Dans son récit, une jeune fille de 15 ans recrutée pour le jihad dévoile comment elle a été appelée pour organiser une tuerie en France.
C’est encore une adolescente de 15 ans, que les terroristes islamiques, a recruté pour rejoindre leur rang. Léa est totalement l’antipode de ceux que pensent les gens sur les apprentis jihadistes. En deux mois pourtant, elle est devenue l’une des ferventes adeptes de cette pratique de l’islam radical via les réseaux de la toile. Au cours de son interpellation, elle a livré un témoignage des plus accablants.
Elle avait été interceptée par les forces de l’ordre quand elle a tenté de gagner la Syrie. Placée en mesure éducative dans un premier temps, elle vit sous un constant dédoublement de personnalité. Un coup, elle semble faire un retour à la normalité, et d’un autre, elle accepte de toujours poursuivre les œuvres jihadistes demandées par son réseau et ainsi de préparer un attentat antisémite sur le territoire français. La police de la Direction générale de la Sécurité Intérieure la surveillait depuis quelque temps, elle a été finalement arrêtée en Septembre.
Cloîtrée dans un mutisme total, Léa ne s’est mise à tout révéler qu’au cours de l’intervention du CPDSI, le Centre de Prévention contre les Dérives sectaires liées à l’Islam. C’est entre les colonnes du Nouvel Observateur que le témoignage poignant de la jeune fille a été recueilli. Ci-dessous, les parties les plus marquantes.
Elle raconte alors, "Un jour où je ne me sentais pas très bien, j’ai laissé sur ma page Facebook un message disant que j’aimerais pouvoir me faire pardonner toutes mes bêtises. Là, des gens m’ont ajoutée dans leurs amis et puis ils sont venus me parler. Ils sont arrivés tous seuls, très vite. Comme j’avais écrit que je souhaitais devenir infirmière, ils m’ont dit que je pouvais venir aider en Syrie, pour faire de l’humanitaire, et qu’il n’y avait rien de mieux au monde que de se faire pardonné au Sham (le Levant, où se trouve la Syrie, NDLR). Ils m’ont envoyé des vidéos sur les enfants gazés par Bachar (al-Assad, NDLR), sur les mensonges des politiques, sur l’islamophobie... Ils disaient que je ne devais pas obéir à mes parents, parce qu’eux n’obéissaient pas à Allah et qu’il ne fallait obéir qu’aux lois d’Allah sinon on était un mécréant, un ignorant, un infidèle..."
"Petit à petit, je me suis mise à ne plus parler à personne, ni à l’école ni à la maison, je restais dans ma chambre, volets fermés. Et je me connectais. Ils sont venus encore plus nombreux quand j’ai pris un "blase" (pseudo, NDLR) musulman, ils étaient au moins cinquante, d’abord des hommes, après des femmes, de France, de Belgique, de Syrie...", poursuit-elle.
Entourée de réseaux intégristes, Léa a été matraquée par les vidéos et les messages lui indiquant qu’elle est une des élues pour sauver la terre de sa décadence. Devant ce qu’on attend d’elle, la jeune adolescente n’aura plus qu’une idée en tête, gagner au plus vite la Syrie. " C’est très facile de trouver des passeurs. On les appelle ou on leur donne un numéro de téléphone sur internet. Ils m’ont expliqué qu’il fallait d’abord que j’aille en Turquie, que je me marie là-bas, puis que je tombe enceinte pour qu’on puisse m’emmener en Syrie avec l’enfant", précise la jeune fille.
Quant à sa famille, elle annonce : " Mes parents me demandaient si j’avais changé, si j’avais renoncé à mes idées, je leur disais que oui, mais en fait c’était de pire en pire. Sur internet, ils me disaient : "Dis-leur que tout va bien, que tu as arrêté tout ça, que tu ne veux plus partir et que c’étaient des bêtises. Ils finiront par te lâcher et tu seras tranquille."
Elle a également évoqué le moment où on lui a demandé de passer à l’acte en France. "Un jour on m’a dit : C’est mort, avec ce que tu as sur le dos, tu ne pourras jamais venir, alors maintenant il faut passer à l’acte en France. Ils ont commencé à me montrer des vidéos des enfants morts en Palestine, à me parler de la nécessité d’agir contre les juifs. Quand on est fiché à la frontière, ils nous mettent la pression pour qu’on fasse des attentats kamikazes ou "à la Merah" (du nom de Mohamed Merah, le tueur de Toulouse, NDLR). C’est une femme qui m’en a parlé la première. J’avais trouvé le lieu, le moyen de me procurer des armes."
La pression qui monte de la part des recruteurs de Léa est très forte et permanente. La DGSI avait trouvé la menace sérieuse après avoir placé sur écoute la jeune adolescente. La jeune fille ne retrouvera un semblant de raison qu’au cours des séances avec le CPDSI. Elle prendra conscience de son fanatisme trop poussé ainsi que son endoctrinement. Actuellement, elle est encore sous l’angoisse que ses recruteurs viennent à la chercher chez elle.
"Maintenant, c’est dur... J’ai du mal à assumer que je me suis fait avoir Je m’en veux beaucoup pour ça, d’avoir pu moi aussi entraîner d’autres filles sans le faire exprès, même des plus petites que moi... Je voulais tellement partir, on enviait toutes celles qui y arrivaient. Maintenant, certaines vont mourir là-bas, en Syrie ou en Irak, et peut-être à cause de moi..."