Le label "fait maison", censé permettre aux consommateurs d’être mieux informés sur ce qui compose leur assiette dans les restaurants, entre en vigueur ce mardi 15 juillet. Dans l’île, les professionnels sont loin d’être convaincus.
Le décret est paru dimanche au Journal Officiel et est entré en application mardi 15 juillet. Les restaurateurs, qui proposent sur leurs cartes des plats entièrement réalisés par leurs soins, pourront arborer le label "Fait maison" sur leur devanture et dans leurs menus.
Si sur le papier, le label constitue une opportunité pour les professionnels de la restauration de se distinguer, dans les faits, son application et ses conditions font déjà débat.
Un plat estampillé "fait maison", est un plat composé de produits cuisinés sur place, de A à Z. Des produits bruts n’ayant subi aucune modification majeure.
Des produits comme les légumes crus préalablement râpés, coupés ou tranchés, les morceaux de viande désossés et de poisson déjà nettoyés peuvent ainsi prétendre au label.
La pomme de terre ne peut pas en dire autant. Précoupées ou sous forme de frites surgelées, elles n’auront pas leur place dans la liste des plats "faits maison". Les produits réfrigérés, congelés, surgelés, conditionnés sous vide pourront en revanche entrer dans la composition des plats distingués. Impératif : le label ne s’applique que si les plats ont été préparés dans les locaux du restaurateur, sur le lieux de vente.
Une exception est toutefois prévue pour les traiteurs organisateurs de réceptions et les commerces ambulants.
Le label absent à La Réunion
Pour un dispositif supposé éclaircir les doutes des consommateurs sur la provenance des produits servis, les paramètres pris en compte semblent plutôt relever du casse-tête chinois. Difficile également pour les restaurateurs de s’y retrouver.
Selon Philippe Doki-Thonon, le label a du bon, "sur le principe". Le directeur de l’Union des métiers et des Industries de l’hôtellerie (UMIH) estime cependant qu’il n’a pas tout à fait sa place à La Réunion.
Si en métropole, les restaurateurs ont la possibilité d’acheter une multitude de produits préparés chez des grossistes, dans l’île, la provenance des ingrédients n’est pas sujette à polémique. Un paramètre qui explique en partie l’absence du label dans l’île pour le moment.
Philippe Doki-Thonon déplore par ailleurs le manque de reconnaissance du statut d’artisan-cuisinier, plus valorisant que des plat labellisés selon le professionnel.
La frite reste en travers de la gorge
Faire partie d’un label implique également des responsabilités. Les restaurants qui en feront la demande, devront veiller à garantir du "fait maison". Les établissements labellisés seront contrôlés dès le début de l’année prochaine.
Pour Jacques-Yves Lucas, responsable du restaurant le Grand Baie à Saint-Paul, le jeu n’en vaut peut-être pas la chandelle. Si une grande majorité des produits servis par l’établissement peuvent prétendre au label, ceux qui resteraient sur le carreau pourraient impacter négativement les menus. Là encore, la pomme de terre coince.
Le restaurant sert en effet, et sans s’en cacher, des frites surgelées. Le client aurait sous les yeux des plats estampillés "Fait maison" et d’autres non, l’attrait de la carte pourrait en pâtir. La distinction se transformerait ainsi en frein à la consommation. Avec des règles strictes, des produits qui doivent être décortiqués, pas sûr que les menus soient de sitôt épluchés.