Jovany Fenelon et son épouse ont été condamnés à 3 ans de prison dont deux avec sursis. Des manquements à la sécurité sur un de leur chantier avait été constaté, suite au décès d’un de leurs ouvriers. Le 15 février 2016, dans une tranchée, il s’était retrouvé enseveli.
La victime du grave accident survenu le lundi 15 février 2016 revit encore ce drame. Il se retourne, vers les trois prévenus, et leur adresse la parole. "C’est mal ce que vous avez fait", lâche-t-il à l’audience devant le tribunal correctionnel de ce vendredi. "Je n’arrive pas à oublier. Je n’aurais jamais dû être à cet endroit, à ce moment".
Ce jour-là, avec son "frère", son camarade de travail, il s’est retrouvé dans une tranchée de quatre mètres de profondeur, chemin de la Grotte, à la Bretagne. Le chantier concerne un système de rejet des eaux. Des kilos de terre se sont écroulées et ont recouvert les malheureux. L’un d’eux a perdu la vie. L’autre est marqué à vie et souffre du syndrome du survivant. "Ce sont des frères qu’on envoie à la mort, souligne l’avocat des parties civiles, Me Rémi Boniface. Il y a des accidents mortels qui sont purement accidentels. D’autres sont criminels pas de le sens que l’accident est voulu. Ici, il a été voulu de ne rien faire pour empêcher un mort".
Les investigations démontreront de graves manquements à la sécurité et l’absence de blindage sur de nombreux chantiers. L’entreprise, avant le tragique éboulement, avait déjà été alertée à plusieurs reprises par l’inspection du travail."Ces ouvriers étaient de la chair à béton, comme des fourmis qui sont envoyées à la casse. Il n’y avait aucun matériel de sécurité et aucune formation à ce niveau, avance Domitile Descampiaux, pour le parquet. Il y a des fautes grossières et manifestes, juste pour aller plus vite, gagner des marchés et donc faire du profit". La parquetière requiert des peines mixtes et un mandat de dépôt pour la partie ferme.
Plus de cinq ans, après les faits, l’émotion est encore vive. La famille du malheureux ouvrier, âge de 34 ans à l’époque, est venue chercher des réponses.
À la barre du tribunal, Jovany Fenelon, son épouse et son frère doivent apporter des explications. Il n’en sera rien. Ils présentent des excuses mais sont loin d’assumer. Jugés pour homicide involontaire, la gérante de fait, l’épouse précise s’occuper du côté administratif. Son mari, le vice-président de la l’entreprise Fenelon parle "d’un manque de retour d’informations". Son avocat, le bâtonnier, Georges-André Hoarau, plaide donc logiquement la relaxe. Les nombreux témoignages le contredisent, affirmant qu’il était le véritable gérant. "Si vous suivez les réquisitions, un enfant va se retrouver avec deux parents en prison, 50 pères de familles vont se trouver au chômage et la société avec cette amende se retrouvera en liquidation judiciaire", plaide la robe noire.
La justice reproche au troisième d’avoir menacé l’ouvrier encore en vie, à sa sortie du tribunal. Le frère de Jovany dit avoir agi "par peur".
Après avoir délibéré, le tribunal a condamné le couple à la même peine, à savoir 3 ans de prison dont deux avec sursis. Pour la partie ferme, ils bénéficieront d’un bracelet électronique.
La société devra s’acquitter d’une amende de 80 000 €. Pour le troisième prévenu, les faits ont été requalifiés pour subordination de témoins. Il écope de six mois avec sursis.