Grenoble, première ville de France à avoir réalisé un inventaire "complet" sur la spoliation des biens juifs pendant l’occupation nazie, va présenter lundi les résultats de ses dix années de recherches au grand public puis lors d’un colloque international.
GRENOBLE (AFP) - Grenoble, première ville de France à avoir réalisé un inventaire "complet" sur la spoliation des biens juifs pendant l’occupation nazie, va présenter lundi les résultats de ses dix années de recherches au grand public puis lors d’un colloque international.
Ces recherches particulièrement longues, a souligné Tal Bruttmann, historien en charge de la commission d’enquête, précisent les mécanismes de la spoliation, dont environ 500 familles et 130 entreprises auraient été victimes en Isère, et ses répercussions.
"C’est un travail de micro-histoire où nous avons essayé de comprendre comment s’articulait au quotidien cette spoliation, qui se faisait au vu et au su de tout le monde", a expliqué Tal Bruttmann.
Alors que cette spoliation "a reposé sur le mythe de l’argent juif", relève-t-il, "on se rend compte que la plupart des victimes sont des gens pauvres, des artisans à qui on prenait leur outil de travail".
"La spoliation aura facilité leur arrestation et bénéficié à la solution finale", estime l’historien, pour qui la justice a joué "un rôle très important en condamnant les juifs qui s’opposaient à la spoliation instituée par les lois d’aryanisation".
D’après Tal Bruttmann, en 1943, "environ 10% de l’activité judiciaire de l’agglomération grenobloise concernait des affaires juives".
Le colloque de Grenoble organisé sur le thème de "l’aryanisation économique et des spoliations des juifs dans l’Europe nazie" réunira pendant trois jours une trentaine de spécialistes venus d’Allemagne, d’Israël, du Canada, d’Autriche, de Belgique ou de Norvège.
Il constituera l’occasion de s’interroger sur "le rôles des Etats, de la population, sur la chronologie des événements entre les différents pays et ses conséquences", souligne l’historienne Annette Wieviorka.
"La spoliation est une étape dans le recensement et le marquage des juifs destinée à les extraire de la vie économique et sociale", rappelle Annette Wieviorka.
L’enquête sur les biens juifs en Isère sera parallèlement présentée au grand public lors d’une table ronde lundi à Grenoble, en présence d’Annette Wieviorka et de Serge Klarsfeld, tous deux anciens membres de la mission Mattéoli, en charge de l’étude sur la spoliation des juifs en France.
Le montant de la spoliation des juifs en France de 1940 à 1944 est estimé à un peu plus de 5 milliards de francs de l’époque, selon les études menées par la mission Mattéoli, qui ont toutefois constaté que 90% des biens juifs spoliés en valeur ont été restitués ou fait l’objet d’une indemnisation après la Seconde Guerre mondiale.