La bataille de la retraite à 60 ans, qui n’a pas vraiment commencé, culminera en septembre, prédisent les syndicats au lendemain de manifestations d’ampleur, mais insuffisantes pour stopper la campagne gouvernementale pour le recul de l’âge légal.
PARIS (AFP) - La bataille de la retraite à 60 ans, qui n’a pas vraiment commencé, culminera en septembre, prédisent les syndicats au lendemain de manifestations d’ampleur, mais insuffisantes pour stopper la campagne gouvernementale pour le recul de l’âge légal.
Le gouvernement s’est senti conforté par la journée de jeudi (de 395.000 à un million de manifestants, selon les sources), son porte-parole Luc Chatel parlant d’une "faible mobilisation" qui "vient valider la méthode du gouvernement". Une participation qui "n’a rien à voir" avec celle des cortèges de l’hiver 2009, selon le conseiller social de Nicolas Sarkozy Raymond Soubie, cité par Le Figaro.
Mais comme s’il savait que la partie n’est pas encore gagnée, le Premier ministre François Fillon a souligné que "toute mobilisation est importante".
Pour le leader de la CGT Bernard Thibault, "si le gouvernement était si sûr de lui, il n’aurait pas tergiversé plusieurs semaines pour annoncer la couleur, il n’attendrait pas la veille des départs en congés pour présenter son texte de loi".
Responsable du syndicat Solidaires, Pierre Khalfa reconnaît qu’"il n’y a pas eu de saut qualitatif" en termes d’affluence aux cortèges de jeudi, un peu supérieure à la précédente journée du 23 mars. "On est dans un processus de montée lente de la mobilisation. Mais il y a une montée".
François Chérèque, de la CFDT, observe que cette journée d’action survenait "simplement 36 heures après l’annonce du gouvernement" du recul de l’âge légal. "Quelques jours après les prémices de l’annonce de la réforme", confirme le secrétaire d’Etat Georges Tron.
La résignation habite l’esprit d’une partie des Français, admettent des syndicalistes. "Le plus difficile pour les syndicats, c’est le fatalisme par rapport au prolongement de la durée de cotisation", confie François Chérèque. Pierre Khalfa mentionne "le poids de la crise, très important".
"Pour l’instant, la forte hostilité qu’on voit dans les sondages ne s’est pas traduite dans la rue dans les mêmes termes", commente le chercheur en sciences politiques Philippe Braud. "C’est le côté paradoxal, les gens disent qu’il sont opposés à la fin de la retraite à 60 ans, mais en même temps ils s’y résignent", souligne-t-il.
Mais selon M. Chérèque, "quand les salariés vont intégrer les conséquences de la réforme, ils vont réagir". Et de rappeler que les syndicats ont "obtenu le retrait du CPE après l’adoption de la loi".
Les syndicats misent donc sur les trois mois qui les séparent du début de l’examen de la réforme au parlement pour "faire de la pédagogie". La CGT dit préparer "ce qu’elle va faire cet été" à cet égard. L’idée d’"une étape pour la retraite", en marge du Tour de France cycliste, est dans l’air.
"Le véritable moment d’affrontement aura lieu en septembre", estime M. Khalfa. "Il faut créer les conditions pour peser en septembre", renchérit Eric Aubin, proche de Bernard Thibault.
Pour "donner de la lisibilité aux salariés", les deux hommes se disent partisans d’annoncer "avant les congés" une grande journée de mobilisation sur les retraites dans la première quinzaine de septembre. L’intersyndicale se réunit lundi pour en parler.
D’ici là, les syndicats ont "un problème de calendrier", la tenue du congrès de la CFDT (7-11 juin) compliquant l’organisation d’initiatives en juin, surtout si, spéculent des syndicalistes, le gouvernement décale à la fin de ce mois l’annonce détaillée de la réforme, prévue autour du 20.
D’ici là, l’exécutif continue d’avancer ses pions. Pour la première fois depuis l’annonce du report de l’âge légal, Eric Woerth a évoqué vendredi "62, 63" ans mais aussi "61 ans". Autre première, il a confirmé que l’âge de la retraite à taux plein (65 ans) reculerait également.