Le feu continue de ravager la forêt primaire du Maïdo. Hier, des militaires venus de Mayotte et de Métropole ont pris leurs quartiers à Saint-Paul afin de renforcer le dispositif en place. Si pour l’heure, il est difficile d’établir un bilan matériel de cet incendie, tous s’accordent à dire que les 350 hectares partis en fumée mettront du temps à retrouver leur visage d’avant le sinistre. Directeur Régional de l’Office National des Forêts, Hervé Houin nous détaille les espèces victimes de cet incendie ravageur ainsi que les efforts qui devront être fournis pour redonner à la forêt primaire son visage d’antan.
Linfo.re : Quelles sont les espèces (animales et végétales) les plus représentées sur le site actuellement en proie aux flammes ?
La zone sinistrée abrite plusieurs espèces végétales parmi lesquelles l’erica reunionensis (brande vert, qui contient des huiles essentielles inflammables), l’ hypericum lanceolatum (aussi appelé fleur jaune), l’hubertia tomentosa (ambaville), l’ulex europaeus (ajonc d’europe), l’acacia heterophyla (tamarin des hauts), et le sophora denudata (petit tamarin des hauts).
La forêt primaire constitue également un lieu de vie pour nombre d’animaux en général et d’oiseaux en particulier. Parmi ces espèces animales, on peut citer le zosterops, plus connu sous le nom de zoiseau blanc et zoiseau vert, le papangue qui niche dans le rempart, et le célèbre phelsuma borbonica (gecko vert), dont on sait qu’il est en voie d’extinction.
Linfo.re : A ce stade, sommes-nous en mesure d’évaluer les conséquences du sinistre sur la flore et la faune ?
Il est trop tôt pour établir les conséquences sur la flore et la faune. Tout dépendra des surfaces finalement parcourues, et de la vitesse de parcours car les conséquences peuvent varier sur les racines des arbustes en place.
L’hypothèse d’un feu qui embraserait toute la zone n’est pas retenue à ce jour.
Linfo.re : Face à ce type d’événement, il a été démontré que la nature développe des mécanismes de protection. Quels sont-ils ?
La végétation des Hauts de l’ouest a été façonnée par les incendies, qui se succèdent de manière naturelle (ou pas) depuis toujours. Elle a donc développé des dispositifs spécifiques qui lui permettent de renaître de ses cendres. L’un de ces dispositifs consiste en la production de graines résistantes au feu. Un autre dispositif consiste en une grande résistance du système racinaire au passage de ce même feu, permettant une repousse plus rapide.
Linfo.re : Au regard des centaines d’hectares de forêt carbonisées, l’Office National des Forêts envisage-t-il de recueillir des graines sur le site du volcan pour permettre le reboisement de la forêt primaire ? Combien de temps faudra-t-il attendre avant que la nature pense ses plaies ?
Il n’y aura pas nécessité d’avoir recours à la banque de graines issues de milieu comparable sur le volcan. Par contre, il sera nécessaire d’accompagner la recolonisation des terres brûlées, en favorisant la régénération des espèces endémiques au détriment des essences exotiques comme l’ajonc d’Europe.
Concrètement, il s’agira d’intervenir régulièrement, pendant 10 ans, avec nos ouvriers, pour détruire les exotiques. Sur 300 à 350 ha, cela représente un investissement très lourd, investissement qui peut être mis à mal par les bovins divagants sur cette zone. Il s’agit là d’un autre fléau très important.