L’après-midi de comparutions immédiates vendredi 21 octobre au tribunal judiciaire s’achève avec une affaire de violences conjugales. Depuis leur emménagement, lorsque Joël rentre alcoolisé le soir, il violente Jessica. Mercredi 19 octobre, la jeune femme appelle la police pour des coups plus forts que d’habitude. Le prévenu encourt de la prison ferme.
“C’est comme cela qu’arrive les drames, évoque à la barre Jessica, gorge nouée. Cette fois c’était la fois de trop.” La jeune femme est en couple avec Joël, 28 ans. Au début, tout allait bien. Tout commence à partir du moment où ils vivent ensemble : cris, coups de tête, claques et tentatives d’étranglement.
Les policiers interviennent une première fois au domicile du couple le 10 août 2022. Joël tente d’étrangler Jessica, elle s’en sort avec un hématome à l’arcade sourcilière.
Un mois plus tard, un autre épisode de violences marque le foyer. Cette fois-ci raconté par la mère de la jeune femme aux forces de l’ordre : “Joël est rentré à 23 heures, alcoolisé. Il hurle partout, réveille tout le monde, donne un coup de tête à Jessica et la pousse dans le couloir.”
Pour sa défense, le jeune homme explique “qu’il essaye de ne pas taper en présence des enfants.” Ce mercredi 19 octobre, c’est bien en présence de ses marmailles que Joël a agit.
Il rentre une nouvelle fois très alcoolisé au domicile conjugal dans la nuit. Avec “1 gramme 40” dans le sang précise la juge. En effet, l’alcool est une réelle problématique pour Joël. Sa compagne à la barre témoigne : “Lorsqu’il boit, c’est la catastrophe. Sinon le reste du temps tout se passe très bien. Je veux aujourd’hui qu’il comprenne que ce qu’il nous fait vivre à la maison, ce n’est pas normal. Il est très jaloux. J’ai réussi à protéger mes enfants. Mais eux aussi ressentent ce qu’il se passe à la maison. Le plus grand me dit "Papa il est gentil quand il ne boit pas."
“Il n’y a pas de raison que vous preniez des coups”, l’alerte la procureure. “Je sais. Je suis perdue. Tant qu’il ne se fera pas soigner… J’ai peur. Mais malgré tout je l’aime, confie Jessica. Lors de son dernier excès de colère, il a même cassé sa console de jeux vidéo et débranché les prises des appareils électroménagers.”
La jeune femme, cheveux long blonds, lisses, au visage creusé, rappelle même une scène marquante de cette soirée de violences. “Joël avait de l’écume autour de la bouche. J’ai tout de suite compris qu’il avait ingéré de l’artane.” On sent de l’effroi dans ses yeux bleus perçants, elle mime la baffe reçue, cet ensemble est mélangé à un regard rempli d’empathie car elle veut “qu’il s’en sorte”, clame-t-elle face au jury.
“Ils habitent ensemble depuis trois ans. La violence monte crescendo. Il vous traite de putain”, intervient à nouveau la procureur. Dans son réquisitoire, elle insiste sur l’escalade de la violence, le cocktail alcool et médicaments. “Un individu qui reconnaît ce qu’il fait tout en ne se souvenant de rien. Il pousse madame à terre, elle se relève et prend une claque. Il lui faut un électrochoc. Et argue… Un individu avec déjà deux condamnations toutes sur fond d’alcool”.
L’avocate de Joël plaide pendant quinze minutes. Elle évoque une famille aimante autour de lui mais son client est resté bloqué lors du décès de son père depuis de nombreuses années. Alors, il oublie avec les moyens du bord. Son client boit depuis l’âge de 20 ans. “La meilleure solution est de lui apporter des soins. Il a besoin d’être aidé et accompagné.”
Après sa plaidoirie, la cour se retire le temps d’aller délibérer. Jessica attend dehors avec des proches. La sonnerie retentit. Il écope de 18 mois de prison, entièrement assorti d’un sursis probatoire pendant deux ans.
Le père de famille est condamné à suivre un stage de sensibilisation aux violences intrafamiliales, de se faire soigner pour ses addictions à l’alcool et aux stupéfiants. A cela s’ajoute l’interdiction de se rendre chez Jessica. La juge conclut l’audience en s’adressant directement au prévenu : “On vous laisse une chance. Saisissez-là.”
Carla Bucero Lanzi