Une secte suspectée de mauvais traitements sur les enfants a été la cible d’une enquête. Dix responsables de la communauté "Tabitha’s Place" étaient en garde à vue mardi soir près de Pau dans les Pyrénées-Atlantiques.
Depuis plus de trente ans, une étrange communauté appelée "Tabitha’s Place" ou "Ordre apostolique" voire "Douze tribus" réside à Sus, une petite commune des Pyrénées-Atlantiques.
Une communauté vivant à l’écart de la société moderne
Cette communauté considérée comme une secte apocalyptique depuis un rapport de 1995 de la commission d’enquête parlementaire sur les sectes regroupe 120 personnes, dont une cinquantaine d’enfants, lesquels vivent en quasi autarcie dans le manoir de Navarrenx. D’après Georges Fenech, ancien président de la Mission interministérielle de vigilance et de lutte contre les dérives sectaires (Miviludes) qui a pu entrer dans ce domaine, les habitants de ce château appliquent à la lettre les enseignements de la Bible. "Les hommes portent des chignons, les femmes de longues robes et des cheveux longs. Un peu comme les Amish" en Amérique du Nord, qui vivent à l’écart de la société moderne, a décrit Georges Fenech.
Maltraitance des enfants
Alors qu’un ancien membre de cette secte a depuis plus d’un an vendu la mèche en divulguant des informations sur la communauté, "Tabitha’s Place" est désormais sous le coup d’une information judiciaire. Les enquêteurs se penchent particulièrement sur les conditions de vie des mineurs qui "sont éduqués et participent à l’activité économique de la communauté", a indiqué le procureur de la République de Pau, Jean-Christophe Muller, lors d’une conférence de presse ce mardi.
Outre le manque de soins, Georges Fenech a confié que les mineurs, qui ne sont pas scolarisés souffrent de troubles de la personnalité et ignorent tout du monde extérieur. Les enfants sont confrontés à un quotidien très rude entre les enseignements, les interdictions de jouer et l’obligation d’aider les parents au travail. Pire encore, "les punitions physiques sont réglementées et graduées" avec des coups de baguette d’osier ou de règle sur différentes parties du corps, a expliqué la Miviludes.
Des mineurs auditionnés et examinés par des médecins-légistes
Après de longues vérifications, une vaste opération de gendarmerie a été menée dans la nuit de lundi à mardi contre le château de la communauté. Quelques 200 gendarmes, un hélicoptère ainsi que l’Institut de recherche criminelle et des médecins-légistes sont intervenus sur place. Mardi soir, dix personnes, dont des hommes et des femmes responsables de la communauté, étaient placés en garde à vue, a révélé le procureur de Pau. Plusieurs mineurs, présents lors de l’opération ont été entendus et examinés par des médecins. Quatre d’entre eux, frères et sœurs d’une même famille âgés de 18 mois à 13 ans, ont été installés auprès des services sociaux du conseil départemental après que des "traces récentes de corrections physiques" ont été découvertes sur leurs corps, a précisé le procureur Jean-Christophe Muller.
La secte déjà dans le collimateur de la justice
Cette communauté était déjà la cible de condamnations, en avril 1997, après le décès d’un enfant de 19 mois qui était privé de nourriture et de soins. Ses parents étaient condamnés en octobre 2001 à douze ans de réclusion criminelle et dix ans de privation de droits civiques et familiaux par la cour d’assises d’appel des Hautes-Pyrénées. Par ailleurs, dix-neuf membres de la communauté "Tabitha’s Place" étaient condamnés en mars 2002, par la cour d’appel de Pau pour "soustraction aux obligations légales des parents", en particulier la scolarisation et la vaccination des enfants.
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