Tout le monde est sur le qui-vive. Quinze jours après le début de l’éruption du volcan islandais Eyjafjöll qui a paralysé le trafic aérien, le nuage de cendres menace à nouveau l’Europe.
Une réunion devait avoir lieu sur le sujet ce lundi soir à la Direction générale de l’aviation civile (DGAC) avec des cadres de Météo-France. Objectif : évaluer les risques d’un retour du nuage sur la France et préparer les mesures en cas de nouveaux risques pour le ciel européen.
Les ministres des Transports de l’Union européenne doivent d’ailleurs se rencontrer ce mardi à Bruxelles pour mieux coordonner les efforts dans l’hypothèse d’une nouvelle crise.
Du côté de l’unité scientifique Safire (Service des avions français instrumentés pour la recherche en environnement), commune au CNRS et à Météo-France, on se disait en stand-by ce lundi après-midi et prêt à décoller pour de nouvelles opérations de mesures au-dessus de la France.
Selon un cadre de l’unité, interrogé par « Le Figaro », une nouvelle opération de mesure serait plus efficace que la première « du fait de l’installation de matériel plus approprié aux cendres volcaniques ».
Contrairement à ce que pouvait laisser croire le silence -purement médiatique- dans lequel il était retombé depuis quelque temps, l’Eyjafjöll est en effet toujours en éruption. Imperturbable, il continue de cracher d’épaisses volutes de vapeur d’eau, de gaz et de cendres dans le ciel européen. Selon les vulcanologues de l’Institut des sciences de la Terre d’Islande, le panache est même « plus sombre et plus large » qu’au cours de la semaine précédente.
Ce qui signifie que sa concentration en cendres (les particules de silice qui menacent les réacteurs d’avion) a augmenté et que la « phase explosive s’est accrue en intensité au cours des derniers jours ». Mais malgré ce léger regain d’activité, l’émission de cendres reste 20 fois moins élevée qu’à la mi-avril au plus fort de la crise, lorsque le nuage recouvrait la majeure partie du nord de l’Europe. La différence vient essentiellement du fait que le glacier qui recouvrait le cratère a entièrement fondu depuis. Or, jusqu’à présent, c’est le choc thermique entre la glace et la lave en fusion qui renforçait le caractère explosif de l’éruption.
Du coup, le nuage stationne nettement plus bas qu’il y a deux semaines, entre 4 000 et 5 500 mètres d’altitude.
Aujourd’hui, c’est la météo qui est scrutée de près. Alors que depuis le 23 avril les vents repoussaient les cendres de l’Eyjafjöll vers le nord de la Scandinavie et l’est du Groënland, loin des principales routes de trafic aérien, le changement de temps intervenu le week-end du 1er mai les rabat à nouveau vers le sud de l’Islande à la faveur d’un flux de nord-ouest puis de nord-est.
Ce mardi matin, selon les calculs du Centre d’observation des cendres volcaniques (VAAC, Volcanic Ash Advisory Center de Londres, le nuage stationnait au-dessus de l’Écosse et de l’Irlande avant d’obliquer vers l’océan Atlantique au large des côtes françaises jusqu’à la latitude de Bordeaux. Ce lundi soir, l’Irlande annonçait des restrictions à tous les vols au départ et à l’arrivée des aérports de l’île mardi de 6 heures à 12 heures GMT (8 heures à 14 heures, heure française).
Selon Éric Mas, directeur technique de Meteoconsult, « la tendance devrait durer toute la semaine avec une possibilité que le nuage atteigne aujourd’hui l’ouest de la France ». Le temps ne devrait changer qu’« à partir de vendredi, avec l’arrivée sur notre pays d’un système dépressionnaire et de pluies qui auront pour effet de laver le ciel et de repousser le nuage vers l’Atlantique ».En cas de retour du nuage, la DGAC se dit prête à remettre en place le dispositif de cellule de crise qui a fait ses preuves à Paris. « Notre dispositif n’a pas fait défaut », explique un cadre de la DGAC.
Il se dit également que les cartes VAAC anglaises seront prises avec davantage de précaution et que les autorités utiliseront cette fois-ci des cartes de dispersion des cendres émises par Eurocontrol, l’entité européenne qui gère le trafic aérien. Celles-ci offrent une analyse plus fine des densités de particules volcaniques. Elles permettraient d’exclure certaines zones au trafic sans pour autant fermer l’ensemble du ciel européen.
Pour l’instant, personne n’est en mesure de dire quand le volcan s’éteindra. « Actuellement, aucune indication ne permet de dire que l’éruption touche à sa fin », estiment les vulcanologues islandais. Il faut donc s’attendre à vivre pendant une période indéterminée, qui peut s’étaler sur plusieurs mois, sous la menace intermittente d’un nuage de cendres plus ou moins dense susceptible de se rabattre sur l’Europe à la faveur de vents orientés au nord.