"Vous êtes les bienvenus chez moi. Ne regardez pas le désordre" : costume impeccable, le ministre de l’Industrie, Christian Estrosi, critiqué pour ses deux logements de fonction, dont l’un occupé par sa fille, les a fait visiter pour tenter d’arrêter la polémique.
PARIS (AFP) - Le ministre de l’Industrie Christian Estrosi a relancé malgré lui la polémique sur les logements de fonction attribués aux ministres, au point de convoquer la presse pour montrer ses deux appartements, dont une "soupente", et répondre aux "informations mensongères".
"Non, il n’y a pas eu de logement attribué à ma famille" et non, "je ne coûté pas un centime à l’Etat, ma fille non plus" puisque c’est un logement de fonction appartenant au ministère des Finances, a dit mercredi M. Estrosi à la presse venue visiter ses deux appartements de fonction à Paris.
Le maire de Nice avait lui-même invité les médias à visiter son trois pièces de 70 m2 - qu’il a qualifié de "soupente" - dans l’Hôtel de Seignelay, une annexe du ministère des Finances rue de Lille, dans le très huppé 7è arrondissement, et son autre appartement de fonction de 50 m2 au-dessus de ses bureaux à Bercy.
Un exercice de "transparence", selon lui, pour répondre aux "informations mensongères et malveillantes publiées par le Canard Enchaîné". "Une mise en scène", affirmaient pour leur part de nombreux médias sur internet, commentant une décoration trop sobre pour être vraie.
Signe de tension, la visite a été menée tambour battant et a donné lieu à une altercation entre un photographe et un conseiller du ministre.
Le Canard enchaîné a publié mercredi un article dénonçant l’utilisation d’un logement de fonction par la fille du ministre, ce que M. Estrosi a fermement démenti.
Selon l’hebdomadaire, M. Estrosi, une fois nommé ministre en juin 2009, a obtenu le trois pièces rue de Lille. Il y a ensuite mis l’une de ses filles étudiante, dès qu’il a bénéficié d’un logement à Bercy.
Faux, rétorque M. Estrosi. Il affirme partager cet appartement avec sa fille, en toute légalité. Quant à l’autre logement à Bercy, il dit l’utiliser lorsqu’il travaille tard. Il a une superficie d’"à peu près 30m2, c’est-à-dire un lit dans un bureau", selon lui.
M. Estrosi entend tuer dans l’oeuf une nouvelle polémique sur les appartements de fonction des ministres.
En 2005, le ministre de l’Economie d’alors, Hervé Gaymard, avait démissionné après avoir déclenché un scandale, reconnaissant avoir loué pour lui et sa famille un logement de 600 m2, tandis qu’il avait mis en location l’appartement dont il était propriétaire.
Depuis, les règles ont été revues. Une circulaire de février 2005 impose au ministre qui dispose d’un logement personnel à Paris de l’occuper. Dans le cas contraire, il peut soit occuper un logement de fonction - c’est le cas de M. Estrosi - soit, s’il n’y en a pas de disponible, en louer un dans la limite de 80m2 plus 20m2 par enfant à charge.
L’UMP a immédiatement volé à son secours : "face aux postures populistes qui ne visent en réalité qu’à salir le personnel politique à coup de petites polémiques mensongères, dérisoires et à bon compte, le mouvement populaire félicite le ministre pour la transparence dont il a fait preuve ce matin".
Le parti communiste a fustigé une "affaire révélatrice du décalage grandissant entre le gouvernement et la majorité de notre peuple", affirme Robert Injey, au nom du PCF.
"Ce qui est choquant, c ?est qu ?il puisse considérer que 55 m2 c ?est un bureau avec un lit ! (...) 55 m2 : c ?est le rêve pour des milliers de familles", s’insurge M. Injey, membre de la direction nationale du PCF et élu communiste à Nice.
"Ce mélange d ?indécence et de cynisme, comparable à l ?affaire Gaymard, doit être sanctionné de la même manière", dit aussi Patrick Allemand, un autre élu d’opposition à Nice, premier secrétaire de la fédération PS des Alpes-Maritimes.
Pour lui, s’il s’avère que M. Estrosi a fait bénéficier d’un appartement de fonction à sa fille, "il doit démissionner".