Remplaçante depuis des années dans un cabinet d’infirmières de Saint-Denis, Mireille* a pu faire une longue carrière en toute illégalité. Elle a été condamnée ainsi que l’infirmière titulaire du cabinet qui jure pourtant ne pas avoir été au courant.
Infirmière, assistante sociale ou encore psychologue du travail : Mireille a exercé plusieurs métiers dans le domaine de la santé sans aucun diplôme. Pour des établissements publics ou privés, d’abord en Hexagone puis à La Réunion.
L’escroc vendait également des médicaments de contrebande, importés de Corée du Sud, à des pharmaciens et médecins de notre île. Sa “carrière” de 40 ans a pris fin lorsque les douanes ont découvert ces produits illégaux. Pendant son procès en première instance, elle a été condamnée à 18 mois de prison dont neuf ferme. Elle aurait depuis disparu de la circulation.
Ses employeuses condamnées
Mais lors de ce procès, elle n’était pas la seule prévenue, car Mireille a exercé pendant de nombreuses années dans un cabinet d’infirmières de Saint-Denis. L’ancienne titulaire du cabinet ainsi que la jeune repreneuse ont elles aussi été condamnées.
Charlotte*, 31 ans et actuelle propriétaire du cabinet a fait appel. Reconnue coupable “d’escroquerie faite au préjudice d’un organisme de protection sociale pour l’obtention d’une allocation ou prestation indue”, la caisse générale de sécurité sociale de La Réunion lui réclame la somme conséquente de près de 119 000 euros. Un montant qui correspond aux sommes versées par la sécu au cabinet pour les actes de soins réalisées par Mireille. Charlotte assure avoir versé l’argent à l’intéressée, comme pour n’importe quelle autre remplaçante.
La jeune infirmière plaide sa bonne foi. Lorsqu’elle a repris le cabinet, qu’elle connaissait pour y avoir travaillé, elle a conservé le fonctionnement mis en place par l’ancienne titulaire, partie à la retraite en 2020. La jeune infirmière est alors enceinte et confrontée à la crise COVID.
La présence de Mireille, remplaçante depuis des années et appréciée de la patientèle, n’a pas été remise en cause. “Pour moi, les documents avaient déjà été faits et personne ne s’est jamais plaint de son travail”. Or l’escroc n’avait pas de contrat de remplacement. Elle avait produit de faux diplômes et une fausse carte professionnelle.
L’infirmière titulaire assure qu’elle n’était pas au courant
Charlotte assure avoir découvert le pot aux roses quand les gendarmes l’ont appelée au cours de leur enquête. Elle a collaboré et remis tous ses documents comptables aux militaires. Pour son avocate, Me Léopoldine Settama-Vidon, “personne ne peut prouver sa connaissance de la non-qualification de [Mireille]”.
“[Mireille] est condamnée pour la première fois de sa vie après 40 ans de bons et loyaux services dans l’escroquerie. Et toutes ces années on va les imputer à cette jeune personne”, dénonce la robe noire.
Le jugement sera connu le 27 février prochain. “Si vous entrez en voie de condamnation, nous ferons un pourvoi en cassation”, prévient l’avocate de la défense.
*Prénom d’emprunt
Philippine Kauffmann