce sont les électeurs qui décident qui doit être mis en place. Il faut laisser les électeurs trancher, voter.
Et si la gauche reste majoritaire, vous pensez pouvoir conserver votre poste de présidente ?
Nassimah Dindar : Il n’y a pas à se dire qu’on va conserver un poste de président. Il y a aujourd’hui une majorité qui a fait du travail, qui mené à terme les projets de gestion et d’actions. Cette majorité n’a pas démérité et elle dira, elle, si moi j’ai démérité ou pas.
Si on vous demande de ne pas renouveler votre carte UMP pour conserver votre poste de présidente, vous le feriez ?
Nassimah Dindar : Par exemple, je n’ai pas renouvelé ma carte UMP cette année, de manière claire. Parce que je ne me reconnais pas du tout dans l’UMP de Monsieur Simonetti, chargé de mission national qui vient ici sur la Fédération, qui est l’UMP de Didier Robert, qui est dans mon opposition puisque ses conseillers généraux sont dans mon opposition. Je me reconnais dans le combat qu’on prend pour travailler, pour faire avancer la Réunion et les Réunionnais, pour aider ceux qui en ont le plus besoin. Je le dis sans langue de bois : aujourd’hui, si nous voulons défendre la Réunion, tous les élus - de gauche, de droite, du centre (...) - doivent dire à a France métropolitaine de ne pas laisser tomber les DOM parce que nous avons besoin des aides - de la France et de l’Europe - au moins jusqu’en 2030.
Dans l’actualité cette semaine, il a été question de cette nouvelle querelle entre le Département et la Région sur le Trans Eco Express. Nassimah Dindar, on a parfois le sentiment que tous les prétextes sont bons pour vous faire la guerre ?
Nassimah Dindar : Non, moi je crois surtout que les Réunionnais n’attendent pas de nous une bataille de coqs ou une guerre. Et ceux qui ont gagné une victoire, il ne faut pas absolument qu’ils fassent en sorte que leur victoire soit une défaite pour les autres (...).
Le transport est un dossier très important pour la Réunion : toutes les collectivités ne sont-elles pas invitées à participer à la réflexion ?
Nassimah Dindar : On doit absolument réfléchir ensemble sur ce dossier. Aujourd’hui, nous ne sommes pas contre ce projet. Je suis très favorable à ce que la Région Réunion aide les communautés de communes ou les AOT à mettre en place des bus. Nous avons actuellement 1000 bus à la Réunion, Didier Robert veut en mettre 2000 de plus. C’est son droit et il faut lui laisse ce droit. Simplement, ce que nous voulons savoir, c’est le contenu du projet.
Au fond, qu’est-ce qui intéresse les Réunionnais ? C’est de savoir quel est le meilleur mode de transport pour aujourd’hui et pour demain à la Réunion. Mon choix personnel, c’est celui du mode ferrée. Tous les pays du monde disent qu’il faut soit un train, soit un tram. Le président de la Région propose de mettre en place plus de bus, c’est son droit (...). Pour moi, le meilleur mode de transport pour la Réunion, c’est la voie ferrée.
Retrouvez l’intégralité de cet interview dans la vidéo ci-jointe mais également une série de questions décalées ainsi qu’une séquence photos !