Avocats et policiers ont fait match nul mercredi dans le conflit judiciaire les opposant à Paris sur la garde à vue, les premiers étant déboutés face au syndicat Synergie Officiers tout en obtenant la condamnation d’un responsable de ce syndicat pour propos "offensants".
PARIS (AFP) - Avocats et policiers ont fait match nul mercredi dans le conflit judiciaire les opposant à Paris sur la garde à vue, les premiers étant déboutés face au syndicat Synergie Officiers tout en obtenant la condamnation d’un responsable de ce syndicat pour propos "offensants".
Après des mois de bagarre médiatique entre les deux corps, fin mars, les débats avaient fini dans le prétoire. En question : des propos considérés comme "gravement outrageants à l’égard de la profession d’avocat" tenus par le deuxième syndicat d’officiers de police, Synergie Officiers.
Dans un tract diffusé en novembre et intitulé "Gardes à vue illégales : campagne publicitaire des avocats !", le syndicat redisait son opposition à la présence de l’avocat en garde à vue et affirmait ne pas avoir "de leçons d’intégrité à recevoir de la part de commerciaux dont les compétences en matière pénale sont proportionnelles aux montants des honoraires perçus".
Quelques jours plus tard, le secrétaire général adjoint du syndicat, Patrice Ribeiro, avait lui aussi brocardé "l’offensive marchande des avocats". Il mettait également en cause la déontologie des avocats.
Outrés, les avocats avaient porté l’affaire devant le tribunal de grande instance de Paris.
Dans le dossier concernant Synergie Officiers, la 17e chambre civile les a finalement déboutés, une décision dont se "félicitait" mercredi leur avocat, Me Thibault de Montbrial.
"Si les avocats n’exercent pas une profession commerciale et si ce n’est pas l’assistance aux gardés à vue qui leur permet de s’enrichir, leur métier consiste bien à défendre les intérêts particuliers", a tenu à rappeler le tribunal.
Il a donc considéré que, "malgré leur ton vif et leur caractère réducteur, les propos poursuivis, tenus par un syndicat professionnel dans le cadre d’un débat public d’intérêt général, ne dépass(ai)ent pas les limites admissibles de la liberté d’expression et du droit de critique autorisé dans le contexte polémique litigieux".
En revanche, les magistrats ont jugé que Patrice Ribeiro s’était exprimé sur RTL "de façon caricaturale et outrancière (...) en accusant les avocats de ne vouloir intervenir en garde à vue que pour des raisons financières et en les suspectant sans nuance de pouvoir commettre de graves manquements à leur déontologie".
En "brossant un portrait uniquement négatif de la profession, sans évoquer le moindre avantage lié à la présence de l’avocat lors de la garde à vue", le syndicaliste a "dépassé les limites".
Pour réparer "cette faute délictuelle", elle l’a condamné à verser un euro de dommages et intérêts à l’Ordre des avocats.
A l’audience, plus que l’appât du gain reproché par les policiers aux avocats, ce sont les conditions de la garde à vue à la française qui avaient nourri la discussion.
A cet égard, le tribunal note qu’il ressort des dépositions des témoins que "le nombre de gardes à vue a considérablement augmenté, qu’elles sont parfois inutiles, insuffisamment contrôlées, souvent humiliantes" et qu’"une réforme de la garde à vue ne pourra que prendre en compte une assistance accrue de l’avocat".
A l’audience, le directeur général de la Police nationale (DGPN), Frédéric Péchenard, s’était lui-même déplacé pour soutenir ses troupes et défendre la garde à vue à la française.