Après les chiffres donnés par Manuel Valls ce lundi sur l’ampleur du phénomène en France, Mathieu Guidère, spécialiste des mouvements djihadistes fait le point dans une interview signée 20 Minutes.
Les chiffres sortis par Manuel Valls évoquent une menace toujours aussi lourde annonçant 1 400 personnes en France identifiées comme étant en relation avec les filières djihadistes de Syrie ou d’Irak. Interrogé par 20 Minutes, Mathieu Guidère, spécialiste des mouvements djihadistes, explique les raisons pour lesquelles leur nombre a presque triplé en un an.
Une énorme progression de Français impliqués dans le jihad
Pour expliquer l’énorme progression du nombre de Français impliqués dans le jihad (entre 555 et 1 400 en un an), Mathieu Guidère parle d’un "effet essentiellement mimétique". Plus les gens entendent parler des djihadistes français dans les médias, plus ils ont décidé de les copier.
Possédant des profils variés, les Français impliqués dans le jihad sont en général des jeunes âgés de moins de 30 ans. En ce qui concerne le départ de famille qui date de 2014, Mr Guidère précise que les familles partent faire leur Hijra (émigration d’un musulman d’une terre de "mécréance" vers un pays musulman). L’organisation Etat islamique fait tout pour les attirer en leur attribuant un logement et une allocation d’aide à l’installation de 700 à 800 euros par mois et une inscription des enfants dans une école coranique dès leur arrivée en Syrie.
Premier pays européen visé pour le recrutement d’apprentis djihadistes
Alors que le recrutement de djihadistes français a augmenté depuis les attentats terroristes de janvier, Mathieu Guidère a mentionné que "la France est le premier pays d’Europe visé pour le recrutement d’apprentis djihadistes." L’invité de 20 Minutes a mis en avant la multiplication des campagnes de communication. En argumentant sur la republication des caricatures de Mahomet, les djihadistes en profitent pour appeler au départ pour la Syrie. D’autant plus que les Français déjà sur place tentent de convaincre ceux qui pensent venir à part les argumentaires des représentants de l’organisation Etat Islamique.
"Ce sont des vases communicants"
Avec l’application de la loi antiterroriste depuis le 1er janvier, une lueur d’espoir apparait au bout du tunnel car une dizaine de personnes ont été empêchées de sortir du territoire. Mais, il reste encore du travail à faire avec ceux qui arrivent quand même à partir en multipliant les transits avant la Syrie. D’autant plus que "la France n’a pas le pouvoir de fermer des sites Internet ouverts en Turquie ou au Bangladesh" a précisé le spécialiste qui ajoute qu’"elle doit également convaincre Facebook et Twitter de fermer certaines pages, c’est un travail de titan, qui a ses limites."
Enfin, Mathieu Guidère a rassuré que le nombre de Français partant faire le djihad peut diminuer. Sur ce dernier point, il a toutefois mis en garde contre la pression sur le départ de ces apprentis djihadistes qui pourrait augmenter les risques d’attentats par des personnes qui n’ont pas pu quitter le pays ou par ceux qui y sont retournés. "Ce sont des vases communicants", a-t-il conclu.