La Commissaire européenne Viviane Reding, a critiqué le gouvernement français mardi 14 septembre pour son manque de franchise concernant le dossier des Roms. Elle a ouvertement agité la menace des sanctions contre la France pour violation de la liberté d’établissement et de circulation des citoyens européens.
"J’ai été personnellement interpellée par des circonstances qui donnent l’impression que des personnes sont renvoyées d’un Etat membre (de l’UE) juste parce qu’elles appartiennent à une certaine minorité ethnique. Je pensais que l’Europe ne serait plus le témoin de ce genre de situation après la Deuxième Guerre mondiale", a-t-elle lancé au cours d’une conférence de presse. Et à elle d’ajouter que "les discriminations ethniques ou raciales n’ont pas leur place en Europe". "Personnellement, je suis convaincue que la Commission ne va pas avoir d’autre choix que de lancer une procédure d’infraction contre la France pour non respect de la législation de l’UE ", a-t-elle annoncé.
En clair, Viviane Reding a pointé du doigt la dissimulation d’une circulaire visant expressément l’expulsion des Roms. Le document administratif dont il est question ici avait été émis par le ministère de l’Intérieur depuis le 5 août, mais son existence n’a été révélée que la semaine dernière. Elle demandait explicitement aux préfets d’évacuer en priorité les campements des Roms. “300 campements ou implantations illicites devront avoir été évacués d’ici trois mois, en priorité ceux des Roms.”, avait recommandé la circulaire dite de la " honte ".
"Il est choquant qu’une partie du gouvernement français vienne à Bruxelles dire des choses et qu’une autre partie du gouvernement fasse le contraire", a déploré la commissaire. "C’est une honte. Trop c’est trop ! Ma patience a atteint ses limites", a-t-elle martelé. Visiblement, Mme Reding ne décolère pas malgré la modification de la controversée circulaire ciblant les Roms.
Face à la polémique grandissante, le ministre de l’Intérieur Brice Hortefeux a en effet signé lundi un nouveau texte dépourvu de toute interprétation discriminatoire. La nouvelle circulaire demande alors aux préfets de " poursuivre " les évacuations de campements illicites " quels qu’en soient les occupants ", sans citer nommément les Roms.
Par conséquent, l’Elysée juge aujourd’hui "inacceptables" les critiques de la commissaire européenne Viviane Reding sur la situation des Roms en France.
Pour sa part, le secrétaire d’Etat chargé des Affaires européennes, Pierre Lellouche, estime "pas convenable" le "dérapage" de Viviane Reding. "Ce genre de dérapage auquel elle a ajouté sa voix, ça n’est pas convenable", a-t-il déclaré à la radio RTL.
"Le ton qu’elle a pris sur le thème ‘ça suffit, ma patience a des limites’, ça n’est pas comme cela que l’on s’adresse à un grand Etat", a-t-il ajouté.
De son côté, le secrétaire d’Etat au Logement, Benoist Apparu, partage la même indignation. "La Commission européenne, de mon point de vue, va trop loin. On n’a pas besoin là encore de faire référence au passé, aux années 40 au regard de ce qui se passe aujourd’hui", a-t-il fustigé à la radio RMC. "Des erreurs, ça arrive. C’est pas le drame du siècle et il n’y a pas besoin d’en faire une affaire européenne", a-t-il estimé. "On n’a ni dissimulé, ni menti. La circulaire existait. Il y a eu une erreur, et elle a été corrigée. Point. Terminé.", a-t-il lancé.
Sur un ton plus conciliant, le ministre de l’Immigration et de l’Identité nationale, Eric Besson, tente quant à lui de calmer le jeu. "La France n’a procédé à aucune reconduite volontaire ou forcée sur une base ethnique. Elle respecte la Commission dans son rôle de gardienne des traités. Nous avons répondu à toutes ses questions et nous recommencerons si nécessaire", a-t-il indiqué.