Pour la première fois, l’ancien n° 2 de la police judiciaire lyonnaise, Michel Neyret, a été entendu par deux juges parisiens mardi 20 décembre, rapporte Le Monde. Une occasion pour ce commissaire, suspendu de ses fonctions, de s’expliquer sur l’affaire de corruption pour laquelle il a été mise en examen le 3 octobre dernier.
Ecroué à la prison de la
Santé à Paris depuis sa mise en examen en octobre, Michel Neyret a été entendu par les juges, mardi, pendant plus de quatre heures. Une nouvelle audition est encore à prévoir pour janvier prochain, selon ses avocats.
Selon les déclarations d’Yves Sauveyre, l’un de ses avocats lyonnais, ce commissaire attendait impatiemment cette audition qui lui permettrait de s’expliquer sur les faits qui lui sont reprochés. « Les choses se sont passées correctement avec le magistrat instructeur qui était ferme : on ne nous a pas offert le thé, c’est évident. Mais Michel Neyret était satisfait, d’ avoir pu s’expliquer, et soulagé », a-t-il annoncé à l’issue de l’audition.
Me Sauveyre avait également indiqué que, selon ses recommandations, son client continuait d’affirmer qu’il n’avait pas bénéficié d’enrichissement personnel pendant son entretien avec les juges. « Qu’il y ait pu y avoir des imprudences, on s’explique là dessus, (mais) qu’il y ait eu monnayage, argent comptant espèces sonnantes et trébuchantes contre des services, jamais au grand jamais », a –t- il martelé à la presse.
Selon encore les deux avocats de Neyret, les deux juges d’instruction ont présenté de nouveaux éléments, notamment des écoutes téléphoniques. Des données qu’ils affirment ne pas avoir eu connaissance. D’autre part, leur demande de remise en liberté de Michel Neyret à été repoussée, du moins, jusqu’à la tenue d’une éventuelle audition, prévue en janvier.
Michel Neyret, a été mis en examen et incarcéré au début du mois d’octobre. Il doit notamment répondre de « trafic de stupéfiants, association de malfaiteurs, corruption passive, trafic d’influence, détournements de saisies, vols en réunion et violation du secret professionnel ». Dans un procès verbal de synthèse daté du 22 avril 2011, il est indiqué que ce commissaire avait procédé à sept consultations dans les fichiers de police (fichier des personnes recherchées (FPR), données d’Interpol..) pour le compte de présumés malfaiteurs. Ces renseignements auraient été fournis à la demande de Gilles Bénichou, un escroc, qui, a d’ailleurs été mis en examen et écroué dans la même affaire.
Questionné sur une publication de Paris Match, selon laquelle ces fiches auraient pu être monnayées jusqu’à 50 000 euros, l’avocat de Michel Neyret, Me Sauvayre déclarait qu’ « il y a eu des fiches sorties », et que Michel Neyret « a reconnu avoir bénéficié de faveurs, une voiture, une villa, dont il aurait joui, mais jamais du moindre centime ». Cependant, il conteste qu’un quelconque service ait pu être monnayé contre « des espèces sonnantes et trébuchantes ».
Michel Neyret a été considéré par sa hiérarchie comme l’un des plus doués de sa génération. Il quitte la PJ de Lyon en 2007 et devient chef de la brigade antigang. C’est alors qu’il fait la connaissance, de Gilles Bénichou, un escroc qui était un ancien indicateur de police, et de son cousin Stéphane Alzraa, suspecté de trafic de cocaïne. Ayant commencé à tisser des liens avec les deux individus, il s’invite régulièrement dans leurs villas et profite de leurs voitures de sport, reçoit de somptueux voyages, une montre d’une valeur de 30 000 €, des vêtements d’une valeur totale 40 000 euros rien qu’en mars ou encore des chèques-cadeaux d’un montant supérieur à 1 000 euros. A cela s’ajoute un compte bancaire au nom de sa femme, ouvert à Genève en septembre.
A cet effet, une commission rogatoire internationale a été envoyée à la justice suisse afin de statuer si Michel Neyret avait pu y percevoir des fonds, un fait qu’il nie catégoriquement.
Rappelons qu’au lendemain de la mise en examen de Neyret, trois policiers, en garde à vue dans l’enquête pour corruption et trafic d’influence, ont été présentés aux juges. Il s’agit notamment du numéro un de la brigade de recherche et d’intervention (BRI) de Lyon, du chef de l’antenne grenobloise de la police judiciaire (PJ) et de l’adjoint de ce dernier.