Le cabinet Technologia rend vendredi son rapport final sur la souffrance au travail à France Télécom près d’un an après la série de suicides qui a touché le groupe, alors que 15 salariés se sont donné la mort depuis janvier, malgré plusieurs mesures annoncées pour réduire le stress.
PARIS (AFP) - Le cabinet Technologia rend vendredi son rapport final sur la souffrance au travail à France Télécom près d’un an après la série de suicides qui a touché le groupe, alors que 15 salariés se sont donné la mort depuis janvier, malgré plusieurs mesures annoncées pour réduire le stress.
Le cabinet d’expertise présentera à la direction et aux syndicats, des analyses des conditions de travail structurées par métiers (techniciens, commerciaux, etc.), et une série de préconisations, dans la lignée de celles formulées en mars dans un pré-rapport.
Technologia avait été mandaté en septembre par l’entreprise à la suite d’une série de suicides de salariés, pour établir un plan d’actions visant à mettre fin au malaise social.
Au total, 35 salariés se sont suicidés, certains sur le lieu de travail, en 2008 et 2009, les syndicats accusant les conditions professionnelles et le management d’en être responsables.
En décembre, Technologia avait établi un état des lieux assez sombre de la situation, à partir des résultats d’un questionnaire auquel ont répondu 80.080 des 102.843 salariés français du groupe.
Il soulignait notamment une situation de "travail tendu" à France Télécom, des conditions de travail difficiles, des relations sociales dégradées pour certains métiers, ainsi qu’une "défaillance du management".
En mars, il relevait la persistance du malaise et avançait une centaine de propositions, comme réformer des ressources humaines "discréditées", "revoir le système de management" ou encore "limiter le nombre des indicateurs de suivi de l’activité", jugés trop nombreux et aux "objectifs trop élevés".
Depuis janvier, 15 suicides et 9 tentatives de suicides ont été dénombrés par l’Observatoire du stress, créé par deux syndicats du groupe.
Les syndicats attendent avec intérêt les nouvelles préconisations de Technologia, car "les évolutions restent lentes et il y a toujours une pression sur les objectifs", a expliqué Pierre Dubois (CFDT).
Ces propositions seront "des éléments comme d’autres, à mettre dans les négociations en cours", a estimé Christian Mathorel (CGT).
Elles pourraient s’intégrer dans les négociations sur les conditions de travail, qui semblent "bloquées", a ajouté Pierre Morville (CFE-CGC).
Mais Patrick Ackermann (Sud) craint que la direction ne décide plutôt de faire "un classement vertical" du rapport.
Nabyl Beldjoudi (FO) espère qu’il "servira au niveau judiciaire", dans le cadre de l’information contre X ouverte début avril par le parquet de Paris pour "harcèlement moral", à la suite d’une plainte déposée par Sud en décembre.
La direction, qui dément toute politique de harcèlement, assure qu’elle prendra en compte le rapport Technologia. "S’il y a des idées pertinentes, concrètes, sur lesquels il y a matière à discuter avec les syndicats, on fera le point avec eux", a assuré jeudi Carole Froucht, présidente du comité de pilotage stress.
Elle souligne aussi que la direction a mené plus de 2.500 réunions sur le terrain pour écouter les salariés et que des négociations avec les syndicats ont débouché sur sept accords, dont l’un d’eux, sur la mobilité, a notamment acté le fait que la mobilité des salariés serait dorénavant basée sur le volontariat.
La direction a également annoncé le recrutement de 3.500 personnes en 2010, la mise en place d’un "baromètre social" et l’amélioration des locaux.
Elle a aussi promis que la part variable de la rémunération des 1.100 cadres dirigeants du groupe serait désormais attribuée non seulement sur des critères économiques, mais aussi de performance sociale, comme l’absentéisme ou la satisfaction des salariés.