Levée de boucliers symbolique aux Comores contre la mutation institutionnelle de Mayotte en département français prévue ce jeudi 31 mars 2011.
"Les Comores n’accepteront jamais la transformation de l’île de Mayotte, terre africaine et arabe, en un département français". C’est la déclaration choc du président de l’Union des Comores Ahmed Mohamed Sambi à l’occasion de la " Journée de la solidarité contre l’occupation illégale de Mayotte par la France " organisée samedi 26 mars à Moroni.
"Le grand mur invisible qu’on prétend construire pour séparer un peuple, diviser un pays et déchirer une nation à jamais, ne saurait avoir de bases solides", a fustigé le Chef d’Etat comorien, qui dénonce " un coup de force de la France " à Mayotte. Un territoire français qui est aujourd’hui sur la voie de la départementalisation.
"Ce que nous dénonçons avec fermeté, c’est la transformation du bras de mer qui sépare Mayotte d’Anjouan, en un cimetière marin, le plus grand du monde, dans lequel reposent les dépouilles de nos frères, de nos sœurs, de nos enfants, morts par milliers (...)", a ajouté le président sortant comorien, jugeant "inadmissible que la communauté internationale ferme les yeux sur ce drame humanitaire ".
Cette journée de mobilisation a aussi reçu le soutien des chancelleries étrangères présentes aux Comores. A la tribune des officiels autour de Sambi, plusieurs diplomates ont pris part aux discours, mais celui de l’ambassadeur de la Libye " a marqué les esprits ", selon La Lettre de Malango. " Il est devenu une honte maintenant de parler français. Mais il est nécessaire de parler cette langue pour que le message arrive à destination ", a lancé l’ambassadeur de Kadhafi, en préambule de son discours. " La France essaye de voler non seulement Mayotte mais aussi notre langue et notre culture ", a continué l’ambassadeur libyen, Misbah Al Mountassir Farfer, qui fait un lien entre le cas de Mayotte et celui de la Libye. Le diplomate libyen juge " nulles et non avenues toutes les mesures prises par la France ".
" Prétendant appliquer les résolutions du conseil de sécurité, cette France elle-même, l’Etat hors de droit et de la légitimité internationale, continue d’ignorer les conventions et la légitimité internationale qui confirme que Mayotte fait partie intégrante de l’archipel des Comores ", a-t-il affirmé. Avant d’ajouter : " la pire des colonisations que l’Afrique a connue, c’est la colonisation française ".
Dans la foulée de ces discours enflammés, l’Union Africaine se montre également assez virulente. " Le soutien de l’Union Africaine en faveur du recouvrement de la souveraineté comorienne de Mayotte demeure indéfectible car conforme au principe inaliénable du respect de la souveraineté internationale des Etats africains et l’intangibilité des frontière issues de la colonisation qui guide son action en faveur de la paix et la stabilité ", a rappelé Mourad Taiate, représentant de l’UA à Moroni.
Selon le diplomate africain, " le processus de départementalisation de Mayotte est immoral. Il l’est d’abord humainement, au regard des nombreuses victimes qui périssent chaque année en tentant de rejoindre une partie confisquée de leur pays. Il l’est d’avantage, parce qu’il s’éloigne fondamentalement des valeurs universelles, de droits de l’Homme et du respect des droits humains auxquels la communauté internationale a profondément souscrit. A ce titre, il faut le condamner ".
Revendiqué par les Comores, l’archipel de Mayotte est rattaché à la France depuis 1841, tandis que les trois autres îles de l’archipel des Comores (Grande Comore, Anjouan et Mohéli) ont choisi l’indépendance en 1974. Mayotte a dit " Oui " à la départementalisation à 95,2% des voix à l’issue d’un référendum organisé le 29 mars 2009, et deviendra le 101e département français ce jeudi 31 mars 2011.